Juste un verre. Voilà l'idée que j'avais en tête lorsque j'ai foutu les pieds dans ce bistrot. Juste un verre, et je prendrais le large. Les événements auraient dû se dérouler de cette façon. Il ne me serait jamais venu à l'idée que je puisse avoir des emmerdes, surtout que je ne faisais rien de mal à personne, je ne faisais que picoler. Et ce qui devait être un verre donna suite à un deuxième, puis un troisième. Je rôdais parfois autour de la table de billard. Si au début j'arrivais à mettre des boules dans les trous, mon taux d'alcoolémie m'empêcha bientôt de viser correctement. Je tapais plus à côté que dedans, ce qui provoquait l'hilarité des autres joueurs. Loin de me démonter, je continuais à jouer, même si c'était de plus en plus laborieux. Cette fois j'arrête lançai-je d'une voix tonitruante, et pourtant, je recommençais. Il m'avait suffit de glisser le doigt dans l'engrenage pour que le bras y passe tout entier. Je ressentais désormais les sensations familières que me procurait l'ivresse. Ma vue devenait floue, mon pouls s'accélérait, la chaleur envahissait mon corps si bien que même si nous étions en Février et que les températures n'étaient pas bien extraordinaires, j'avais jugé judicieux de me défaire de mon pull-over parce que putain, on crève de chaud là dessous. Mes joues cuisaient, au point qu'on auraient pu faire cuire des œufs au plat dessus. D'un pas légèrement chancelant, je m'étais traîné jusqu'au bar et je m'étais laissé tomber lourdement sur le tabouret. Je sortis un billet de cinq livres sterling de la poche arrière de mon jean et les tendis au barman. Il me servit une nouvelle boisson et me rendit la monnaie. Je trempai mes lèvres dans le breuvage alcoolisé. Soudain, une forte clameur retentit plus loin, à quelques pas de l'endroit où je me trouvais. Mon regard fut happé par la télévision qu'il y avait dans un coin de la pièce. Il Je jetai un coup d'oeil aux supporters agglutinés dans le coin de la pièce. Ils portaient des écharpes et des accessoires. D'après les couleurs, il était fort possible que Manchester United jouait en ce moment même. Je détournai alors la tête, pinçant les lèvres d'un air dédaigneux. Avant, j'aimais le foot, j'y avais joué quand j'étais à la petite école, avant d'entrer à Poudlard. A partir du moment où j'ai intégré l'école de sorcellerie, je me suis complètement désintéressé des jeux moldus, voire même des moldus eux-mêmes. Certes, j'étais issu de deux d'entre eux, mais aucun ne m'avait jamais considéré comme étant l'un des leurs. J'étais bien trop bizarre pour cela, j'étais même une bête de foire, un spécimen qu'il fallait enfermer dans une cage et exposer au zoo ou dans un cirque. Ils n'avaient jamais été foutus de m'accepter tel que j'étais, ils m'avaient même rejeté avec violence alors que quelque part, j'avais le même sang qu'eux, j'avais simplement quelque chose en plus. Et c'était à cause de ce sang qu'aujourd'hui j'étais exclu du monde qui était le mien. Je n'étais pas tout à fait un sorcier et je n'étais pas davantage un moldu, j'avais le cul entre deux chaises, le pied dans deux mondes radicalement différents. Je me sentais écartelé entre ces deux identités et je sentais la haine, la colère me consumer de l'intérieur. C'était de leur faute si j'étais vu comme un paria, comme un indésirable. C'était de leur faute si j'étais condamné à errer sans jamais trouver ma place nulle part. Ils m'ont certes donné la vie mais ils me l'ont gâchée à cause de ce qu'ils étaient. des moldus. Des ignorants qui ne voyaient pas plus loin que leur bout de leur nez, qui rejetaient la différence. Longtemps j'avais souffert de ce rejet mais maintenant c'était fini. La souffrance s'était transformée en colère et la colère était devenue haine. J'avais la niaque, je voulais m'intégrer dans ce monde qui était réellement mien. Certes, mon sang était un handicap, mais ils ne pouvaient pas me refuser parce que j'étais un fervent serviteur de la Cause, sans toutefois être dans l'élite.
