Be running up that road.

« Attention ! » Le jeune garçon, âgé de neuf ans seulement, leva sa baguette et lança un sortilège maladroit sur le chat noir, installé confortablement dans le canapé en cuir, et qui, vraisemblablement, n’avait rien demandé. Le sort de lévitation atteignit l’animal en pleine poitrine, avant que ce dernier puisse détaler, et il décolla de quelques centimètres. Le petit Drystan observa la bête s’élever du confortable divan, avec une avidité durement contrôlé, et il ne put s’empêcher d’esquisser un petit sourire satisfait. La magie faisait parti intégrante de son existence, déjà rythmé par ses rires indomptables, sournois, son regard vif, réfléchi et son sens de l’aventure et du danger, qui le trahissait souvent, voir à chaque fois qu’il se risquait à enfreindre les règles, que ses parents avaient difficilement établis. A quoi servait le code, s’il ne pouvait être brisé ? Le jeune Drystan se le demandait bien, et ses géniteurs le haïssait pour cela, presque autant qu’ils se détestaient pour leur sang, un sang mêlé, un sang impur, qui coulait malheureusement dans les veines de leur seul fils, qui payerai sûrement pour ça un jour. A cause d’eux. Ils se répétaient que la vie redeviendrait un peu plus rose pour les gens de leur rang, quand leur enfant serait en âge de comprendre ce qu’il risquait, mais ces simples sorciers employés sur le Chemin de Traverse ne songeaient pas au fait que la vie pourrait devenir pire, bien plus pire que la misère à laquelle ils avaient été habitués. Ce n’était peut-être pas plus mal, que cette idée ne leur vienne pas à l’esprit, toutes ces années passées dans le brouillard, la crainte constante de ne plus voir revenir leur fils, le soir. Resté dans l’ignorance, ne pas savoir, fermer les yeux sur ce qu’il se passe en ce moment même, alors que leur petit garçon s’amuse, sur les familles meurtries, les cadavres, la souffrance et les larmes. Leur refrain favori. Temps que la guerre ne s’immisçait pas dans leur vie, tout allait bien, et ils ne se préoccupaient pas des deux camps qui s’affrontaient sans relâche. Vous pouviez offenser, massacrer, tuer qui vous voulez, tant que ce n’était pas un Hadley. Une politique qui les auraient fait plus tard pleurer, dans leur tombe, alors que leur petit Drystan s’avançait seul sur un chemin qu’ils n’avaient pas balisés à l’avance pour lui, ce chemin périlleux qu’est celui du combat.
« Doucement ! » Un sourire espiègle se dessinant lentement sur ses lèvres, le damoiseau releva un peu la tête pour croisé le regard lasse de son père, un homme entre deux âges, qui paraissait avoir tout vu, ce qui n’était sûrement pas faux, les nombreuses bêtises irrécupérables qu’il devait enduré depuis neuf ans ne semblait pas lui avoir réussi. Si le petit garçon avait écouté quelques fois les paroles qu’échangeaient le soir, les deux adultes, il se serait rendu compte du doute qui planait sur lui. Qu’allait-il devenir ? C’était la question sans réponse, celle qui les tracassait depuis sa naissance. Lui ne s’en souciait pas, bien trop occupé à vivre au jour le jour, ce qui, à son avis, aurait évité de nombreux problèmes aux autres. Qu’allait-il devenir ? Il n’en savait strictement rien, et ne voulait pas le savoir. Pourquoi faire ? A cet âge là, on ne pense pas encore à ces choses-ci, et pour tout dire, le fait de s’encombrer de pensé négatives n’enchantait pas trop le petit Drystan, qui savait déjà très bien que ces dernières lui boufferaient la vie, doucereusement, petit à petit, jusqu’à la moelle. Poudlard, les cours, les leçons, cela paraissait encore loin, aux yeux de ce petit enfant turbulent. Tout ce qui s’en suivait aussi, avec les obstacles, les choix trop durs à prendre, et les mangemorts, qui semblaient ne pas avoir existé quand il n’était qu’un bambin, mais qui se trouvait bien là, à la sortie de l’école. « Tu ne peux pas utiliser une baguette comme ça te chante. Pas maintenant ! » « Mais Pa… » Le maitre des lieux lui prit l’objet magique, qui, il ne le savait encore, allait mettre fin à l’existence de nombreuses personnes, dans un futur plus ou moins proche, et le regarda, d’un regard qui laissait à entendre que si le garçon recommençait, il récolterait une punition, mais il récidiva, plus d’une fois, et ne fut pas sanctionner. Non, le jugement tomberait plus tard, plus durement. « Très bien… D’accord. » Il ne savait pas ce qu’il disait.

