ev. - what if i never knew your name. (sage&joshua)

Envolés les mariages festifs où tout se déroule de façon bon enfant et où tous les convives semblent être amis le temps d’une journée, et cela au-delà du fait que celui-ci ou celui-là n’est qu’un illustre inconnu. Aujourd’hui, on ne passe plus au-dessus des différents et tout un chacun semble finalement être assez tendu. Les tentions amenées par la guerre ne se sont finalement jamais dissipées avec la victoire de l’un des deux camps et si le lieu regorge de mangemorts, il doit sans doute y avoir des personnes dont la façade n’est qu’un rôle, dans tous les coins. Les gens sont bien capables de se fabriquer un masque lorsque le besoin se fait ressentir, lorsqu’ils ont besoin de se cacher pour ne pas se faire décimer. Je me surprends ainsi à détailler le visage de tout le monde, scrutant la moindre attitude suspecte sans forcément réfléchir au fait que je joue moi-même un rôle en ce lieu. Comme toujours, je me cache à défaut de savoir faire autre chose. Cela a commencé avec Hester, au début de ma septième année au château, puis j’ai fait tombé le masque pour revenir vers elle et mieux lui briser le cœur par la suite en devant me cacher de nouveau derrière mon statut de brave petit fils de mangemort. Je lui ai fait subir des choses dont je ne suis pas fier et que je ne peux m’empêcher de regretter à présent. Mais le mal est fait et il est trop tard pour revenir en arrière, malheureusement. Tournant les talons comme pour mettre un terme à ces sombres pensées qui ne devraient pas être en mesure d’entacher un mariage, je m’approche alors de la longue table dressée de quelques mets et boissons destinés à faire patienter l’ensemble des invités, afin de me servir un verre de jus de citrouille, sans prêter attention au fait qu’une jeune femme semble être en train de s’approcher de moi.

Ennui, ennui, ennui. La brune était venue se placer à un endroit stratégique, dans un coin de la foule, parfois, elle adressait quelques paroles inintéressantes à quelques personnes qui ne la reconnaissaient pas - les pieds enfoncés dans le sol, c’était surtout son regard, virant d’un coin à l’autre, qui faisait tout le travail. Patiemment, Sage observait toutes les silhouettes qui l’entouraient, les attitudes de chacun pour deviner à quoi pouvaient penser tous ceux qui l’entouraient. Il était clair que la plupart des gens tentaient de masquer un indéniable ennui, voire un certain malaise à l’idée d’être invité à une telle cérémonie - les familles fiers de leur sang-pur, qui utilisaient des nés-moldus comme elfe de maison, pour sûr, ça ne devait pas plaire à tout le monde. Lèvres plissées, serrées l’une contre l’autre, la jeune Blackheart devait avouer que l’idée ne lui plaisait guère non plus - au fond, malgré tout ce qu’elle avait vécu pendant cette guerre, n’en restait pas moins que ses idéaux de liberté et d’égalité étaient toujours les mêmes. Surtout à l’égard de certaines personnes qu’elle avait connues, côtoyées dans les couloirs de Poudlard : dans les rangs des Serdaigle de son année, il y avait eu Blodwyn Brownstein, qui, à chaque pas, avait sur son sillage un Eamonn s’attardant à l’observer trop longuement - cette pauvre fille se retrouvait désormais enceinte jusqu’au cou, à servir des petits fours en courant presque. Pitoyable. Il n’y avait que lorsqu’elle commettait l’effort surhumain de cacher cet air véhément de son visage, s’approchant d’un petit groupe pour se mêler à une conversation, que Sage oubliait pendant une fraction de seconde tout ce qui lui filait la nausée, ici et maintenant : plus les instants s’écoulaient, plus lui venait l’idée qu’elle aurait dû se cantonner à ses bons souvenirs de Poudlard, pour se souvenir d’Eamonn. Dans son coin depuis de longues minutes déjà, Sage sentit quelques regards s’attarder sur elle, des attentions la brûler littéralement : la police magique n’était pas loin, et clairement, son attitude de retrait ne plaisait pas - à croire que tous les invités étaient inspectés dans le moindre de leurs faits et gestes. Qu’importe, remarquant que sa coupe était vide, Sage retourna en direction des buffets, observant dans un soupir que tous les plats étaient à nouveau parfaitement remplis, et que donc, la née-moldue continuait de courir de partout, quitte à accoucher au milieu du jardin. Ses yeux bruns tombèrent sur un jeune homme à quelques pas de là, et Sage ne se fit pas prier pour approcher, jaugeant celui-ci ; puis, par réflexe, elle tendit son verre, dans un sourire poli, presque niais. « Est-ce que... » Elle eut un léger rire, mimant à la perfection une certaine niaiserie. « Ce n’est rien, je me servirai après. » Quelle bonne comédienne, détournant bien vite les yeux, pour faire glisser une certaine gêne, qu’elle combla en avalant un petit four. « Je suis désolée, j’ai l’impression d’être épiée de tous les côtés, et de du coup faire n’importe quoi. » Sembla-t-elle reconnaître, haussant les épaules - c’était une approche plutôt biaisée, doucereusement mensongère, le jeune homme, si solitaire, si renfrogné pourtant, eut tôt fait d’être à lui seul, d’un certain intérêt curieux pour Sage.

