Merde alors. Si plus tôt dans la journée quelqu'un m'avait dit que je rencontrerais une des prétendantes au trône britannique, je l'aurais traité de fou, voire même de débile mental. En même temps, je n'aurais jamais soupçonné les petites filles de la Reine d'être des sorcières, le secret devait être trop bien gardé, voire même classé secret d'état. Imaginez la panique des moldus s'ils venaient à apprendre qu'il y avait des sorciers jusque dans la famille royale elle-même. D'où la bourde que je venais de faire. Heureusement, la princesse d'York ne semblait pas s'en offusquer. « Tu as au moins la bienséance de l'avouer! Je préfères encore qu'on me traite comme n'importe qui plutôt qu'en faisant cinq erreurs au protocole rien qu'en faisant une révérance loupée! » Malgré ma gêne, je me surpris à esquisser l'ombre d'un sourire. En effet, j'imaginais le tableau, et l'image que j'en avais était assez burlesque dans son genre. Paraissait-il qu'il fallait avoir ça dans le sang pour le faire correctement. Ce n'était donc pas moi, simple roturière, qui allait m'y coller. « Et tu peux m'appeler Ginnie, ici, nous ne sommes que deux nées-moldues l'une comme l'autre... » Même si j'étais plutôt flattée qu'elle m'autorise à l'appeler par son surnom, qui impliquait déjà une certaine proximité, je sentis un léger malaise m'envahir lorsqu'elle me qualifia de née moldue, qualification que je m'empressai de rectifier. « Sang-mêlée, en réalité, mon père...était un sorcier. » Qu'elle ne m'en tienne donc pas rigueur, c'était un automatisme que j'avais acquis au fil des années. On m'avait tellement insultée de sang-de-bourbe que rétablir la réalité était devenu machinal, pour ne pas dire complètement obsolète. Enfin, soit, je n'allais pas me formaliser pour si peu. « Tout le monde, je vous présente Tracey Davies. »  Le rouge me monta alors aux joues, alors que j'esquissais un sourire timide de la main. De l'attention, je n'en avais jamais vraiment eu, j'étais de ceux qui restaient dans l'ombre, qui étaient des ombres, alors me retrouver sous les feux des projecteurs, c'était inhabituel, pour ne pas dire déstabilisant. Je gardai le silence face à leurs questions. Je ne savais pas moi-même combien de temps j'allais rester, comment je pouvais espérer les renseigner ? « Aussi longtemps que nécessaire. » me contentai-je de murmurer en serrant légèrement les poings, grimaçant quelque peu car j'avais oublié que mes paumes étaient dans un sale état. « La tente de ma soeur est celle-là » Je me retins à grand peine de sourire en pensant que j'allais rencontrer une autre princesse. Pourtant, j'étais presque inquiète à l'idée que Ginnie - autant m'habituer à l'appeler ainsi, même dans ma tête – m'abandonne dans un endroit que je ne connaissais ni d'Eve, ni d'Adam. Enfin, je ne pouvais décemment pas la monopoliser plus longtemps, elle avait sans doute des choses à faire à côté, comme se faire soigner par exemple. « Je te reverrai très vite! » J'acquiesçai d'un hochement de tête, avant de lui adresser un léger signe d'au-revoir. Je regardai alors autour de moi, n'arrivant pas encore à croire que j'étais en sécurité, qu'on allait s'occuper de moi. Peut-être allais-je y trouver une famille de substitution, allez savoir, après tout, nous étions tous dans le même sac. Je jetai alors un regard absent à mes mains écorchées. Je ferais mieux d'aller me faire soigner, moi aussi, et de me poser quelque part, histoire de me remettre de mes émotions. D'un pas résolu, je me dirigeai alors vers la tente de la médicomage, prête à faire sa connaissance.