I. TON PERSONNAGE ET LA SITUATION ACTUELLE ? Éternel hors case, Daemon ne s'est que rarement senti concerné par la guerre qui se jouait, au-delà des limites de son propre esprit : s'il a appris à apprivoiser ce fait historique, c'est majoritairement pour pouvoir s'en emparer afin de bouleverser sa vie, la changer d'une quelconque manière. Il y est parvenu aujourd'hui, et l'on pourrait croire, à le voir, que le jeune sorcier n'a aucun mal à s'adapter au Régime qui se profile dans cette nouvelle page d'histoire. C'est le cas, protégé par son statut de sang-mêlé, Daemon aurait tout pour être comme le commun des mortels, invisible au milieu d'une masse, plus chanceux que d'autres, simplement parce qu'il a su tirer son épingle du jeu en quelques astucieux coups d'échec bien calculés. Cependant, la réalité s'avère bien différente, si la vie avait été facile jusque-là, les vieux démons de Daemon murmurent à son oreille, les choses vont vite avancer à présent, et sa place n'est que plus vacante que jamais désormais. A tout moment, il le sait, il le sent flotter dans l'air, l'insaisissable peut surgir de nulle part et le faire tomber de son piédestal.

II. TOUT-A-SAVOIR : le travail et la discipline n'ont jamais été ses champs de prédilection, il s'est toujours considéré comme quelqu'un plus tourné vers l'action que la diplomatie : il n'est d'ailleurs pas altruisme pour un sous, et préfère toujours foncer dans le tas. ◊ c'est un grand amateur d'alcool, que ce soit sorcier ou moldu, il a découvert l'hydromel en Russie, et quelques uns des alcools assommants en rôdant souvent du côté du Londres moldu, en définitive, rien ne remplace le Whisky Pur Feu qu'il a souvent bu à outrances depuis longtemps déjà ◊ Daemon est souvent pris de tocs qui sont survenus depuis la mort de sa sœur à Azkaban, s'il n'a aucun détail sur le suicide de celle-ci dans les geôles de la prison sorcière, son imagination fleurit d'images terrifiantes qui le hantent constamment et qui le rendent parfois imprévisible ◊ il n'a jamais été insufflé à Daemon l'orgueil de la pureté du sang ou le raciste d'autres, seul son intérêt personnel prônait dans cette guerre : c'est pour survivre et gagner en importance qu'il a dénoncé sa sœur et tué sa mère, quelques mois plus tôt, des actions qui, si elles venaient à se savoir, compliqueraient bien les choses pour lui ◊ dans tout ce qu'il a fait, il n'a que rarement pensé à tout "ce qu'il y avait au-dessus de lui" dans l'échelle sociale, mais depuis qu'il se retrouve en plein cœur du Ministère, il découvre l'envers du décor de la guerre qui lui a tant apporté, notamment la ségrégation de plus en plus importante des sangs moins purs que d'autres ◊ depuis le début de la guerre, Daemon apprécie parfois le temps de quelques heures de s'évader du monde des sorciers pour retrouver le monde moldu, celui auquel a appartenu sa mère et dont pourtant, il se sent parfois étranger ◊ il est dit que les baguettes en bois de cyprès sont destinées à faire de grandes choses, Daemon se plait à croire qu'entre ses mains, la sienne a fait de grandes choses pendant la guerre ◊ il ne parvient jamais à être très honnête, avec qui que ce soit, Daemon a toujours été quelqu'un de mauvais perdant, orgueilleux et déloyal, comme un loup solitaire, il a surtout appris à se protéger lui-même avant les autres, sentiment d'indépendance qui n'a que grandi en lui pendant la guerre quand il a rejoint les Rafleurs, qui étaient tous des gens comme lui ◊ il est stratégique, ingénieux, rusé, beau parleur, galant, charmeur, insatiable, instable, au sang chaud, colérique, sanguin, impétueux, arrogant, excellent menteur, impartial, et il défendra toujours ses intérêts avant ceux de qui que ce soit d'autre ◊ curieusement à Poudlard, Daemon était surtout quelqu'un de centré sur les statistiques et l'inaction plutôt que l'action : quand certains jouaient au Quidditch, il excellait dans les jeux de carte et les jeux d'échec et de stratégie du monde sorcier. Il a cependant toujours eu un côté aventureux, qui fait qu'il n'a jamais su tenir en place dans une salle de classe.