« Tu as bien tout ce qu’il te faut, mon cœur ? » Le jeune garçon, dans sa robe de sorcier repassée, hocha la tête et embrassa furtivement sa mère, qui déjà parlait des prochaines vacances scolaires. De son côté, Drystan n’avait le cœur gros, mais pouvait voir la tristesse dans les yeux de ses parents. Il ne l’a comprenait pas. Il reviendrait, chaque année, à la même période, et les reverrait. Un cycle qui se répéterait pendant quelques années, jusqu’à ce qu’il soit assez âgé pour partir de la maison familiale, et voler de ses propres ailes. Il y songeait, et voulait gouter à cette liberté, qu’il touchait déjà du bout des doigts, en partant pour l’école de sorcellerie, Poudlard. Ce genre d’endroit où ses géniteurs ne pouvaient retourner, et où il s’engouffrait seul, chose nouvelle, pour lui. Peut-importe, il s’y plaisait déjà. « Ça va aller, mon chéri, tout va bien se passer. » Il lui sourit, et rit intérieurement. Elle s’inquiétait encore et toujours, il ne fut pas surprit quand elle l’étreint une énième fois, si fort qu’il étouffa presque. C’était bien son genre. Mais elle se rassurait elle-même, et il n’en demandait pas plus. Les adieux larmoyants, les effusions de sentiments, ça n’avait jamais été son truc, et sa mère se débrouillait très bien toute seule pour ces choses-là. Bien entendu, il avait peur, mais il trouvait cela normal. Un enfant qui n’aurait ressenti de l’angoisse à l’idée de quitté ses repères, sa famille, aurait été idiot, aux yeux du jeune garçon. Mais il ne le montrait pas, préférant garder cela pour lui, et les regarder tous la tête haute. Ne rien laisser paraitre, son dicton favori.
Il se retourna vers son père, qui regardait l’heure, et se demandait sûrement quand le train bruyant allait se décidé à mettre les voiles. Il ne put s’empêcher d’esquisser un maigre sourire. Lui aussi était pressé. Pressé de voir son fils partir, un peu, parce que malgré les risques qui planaient sur l’école, ces derniers temps, il attendait ce moment avec impatience. Il était temps que son enfant s’en aille, disons qu’il réussissait difficilement à le supporter, et que son départ l’avantagerait. Drystan se demanda si ce soir même, son père aurait des remords pour avoir pensé à cela. Il n’en savait rien, mais aurait bien voulu le comprendre, aussi bien qu’il avait réussi à déchiffrer les pensées de son paternel, qui ne s’en était rendu compte. Il avait toujours eu ce don, depuis la naissance, et ne s’en plaignait pour tout dire, pas du tout. C’était facile, c’était pratique, et il remerciait le ciel pour ce sens aiguisé. Il avait souvent entendu parler de cette pratique qui consistait à entrer dans l’esprit des autres, et de tout savoir sur eux, mais on lui avait fait remarquer que cela s’apprenait, que ce n’était en aucun cas un don qu’on recevait à la naissance, comme on pouvait devenir métamorphomage. En embrassant son père sur les deux joues, il se dit qu’il pourrait peut-être apprendre, plus tard, et au son d’un « Fais attention à toi. » tonitruant, monta dans le train, qui menaçait de partir sans lui. Il n’y avait aucune raison qu’il ne pense pas à ce qu’il pourrait faire plus tard. Il en avait le droit, comme quiconque, comme chaque élève se trouvant dans ce transport. Il pouvait avoir un avenir. Mais quel avenir ?

« Je peux m’asseoir ? » Le futur élève, qui regardait par la fenêtre le paysage défilé, releva la tête, et croisa le regard d’une jeune fille au teint rosée. Elle devait avoir son âge, et n’était sûrement pas très rassurée à l’idée de passé le voyage toute seule. « Bien sûr. » « Merci, c'est gentil. Les autres compartiments semblent tous pleins, et pour tout dire, je n'ai pas vraiment envie d'en chercher un autre. » Il lui sourit, amusé par cette fille qui semblait toujours pressée, et lui montra la place en face de lui. Après avoir fait ses derniers adieux à ses parents, et jeter un dernier regard à sa mère, qui le regardait, les yeux rougis, il était monté dans le train, et s’était trouvé un compartiment, vide. La solitude ne lui faisait peur, à ce stade là, rien n’aurait pu lui faire autant peur que l’endroit où on les emmenait tous, et il s’y était donc installé. Il ne refusa pourtant pas un peu de compagnie, comme on lui avait souvent répété, mieux valait être entouré, que totalement livré à soi-même, et puis, il devait se faire des amis. Après tout, Poudlard serait sa deuxième maison, pendant de nombreuses années, autant commencé tout de suite à crée des liens. Les deux jeunes gens parlèrent durant le voyage, qui parut moins long pour Drystan, grâce à cette fille. Il fut surprit de sa totale ignorance de l’école magique, et en arriva à la conclusion que ses parents n’avaient pas eu le temps de lui en parler, que la lettre était arrivée à lui trop vite, et que sûrement, ils lui en auraient touché deux mots un peu plus tard. Il se doutait que la maison dans laquelle il pourrait être admit le reflète complètement, il se disait même qu’aucune maisons ne pourrait un jour refléter toute sa complexité, et pour tout dire, il n’avait peut être pas tord. Ce fut même l’un des seuls points de son existence où il put se vanter d’avoir raison.
Elle s’appelait Plum, et venait d'une famille de sang pur. Le garçon ne put s’empêcher de se demander s’il s’habituerait un jour à ce prénom. Quelle idée d’appeler son enfant comme cela. Il ne se doutait pas que la situation dans laquelle elle allait le mettre, plus tard, serait bien plus étrange. Il s’en occuperait le moment venu, s’il pouvait. Peut-être qu’il n’en aurait pas la force, comme il n’eut pas la capacité à résister au chariot de marchandise que lui présentait une vieille dame, entre les compartiments. Il ne le savait pas. Comment prévoir quelque chose à l’avance, sans s’appeler seigneur des ténèbres. Drystan se le demandait bien, presque autant qu’il songeait au retour de ce dernier. Ce n’était pas un secret, beaucoup de personnes pensaient qu’il allait revenir, même lui, dont les pensées étaient corrompues par les dires de ses parents, et leurs maigres efforts de mettre un voile sur cette partie noire du monde sorcier, qui promettait un retour dévastateur. Oui, il allait revenir, quoi qu’on en dise. Mais quand ? Et que ferait-il, lui, petit élève de Poudlard, mangeant des sucreries ? Il ne préférait même pas le savoir.