Happiness can be found in the darkest of times.

if one only remembers to turn on the light.
Evander s’était souvent demandé comment il avait fait pour en arriver là. Et cette fois-ci ne faisait pas exception, tandis qu’il jetait un regard circulaire sur le décor poussiéreux et pesant du quartier général de l’ordre. Comment avait-il fait pour passer de simple vendeur d’animaux magiques à membre à plein temps de l’ordre? Ou plus précisément, il se demandait surtout comment le monde magique avait fait pour tomber dans une telle folie, l’obligeant par la même occasion à soit fuir, soit rester et se battre. Prendre les armes. N’ayant jamais été du genre à fuir les problèmes, il avait opté pour la solution la plus logique: celle de défendre ses droits les plus basiques en tant que sorcier. Car, oui, s’il était né moldu, Evander ne se définissait plus à présent que comme un sorcier de plein droit. Il estimait, après les années d’études qu’il avait menées et son travail sur le Chemin de Traverse par la suite que cette dénomination était plus que méritée. S’entendre dire que certaines personnes pouvaient, ne serait-ce que penser, qu’il avait volé sa baguette magique à un vrai sorcier avait tout pour le mettre dans une rage folle. Bien canalisée, cette rage avait tout de même ses bons côtés puisque jusqu’à présent il avait toujours réussi chacune de ses missions. Tant et si bien qu’on venait de lui annoncer qu’il était envoyé en campagne afin d’assurer la délocalisation d’un camps de réfugiés, l’endroit actuel étant devenu trop difficile à cacher. Et bien que le jeune homme qu’il était su à la minute où on lui avait proposé cette mission qu’il allait l’accepter et tout faire pour la mener à son terme elle aussi, il comprenait également qu’une tâche aussi périlleuse nécessitait certains sacrifices. Voilà pourquoi, le matin même, il avait rendu visite à ses parents pour finalement s’effacer de leur mémoire au moment de partir. Et s’il n’avait plus jamais été proche de sa famille après son entrée à Poudlard, Evander n’en eut pas moins un pincement au coeur tandis qu’il piétinait des années de souvenirs. Rares, certes, mais pas moins précieux pour la cause. Or, malheureusement pour lui, s’il n’aspirait qu’à un bon verre et à tomber dans l’oubli de la nuit ensuite, un autre dilemme l’attendait… Sage. Cette brune au regard incendiaire et aux paroles toujours bien trempées quand il s’agissait de protéger ce qu’elle considérait comme juste. Cette fille énervante dans les couloirs de poudlard, cette femme battante qu’il avait fini par connaitre, apprécier- voire même beaucoup plus, au cours de leurs nombreuses missions ensemble. La fille qu’il venait d’embrasser il n’y avait pas si longtemps de cela… Si petit à petit Sage avait fini par prendre une place de taille dans sa vie, s’imposant lentement mais surement à son esprit, Evander avait toujours gardé la tête froide et les idées claires quant à ce qu’il pouvait advenir de leur début de complicité. Dans le contexte politique actuel, il n’était en effet pas réellement prudent de se laisser aller à commencer à avoir des sentiments pour une autre personne- surtout lorsque vous faisiez partie de l’ordre du phénix. Ces personnes auquel vous vous attachiez avaient, de fait, souvent la sale habitude de finir mortes dans une ruelle sombre. Or, au vu de la tâche qui l’attendait, Evander avait peur de se faire prendre et que d’une manière ou d’une autre cela ne finisse par atteindre Sage. Il avait beau tourner le problème dans tous les sens possibles, il en revenait toujours à la même solution… Il fallait qu’il l’oublie, à l’instar de ses parents qui l’avaient oublié lui. Oui, c’était la meilleure solution pour protéger celle qui avait désormais la place la plus importante dans sa vie sans même s’en rendre compte. Ou du moins tentait-il de s’en convaincre, tandis qu’une insidieuse petite voix lui soufflait tout autre chose, le doute d’un désir égoïste plus que celui d’un acte totalement désintéressé. Mais il avait pris sa décision et s’y tiendrait, malgré cette voix. Attrapant sa veste, il se mit donc en chemin pour retrouver la jeune-femme. Bientôt elle ne serait plus qu’un vague visage aperçu dans les couloirs de poudlard et perdu dans les méandres de sa mémoire défaillante- mais pas encore tout de suite. D’abord, il lui fallait l’affronter et lui faire au moins l’honneur de lui annoncer sa décision en face, voire peut-être avoir le culot de lui demander de l’aide. Pour toutes les bonnes raisons, ou serait-ce pour toutes les mauvaises?