« Tu l’as tuée ! Je sais que tu l’as tuée, Daemon ! » Glissant sur ses joues rosies, les larmes de Deirdre ne parvenaient qu’à peine à atteindre son cœur meurtris. A la guerre comme à la guerre, avait-il sans cesse aimé murmurer, avec une lassitude amère dans la voix, à tous ceux qui trouvaient injuste qu’il les arrête pour les échanger contre quelques gallions. Sans doute n’y aurait-il aucun prétexte, auquel sa conscience ou même ses simples paroles moqueuses pourraient se raccrocher pour répondre au regard assassin de la jeune femme. Elle le détestait, ça se lisait dans chaque iridescente de ses iris à présent, le dévisageant de toute la véhémence qu’elle avait tant de fois cultivé à l’égard de l’horrible meurtrier de leur mère. Il aurait pu, au moins, rien que pour la forme, répondre qu’il n’avait rien fait, que les Mangemorts s’étaient contentés de suivre des indications et que, logiquement, il n’était qu’à peine connecté aux décisions qu’ils avaient prises en la tuant sans sommation. Ce serait cependant un fieffé mensonge, qu’il n’aurait pas l’indécence de prononcer, pas alors que sa chère et tendre sœur pointait dans sa direction sa baguette, étroitement serrée entre ses mains. Etaient-ils tous des meurtriers alors, les Egan ? En Deirdre avaient brillé tellement d’espoir dans la famille, qu’elle valait sans doute mieux que cela, que la boue dans laquelle il se prélassait, serrant étroitement l’or âprement amassé des massacres de guerre. C’était tout ce que l’existence pouvait lui apporter ; il n’avait jamais vu sa famille autrement qu’avec un regard distrait, infiniment distant des tendresses qu’il avait pu recevoir : sans doute que quelques secondes avant sa mort, sa mère avait même douté de l’amour qu’il avait pu lui porter un jour, si tant est qu’il ait été capable de cela. Qu’il en soit encore capable, alors qu’il aurait pu, à tout moment, dresser sa baguette à lui, et réduire à néant les incessantes jérémiades de sa sœur.


BLOXAM CREEK, 1981
madness you see, is like gravity
all you need is a little push.
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« Peut-être qu’on devrait demander à Sansa si elle veut venir ! » Encore les deux cousins se préparaient à partir en excursion : ces jours passés chez son oncle et sa tante étaient on ne peut plus libérateurs pour Daemon. Au milieu de deux petites filles qui n’avaient de cesse de se choyer l’une l’autre et de chouiner pour un rien, il avait bien du mal à ne pas avoir envie de partir de chez lui tous les trois jours. Heureusement, ses parents, assez compréhensifs, ou alors inquiets à l’idée de voir leur fils fusiller tant de fois du regard ses deux sœurs d’un air totalement las, acceptaient ses longs séjours chez les Harkness, et avaient appris à faire fi de la mauvaise humeur émanant du gamin à chaque fois qu’il devait retourner chez lui. Si seulement la chouette lui annonçant son inscription à Poudlard pouvait se dépêcher d’arriver, il s’empresserait sans conteste de décamper de chez lui, et éviter le plus possible sa sœur aînée dans les couloirs du château. « Non, t’en fais pas pour elle, elle va trouver une autre raison de faire la tronche après, mieux vaut la laisser ! » Depuis l’entrée de Cersei-Jane dans la vie d’Elwood et Sansa, beaucoup de choses avaient changé : la sœur d’Elwood passait moins de temps en leur compagnie. Ce qui dérangeait Daemon en soit, s’il détestait rester trop longtemps avec ses sœurs, Sansa, elle, avait un côté plus aventureux et moins chouinard qui lui convenait tout à fait. Mais plus les deux jumeaux s’éloignaient, plus la petite gamine qu’était Cersei-Jane parvenait à se faire une place dans cette famille, autrefois si étroitement liée. Elwood ne semblait pas s’en fourvoyer, ni personne d’autre, à croire que Sansa disparaissait lentement mais sûrement depuis l’arrivée de Cersei-Jane – elle remarquerait cependant toujours, que malgré la présence de cette gosse rousse, Daemon, lui, se rendrait toujours compte de sa présence. Ou de son absence, dans le cas présent. « En même temps, si tu arrêtais de penser qu’à Cersei-Jane. » Marmonna-t-il, non sans une once de rancœur déplacée à l’égard de son cousin : si seulement, lui, il avait pu avoir une sœur comme Sansa, il ne l’aurait certainement jamais laissée tomber. Il ne la laisserait jamais tomber même maintenant, alors qu’ils n’étaient que des cousins, elle valait bien mieux que toutes les autres.