La fatigue me submerge d’un seul coup, à moins qu’il ne s’agisse là que d’une vague d’ennui. L’un dans l’autre, les deux sont tout à fait plausibles. Il m’a fallu me lever tôt afin d’enfiler une tenue qualifiée comme décente par mon paternel alors que je ne suis rentré que tard de France, suite à sa demande expresse, afin de me présenter à sa place en ce lieu. Puis, ici, je ne connais personne, seul le visage de Thaddeus me rappelait quelque chose, mais à présent qu’il s’est éloigné pour prendre part à d’autres discussions, tout le monde me parait étranger. Peu importe, il doit sans doute me suffire de bouger un peu et de trouver une occupation, pour chasser cet ennui. Aussi est-ce dans ce but que je me dirige finalement vers la grande table rassemblant mets et boissons, afin de me servir un autre verre. La louche toujours serrée entre mes phalanges, je n’ai pas fini de me servir un verre de jus de citrouille que déjà, une jeune femme s’approche de moi, semblant attendre que je la serve, elle-aussi. Je la scrute un instant, me demandant si son air gêné provient du fait qu’elle m’ait pris, durant un instant, pour l’un de ces né-moldus qui semblent servir d’elfes de maison partout aussi. Puis, je conclus que cela n’a que trop peu d’importance, la galanterie exigeant de moi que je lui vienne en aide même si des personnes se trouvent déjà spécialement désignées pour ce faire. Tendant la main dans sa direction, je ne peux m’empêcher de l’inciter à me confier ce gobelet : « Laissez moi vous servir, cela ne me dérange pas. » Peut-être aurais-je mieux fait d’annoncer que cela me fait plaisir ou me rendrait heureux, mais je ne suis que trop peu habitué aux formules de politesse qu’il me faut fournir dans ce genre de situation. Trop habitué à rester au placard, il s’agit pour moi d’une grande première que d’assister à ce genre d’évènement. Comme l’a si gentiment souligné l’Appleby tout à l’heure, je ne suis ici que parce que mon père ne jugeait pas ce mariage suffisamment important pour s’y rendre lui-même – du moins ne l’a-t-il pas mentionné en ces termes, mais c’est sans aucun doute ce qu’il voulait dire. « Tenez, votre jus de citrouille. » je finis par lui glisser, après avoir rempli son verre et en tendant celui-ci dans sa direction. J’imagine que cela ne lui fera pas de mal de pouvoir boire un peu, le sucre présent dans la boisson devant sans aucun doute aider à tenir durant cet évènement fatiguant – pourquoi me paraît-il plus épuisant que le fait de patrouiller aux côtés des rafleurs, d’ailleurs ? Je reprends d’ailleurs également mon verre, rester posé sur la nappe en attendant, sans toutefois le porter jusqu’à mes lèvres. « Et ne vous en faites pas, je crois que nous sommes tous dans le même cas. Est-ce la police magique, là-bas ? » Je lui désigne d’un geste du menton, un groupement d’hommes non loin, à l’air peu détendu. Je tente de la rassurer de sa gêne apparente comme je le peux, bien que je n’aborde sans doute pas les bons sujets. Mais qu’importe, me voilà motivée à tenter de l’aider quelque peu, puis cela devrait sans aucun doute également m’aider à ne pas rester sans rien faire. « Drôle d’idée que d’inviter la police magique à son mariage, ce n’est pas en France qu’on verrait ça. » je laisse échapper, agrémentant mes paroles d’un sourire. Mais après tout, l’hexagone semble se situer à des années lumières de ce qui se passe ici, aussi n’est-ce certainement pas plus étonnant que cela.

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