Dangereusement perché sur le toit de son immeuble, Evander observait d’un oeil morne le Londres endormi, pensant à tous ces innocents profitant tranquillement du sommeil du juste, bien loin de s’imaginer la catastrophe se jouant chaque jour un peu plus sous leur nez. Une bouteille de wisky plus qu’entamée à la main, il ne semblait pourtant pas vouloir ralentir sur la boisson- seul anesthésiant lui restant dans ce monde de fou. De son point de vue, le liquide ambré représentait en quelque sorte un refuge, tenant loin tout ce qui pouvait l’atteindre d’une quelconque façon; repoussant la solitude d’Azkaban, la douleur de ses blessures, ou encore le regard chocolat d’une certaine brune à sa connaissance. Fatigué avant même d’avoir passé le cap des trente ans, Evander avait souvent l’impression de s’être perdu en cours de route. Et ce ne devait certainement pas être qu’une impression. Le jeune homme était, en effet, à des années lumières de ce qu’il avait pu être avant la guerre, voire même au début de celle-ci. Tant de ses certitudes avaient fini par s’effondrer ces derniers temps, alors qu’il portait encore en lui les séquelles des mois passés à Azkaban. Lui qui avait toujours été persuadé d’être du bon côté, il n’en était plus si sûr à présent. La violence n’engendrait que la violence et il s’en rendait finalement compte. Même au sein de la rébellion, la fin semblait à présent justifier les moyens. Or, bien qu’il n’avait jamais prétendu au rôle de héros, Evander était tout à fait certain de ne pas vouloir être associé à ce genre de pratiques. Mais que faire quand le monde sombrait peu à peu dans la folie et qu’il n’y avait pas vraiment de solution? Bien que l’idée de faire cavalier seul le tentait de plus en plus, ce n’était pas une solution durable; il en était parfaitement conscient. Il ne se sentait pas non plus l’envie d’avancer sans avoir enfin pu parler avec Sage. Lui demander pourquoi elle ne lui avait pas rendu sa mémoire, rechercher l’étincelle de sa présence. Malheureusement, il n’était pas bien sûr d’où la trouver après leur dernière rencontre où il avait fini par se sacrifier pour elle. Sacrifice qu’il avait fait sans une once d’hésitation, alors qu’à l’époque il ne se souvenait pas de tout ce qu’elle avait pu représenter à ses yeux- de tout ce qui les liait l’un à l’autre. Et comme à chaque fois qu’il pensait à leur éternel chassé-croisé, à tout ce qui avait également pu les séparer, Evander sentit une vague de colère monter en lui- dirigée contre lui-même, contre elle… Mais surtout contre la situation qui, si elle les avait rapprochés, l’avait fait pour mieux les séparer par la suite. Peu désireux de continuer sur ce chemin dangereux, Evander se leva péniblement tout en avalant une dernière lampée du poison liquide qui lui servait de compagnon. Ce n’était pas prudent, mais sans ça, il ne pouvait plus dormir. Même avec, il ne dormait de toute façon plus que d’un oeil, d’un sommeil agité. Il était déjà d’ailleurs presque trop tard pour aller se coucher puisqu’il pouvait maintenant apercevoir les premières lueurs de l’aube apparaître. Aube annonçant un autre jour gris, morne et vide de sens, un peu comme lui au fond.