LONDON, 1992
hello darkness what’s your name today
i heard you were back in town.
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« Egan ! Vous attendez peut-être que la paperasse se fasse toute seule ?! Qu’elle s’envole comme les petits avions dans l’ascenseur ?! Je vous ai dit qu’ils attendaient ça pour huit heures ce matin, vous avez un problème de mémoire ou quoi ?! » C’était à croire qu’on sein du département de la coopération magique, personne n’avait appris à coopérer avec les autres – pas même le Directeur du Département, qui passait son temps à hurler dès que les choses n’étaient pas faites selon ses envies. Plus les mois passaient au Ministère, plus Daemon se faisait à cette idée déplaisante : s’il avait obtenu le job pour lequel il était si misérablement payé aujourd’hui, c’était sans doute parce que personne d’autre n’en avait voulu. Et qu’ils l’avaient trouvé assez tête en l’air, je m’en-foutiste pour pouvoir affronter le fait de chaque jour se faire exploser un peu plus les tympans. Assis avec toute la fainéantise du monde sur ses épaules, dans cette chaise vissée au sol, Daemon n’accorda pas la moindre réponse, ni un quelconque regard à son supérieur, se contentant de traîner un immense dossier devant lui, sans pour autant lui accorder un quelconque intérêt : pigiste au sein du Ministère de la Magie, voilà ce qu’il était – il avait parfois le sentiment de ne pas mieux faire que de simples moldus coincés dans une banque, ou derrière un bureau le nez collé à une immense pile de feuilles. C’était exactement ce qu’il faisait lui aussi, commettant parfois des heures supplémentaires jusqu’à en avoir les yeux explosés de fatigue, pour simplement se faire remonter les bretelles parce qu’on ne paye pas les gens à rien fiche, ici ! « Et ça ne vous dérange pas d’avoir plus de quatre heures de retard ?! Continuez comme ça, et je vous colle aux archives, jeune homme ! » Il l’avait menacé tant de fois que Daemon soupçonnait de plus en plus l’inexistence d’archives au sein de ce département, sans doute encore une fois, parce que personne ne voulait endosser une telle quantité de travail sous la direction d’un type pareil. Depuis quelques mois à peine après l’obtention de ce travail, dès qu’il avait compris les conditions déplaisantes dans lesquelles il allait passer les prochaines années de sa vie, le jeune Egan avait décidé de ne plus rien en avoir à faire de son travail. Autant passer cinquante ans à mourir à petit feu en se tournant les pouces, plutôt qu’en s’activant dans le vide. Jamais il ne grimperait les échelons, ils ne le destinaient pas à ça, quels que soient les efforts qu’il pourrait faire. Les noms des futurs dirigeants de ce monde étaient déjà écrits dans les arbres généalogiques d’autres familles – les Egan n’étaient pas grand-chose, de toute manière.


AZKABAN, 1998
i need a shore, just one trail i could follow
far from the fog in my head.