Mais pour le moment, j'étais trop occupé à boire. Tout cet alcool m'avait retourné le cerveau. Pourtant, j'avais des pensées. Voilà trop longtemps que je cohabitais avec toute cette colère, toute cette hargne. Je me sentais pousser des ailes, je me sentais presque invincible. Je savais qu'à la première incartade je démarrerais au quart de tour, vindicatif, déterminé à ne pas me laisser faire. À n'en pas douter, l'alcool me rendait plus fougueux. Toujours accoudé au bar, j'alignais les shooters de vodka, prêt à mettre une raclée à mon voisin qui avait osé me défier à ce jeu là. Triomphant, je venais de retourner le premier verre pour bien montrer qu'il n'y avait plus une goutte. Tout se passa alors très vite. La scène qui se déroulait sous mes yeux me sembla très floue, à dire vrai, je n'étais même pas certain de comprendre ce qui se passait. Je fus bientôt encerclé par des sales types venus jouer les trouble-fête. J'étais en état d'arrestation, disaient-ils. What the fuck ? « [color:cd6a=#rosybrown]Je n'ai rien fait » protestai-je d'une voix tonitruante tandis qu'ils commençaient à m'emmener sous le regard curieux des autres clients du bar. « Je suis juste... » bourré. Cela étant, j'imaginais bien que ce n'était pas une excuse recevable à leurs yeux. Bien évidemment qu'ils avaient vu que j'étais ivre, ces fourbes en avaient profité pour me cueillir sachant que j'étais nettement moins vif et alerte que d'habitude. « Vous n'avez pas le droit d'être ici. » Je m'insurgeai. « Je vous promets que je n'ai rien fait de mal ! » J'étais dans la merde. J'allais me faire emmener je ne savais où alors que pour une fois, je n'avais rien fait d'imprudent. Je m'étais juste posé pour prendre un verre. Bon, d'accord, c'était bien plus qu'un verre, mais je n'avais pas fait de grabuge, ou quoi que ce soit qui puisse justifier que je sois mis dehors de cette façon. Je désignai alors le barman d'un index furieux et outré. « C'est vous qui les avez appelés ? » Le type s'empressa alors de démentir. Menteur. Il avait fait ça en douce, pendant que j'avais le dos tourné. En colère, j'allais me ruer sur le barman pour régler mes comptes, mais je fus tiré en arrière par ces types. « Vous feriez mieux de nous suivre sans faire d'histoires ». Tu parles d'un conseil. Ces abrutis ne méritaient même pas de servir le nouveau régime, tant ils étaient bêtes à manger du foin. Parce qu'il fallait sacrément être con pour faire enfermer quelqu'un qui n'avait strictement rien fait et pire, sans aucune preuve. « Puisque je vous dis que j'étais en train de boire un verre ! Ce n'est pas de ma faute si ce cloporte m'a dénoncé ! Je n'ai fait rien de mal ! » Déjà, on me poussait vers la sortie, me faisant bien comprendre que je n'avais plus rien à faire ici. « Vous en parlerez avec les personnes concernées » Je réagis au quart de tour. J'envoyai mon poing dans la figure du premier rafleur qui fut à ma portée. Mes phalanges craquèrent sous le choc tandis que le nez de l'autre explosait, libérant un flot de sang. Ma cible poussa un juron et se détourna en se tenant le bas du visage. Un murmure s'éleva parmi les consommateurs qui s'étaient agglutinés tout autour de la scène dans un silence de plomb. Je fus bientôt plaqué au sol par plusieurs types. Je tentai de me débattre mais rien n'y fit, Au moindre faux mouvement je te brise le cou. » menaça-t-il, tandis qu'il avait agrippé plusieurs mèches de mes cheveux. Sonné, je ne réagis pas outre mesure. Je sentis des cordes venir lier mes poignets entre eux. de la magie. Bien évidemment. Ces tordus étaient suffisamment proches de moi pour que personne ne puisse s'apercevoir de quoi que ce soit. Sans doute allaient-ils lancer un sort d'oubliettes à tout le monde lorsqu'ils m'auront emmené mais pour le moment, ils ne semblaient pas vraiment préoccupés par le nettoyage. « Et ça, c'est pour Hopkins. » siffla le lascar qui me séquestrait, m'envoyant un coup de poing à son tour. Il heurta ma pommette de plein fouet. Je sentis quelque chose craquer alors que je voyais trente six chandelles. Alors, je lâchai prise. Je tombai face contre terre, à moitié assommé.