La vie de fugitif n’était pas facile tous les jours. Cacher son identité, dormir avec la peur au ventre en espérant de ne pas se faire prendre par des rafleurs le lendemain, écouter la radio pirate en priant pour ne pas entendre le nom d’un ami ou d’un membre de sa famille,… Les conditions étaient vraiment difficiles à vivre, mais le fait d’être dans un camp de réfugiés avec ses semblables permettait de tenir le coup. La solidarité, l’entre-aide, le soutien et le réconfort étaient au rendez-vous et permettaient de ne pas devenir totalement fou pour ceux qui ne l’étaient pas déjà. La forêt de Craik paraissait être un lieu sûr puisque pour l’instant, seuls les animaux sauvages et les quelques moldus curieux pointaient le bout de leurs nez. Pour autant, cela ne voulait pas dire qu’il fallait manquer de prudence, le danger était à l’affût et le moindre faux pas pouvait les conduire dans les situations les plus désastreuses.

La construction du camp de nés-moldus de Craik était sûrement une des choses dont Béatrice était la plus fière. Son altruisme naturel l’avait poussé à rendre service à des gens se trouvant dans la même situation qu’elle et accompagnée de sa sœur, la belle se sentait un minimum active et utile à l’Ordre. Soigner avait toujours été le domaine dans lequel la rousse se sentait vraiment à sa place, alors le simple fait de pouvoir continuer son activité lui permettait de ne pas se laisser submerger par la triste réalité de la situation actuelle. Voldemort prenait de plus en plus de pouvoir, le rang des mangemorts s’étendait de minutes en minute et la méfiance était à son apogée. Si Béa pouvait percevoir les choses comme les autres personnes qu’elle rencontrait au camp, elle serait sûrement comme eux, à savoir distant, en retrait, apeuré à l’idée de se retrouver face à une personne qui les trahirait ensuite en le dénonçant auprès des rafleurs, des mangemorts, voire de Lord Voldemort lui-même. Toutefois, Béatrice était loin d’être comme les autres, ce n’est plus à prouver. Au lieu de ressentir toutes ces sensations à la fois, la rousse ne s’intéressait qu’à sa qualité de médicomage et donc au bien-être de ses patients et des réfugiés qu’elle essayait de faire apparaitre en étant la plus optimiste possible. Sourire dans les moments sombres sans pour autant nier le danger, tel était maintenant le nouveau quotidien de la belle.


Les doux rayons de soleil venant traverser l’immensité de la forêt écossaise indiquèrent qu’une nouvelle journée prenait vie. Ce qui était bien avec le camp, c’était que la routine ne pouvait vraiment s’installer : l’inattendu régnait en maître. Béatrice s’était levée aux aurores – comme toujours – et attendait patiemment que sa sœur daigne lui donner signe de vie. Béa avait cruellement besoin de nouveaux ingrédients pour pouvoir continuer à concocter ses potions, et l’unique endroit où elle pouvait les trouver n’était d’autre qu’à Ste. Mangouste, l’hôpital réservé aux sorciers faisant office de son ancien lieu de travail qu’elle n’avait dû quitter que par contrainte. La rousse serait parfaitement capable de se rendre là-bas toute seule, mais allez savoir pourquoi, Ginnie avait juste trop peur que sa sœur ne fasse une gaffe. Après tout, sa cadette n’avait pas forcément tort, Béatrice était du genre à ne pas passer inaperçue – même avec les effets du polynectar – et à marquer les mémoires.

- GINNIIIIIIE, s’écria-t-elle une fois que le visage plus que familier de sa sœur surgit d’entre les arbres.

Heureusement que le camp était protégé par des sortilèges d’isolation sonore sinon l’ensemble de la communauté magique aurait déjà découvert leur position. Béatrice enlaça sa sœur comme si elle venait de la retrouver après un long moment de séparation avant de la relâcher quelques secondes plus tard. Sans Eugénie, la vie de la rousse était beaucoup moins palpitante et totalement dénuée d’intérêt. C’était sûrement l’unique personne comptant dans sa vie qui ne lui avait jamais infligé de souffrances et de déceptions.

- Le polynectar est prêt, il ne manque plus que nos victimes, annonça-t-elle fièrement avec un sourire au coin des lèvres.

Par victime, elle entendait évidemment les deux personnes en quelles elles allaient prendre l’apparence. Il serait totalement inconscient d’y aller sous leurs véritables apparences étant donné la vive politique anti nés-moldus qui avait envahi toute la communauté magique depuis le retour de Voldemort. Elles devaient être prudentes, et Béa comptait bien sur sa cadette pour l’aider à passer inaperçue. Sans attendre plus longtemps, les deux sœurs transplanèrent pour se retrouver dans un petit coin totalement désert non loin de l’entrée principale de l’hôpital. Leur plan était planifié depuis un moment déjà et se révélait d’être d’une simplicité enfantine. Connaissant bien les médicomages qui travaillaient dans l’hôpital, Béa ne prendrait pas beaucoup de temps à identifier celles qui leur fallait pour rentrer. Après, il leur suffisait juste d’être assez efficaces pour prendre rapidement ce dont Béa avait besoin.

- Maintenant, après on risque de tomber sur d'autres demoiselles immondes portant la barbe façon Merlin., murmura la rousse une fois que deux sorcières habillées de robes vertes pomme – signature des médicomages – se présentèrent devant la vitrine moldue qui faisait guise d’entrée.

D’une discrétion remarquable, les sœurs se rapprochèrent des deux médicomages en question avant de les ramener à l’abri des regards indiscrets grâce à l’effet d’un sortilège qui les avait totalement désorientées. Au vu de la puissance de la magie des deux sœurs, les deux médicomages n’allaient pas bouger de là pendant un moment, le maléfice du saucisson était tellement simple mais tellement efficace… D’une souplesse remarquable, Béa arracha quelques cheveux des deux sorcières avant de les plonger dans la base de polynectar qu’elle avait concocté.

- Prête ?, demanda Béatrice à sa sœur.

En guise de réponse, sa cadette hocha furtivement la tête avant d’avaler la potion d’une seule traite. Sans se poser de question, Béatrice fit exactement la même chose. Maintenant qu’elles ressemblaient trait pour trait à deux parfaites médicomages de Ste. Mangouste, elles étaient fin prêtes à franchir les murs de l’hôpital.

- Bonjour, serait-il possible de rentrer ?, demanda la rouquine au mannequin de le la vitrine Purge & Pionce Ltd.

L’instant d’après, le mannequin en question donna son approbation. Bien, première objectif atteint, il ne manquait plus que la seconde phase de leur plan. Il fallait juste espérer que tout se passe comme convenu.