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« Elle avait cessé de s’alimenter depuis belle lurette. Les Détraqueurs avaient tendance à venir tourner devant sa cellule. Si vous voulez, ce n’était qu’une question de temps, et puis finalement, elle a préféré prendre les choses en main, faut croire ! » L’indifférence avec laquelle le gardien de geôles énonçait les événements aurait pu avoir de quoi arracher une parcelle d’âme à n’importe quelle personne apte à en posséder une. Celle de Daemon, sans doute que la seule personne apte à avoir su la saisir n’avait fait que la happer, l’hypnotiser pour l’écraser au creux de sa paume. Deirdre était comme sa mère, un dommage collatéral, aimait-il se murmurer à lui-même dans le silence de ses propres songes. Elle était venue le trouver, quelques temps plus tôt, vociférant toute la haine qu’elle avait pour lui en plein dans sa figure : se débarrasser de Deirdre lui avait semblé être infiniment aisé et logique à cette époque. Cette idiote s’était engagée dans l’Ordre du Phénix, et quand bien même il aurait décidé de la couvrir, Daemon aurait alors tout perdu pour quelqu’un incapable de lui pardonner ce qu’il avait fait. Il n’avait guère recherché le pardon, de toute manière, mais sa vie s’était déjà peu à peu déchirée pour la mauvaise personne, ce n’était pas pour commettre à nouveau les mêmes erreurs qu’il était sorti des ténèbres. « Vous êtes de la famille ? Vous savez, les corps des traitres, généralement on les envoie du côté moldu, on les enterre dans des tombes anonymes et on les oublie. » Mais revenait sans cesse devant les yeux de Daemon le regard haineux de sa sœur, son visage parsemé de larmes, cette rage brûlante qu’il avait vu transpercer les yeux clairs de celle-ci. Jamais il n’oublierait Deirdre, qu’elle soit enterrée dans une fosse commune dans le Londres moldu, ou qu’elle soit enterrée avec leur mère, dans le village de naissance de chacun des enfants Egan. Elle s’était tranchée les veines, comme ça, sans crier gare, et personne ne saurait dire comment elle a pu commettre un tel acte, se fournir l’arme de son propre meurtre, trouver en elle assez de courage, assez de lâcheté pour oser disparaître dans une mare de sang. Sans doute avait-elle désiré, en agissant ainsi, à jamais imprimer son cadavre blanchâtre aux prunelles de son frère. Probablement qu’elle avait réussi, il la voyait désormais, plus amaigrie que jamais, le teint blanchâtre et les traits tirés par les mille cauchemars qu’elle avait dû connaître ici. La mort de leur mère avait, finalement, été bien plus douce que celle de Deirdre – celle de Deirdre serait cependant, bien plus douce que celle qu’il ferait subir à Sansa pour ses trahisons, aimait-il se répéter sans cesse dans son propre esprit tiraillé par l’horreur, comme si cela pouvait un tant soit peu calmer la part de culpabilité qui s’éveillait, brûlante et piquante, au fond de ses entrailles.


LONDON, 1998
and she was another lullaby
with candlelights eyes.
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« C’était quelqu’un de bien. Deirdre. » Elle était arrivée de nulle part presque, emmitouflée dans un manteau noir, des fleurs à la main. Tout ce qu’il y a de plus formel. Cependant, elle n’avait pas été là pour rien, les yeux rougis par des larmes d’un profond chagrin, une lueur ôtée du fond de ses yeux bleu océan : il ne la connaissait pas, mais elle avait connu Deirdre. Sans doute ne savait-il rien de sa sœur, de toute manière, si ce n’est les éléments dont il s’était allègrement servi pour la faire enfermer. Comme pour se débarrasser d’une épine dans le pied, il avait fait jeter son aînée dans les cellules d’Azkaban dans l’espoir qu’elle y passe assez de temps pour finir folle, ou totalement désorientée, au point d’oublier ce qu’elle avait découvert lors de la guerre. Avec Deirdre étaient tombés beaucoup de gens, qu’elle avait fini par dénoncer, avait-on dit. Daemon avait pris un soin précieux à ne jamais mettre les pieds dans tout ce qui concernait sa sœur après son arrestation : c’était mieux ainsi, surtout pour sa conscience. Pour aller de l’avant, pouvoir se contenter de détester Sansa pour ce qu’il était devenu plus que lui-même pour ce qu’il avait, finalement, toujours été. Que ce soit chez eux, à Poudlard, en temps de paix ou en temps de guerre, ils n’avaient jamais réussi à être des frère et sœurs. Tout comme il n’avait sûrement pas réussi à être le digne fils de sa mère, prêt à tout pour la défendre : entre ses entrailles, elle avait donné le jour au fils égoïste qui finirait par tout briser. C’était sans doute écrit dans une imprenable destinée, de laquelle il n’avait pu se défaire, que Sansa avait, d’une quelconque manière, précipité. C’était forcément plus facile de la blâmer, parce qu’elle était perfide et sans âme, qu’elle ne manquerait à personne. Lui non plus, si ce n’est à lui-même.