ÉCOLE PRIMAIRE, ANNÉE 1985.
« Non maman, j'veux pas y aller ! J'connais personne ! » Ma mère, l'air agacé, m'agrippe un peu plus par le bras, m'entrainant dans son sillage avec difficulté, tandis que je ne fais rien pour lui faciliter la vie. Bien au contraire, je ne veux pas y aller de toute façon, alors je ne vois pas pourquoi j'y mettrais du mien. A dire vrai, je n'ai jamais aimé les déménagements, pourtant, nous n'arrêtons pas de bouger sans cesse et j'y suis habitué depuis ma naissance. Mais la période entre chaque déménagement est de plus en plus longue, la séparation avec mes amis l'est donc toujours un peu plus également. Je n'ai pas envie d'entrer dans une nouvelle école, ne veux pas faire un effort pour m'intégrer une nouvelle fois. « Laisse moi prendre des cours à la maison, j'veux être tout seul ! » Ma mère pousse un soupir tandis qu'elle me pousse finalement dans une salle de classe. Toutes les têtes se tournent alors vers moi. Quoi de plus normal cela dit ? Je suis le nouveau que personne ne connaît, le nouveau qui ne connaît personne. « Ne fais pas d'histoire Ruthel ! Regarde, tu vas t'asseoir à côté de la gentille demoiselle. » soupire-t-elle sans prêter attention aux nombreux regards qui pèsent sur nous, avant de m'obliger à m'asseoir sur une chaise à côté d'une jeune fille de mon âge. Celle ci relève à peine la tête pour m'accorder un regard, visiblement moins amusée par mon sort que les autres enfants. « Je reviens te chercher ce soir ! » me lance-t-elle alors avant de quitter la salle de cours. « Super. » je soupire alors avant de me tourner vers ma nouvelle voisine de table. Il est déjà temps de penser à s'intégrer. « Salut, moi c'est Ruthel. Et toi ? » Je lui adresse un large sourire tandis qu'elle redresse la tête. Sourire qu'elle me renvoit, sans doute plus légèrement. « Maysilee. » Je hoche doucement la tête, essayant de graver son nom dans mon esprit. « Enchanté. » je lui souffle alors en retour.

ÉCOLE PRIMAIRE, ANNÉE 1987.
Faire des duos de travail, quoi de plus simple ? Instinctivement, je me tourne sur ma chaise, adressant un regard à mon amie derrière moi. Nos yeux se trouvent instinctivement, elle aussi me cherchait du regard. « Maysilee ? » je lui souffle de manière assez peu discrète. Elle approuve tout de suite d'un hochement de tête et, soulagé, je laisse un sourire soulagé apparaître sur mon visage tandis que je me tourne une nouvelle fois en direction du tableau. Ainsi, l'institutrice de notre classe de primaire inscrit les groupes sur une feuille de papier, ne sourcille même pas tandis que mon amie et moi lui annonçons que nous souhaitons être ensemble. Elle doit avoir l'habitude à force, puisque depuis mon arrivée dans l'école, elle est rapidement devenue ma meilleure amie. La première personne dans la classe à qui j'ai parlé aussi. Elle est rapidement devenue mon point d'accroche, celle de qui je ne savais simplement pas me passer. J'ai vite commencé à ressentir un manque les jours où elle était absente et insistait toujours pour lui apporter ses devoirs moi-même. Faire les travaux de groupe tous les deux, était d'ailleurs rapidement devenu une évidence, sans compter que nous avons tout de suite remarqué notre complémentarité dans le travail. Je dois dire que je redoute le jour où l'on ne pourra plus choisir nos binômes tous seuls. « Alors ? Qui fait quoi ? » me demande-t-elle tandis que je viens m'asseoir à côté d'elle pour travailler. « Comme d'habitude ? » Cette fois, c'est à mon tour d'acquiescer. En effet, la répartition du travail n'est pas bien dure pour nous deux.

MAISON DES HOPKINS, ANNÉE 1989.
« Ruthel ? Il y a un courrier pour toi devant la porte. » me dit ma mère depuis la porte d’entrée. Je m’empresse de la rejoindre, ne m’inquiétant pas du fait de la voir la tête baissée vers le sol. Me plaçant à côté d’elle, je me penche pour me saisir de l’enveloppe sur laquelle est inscrit mon nez, d’une belle calligraphie à l’encre vert émeraude. Je sors doucement la missive de son enveloppe pour me mettre à la lire, ma mère lisant par-dessus mon épaule. Lorsque nous avons fini de lire, nous échangeons tous deux un regard. « Il va encore falloir que je change d’école alors ? Et c’est quoi ça, le monde magique ? La sorcellerie ? » Ma mère se contente de hausser les épaules, le regard perdu au loin dans le vide. Je ne sais pas qui de nous deux a le plus de mal à assimiler les informations contenues dans l’enveloppe. « Nous n’avions pas prévu de déménager avant un bon bout de temps et tu n’avais donc pas à changer d’école… » commence-t-elle à réfléchir à voix haute. Mais je l’interromps bien vite : « Je veux y aller. » Un sourire apparaît alors sur le visage de ma mère, s’élargissant un peu plus à chaque instant. Ce doit bien être la première fois que je consens à changer d’école. Mais cette fois, c’est différent. La missive me vente le fait que je pourrais y rester sept ans. Être assuré de pouvoir rester sept ans dans la même école, est un luxe que je ne trouverais plus. Déjà là, les quelques années passées dans mon école primaire londonienne, sont quelque chose d’hors du commun pour moi. « Il faudra qu’on en parle avec ton père, mais il ne devrait pas y avoir de problème. » Elle marque une pause, pinçant les lèvres pour réfléchir. « Et pour Maysilee ? » Le fait que nous sommes devenus inséparables n’est un secret pour personne et ma mère ne fait pas exception à la règle. Tout le monde le sait par ici. Enfin non, toute la ville de Londres ne le sait pas, mais le voisinage le sait bien. « On verra bien. » Je hausse les épaules. « Je n’aime pas les adieux. »

MAISON DES BUCKETT, ANNÉE 1989.
« Ruthel ? Tu te dépêches oui ? » hurle ma mère au pied de l’escalier. « May, viens dire au revoir. » reprend la mère de Maysilee de son côté. Aussi, mon amie et moi descendons tous deux les escaliers jusqu’au rez-de-chaussée, avant qu’elle ne me lance : « On se voit à la rentrée ? » Je peux aisément sentir le regard de ma mère posé sur moi. Je ne cherche pas à rencontrer ses yeux cependant, préférant simplement hocher la tête en signe d’acquiescement.

POUDLARD EXPRESS, ANNÉE 1989.
Trainant ma malle derrière moi, je fouille le train à la recherche d’un compartiment vide. Je ne tarde pas à en trouver un, à l’autre bout du train, où je m’installe. Alors que j’ai posé ma valise dans les filets à bagages et que je ne suis pas assis depuis plus de deux minutes, je vois de nouveau la porte du compartiment s’ouvrir. J’écarquille les yeux tandis que mon cœur loupe un battement. « Ruthel ? Qu’est-ce que tu fais là ? » s’élève la voix de Maysilee. Je ne peux m’empêcher de me dire que fort heureusement, je n’ai pas culpabilisé de ne pas lui dire que je ne revenais pas à notre école en ce début d’année, puisque je vois que visiblement, elle n’en avait pas eu l’intention non plus. « C’est drôle, j’allais te poser exactement la même question. » je lui réponds de manière un peu distante, je dois l’avouer. Je crois que je suis encore sous le choc de la voir ici. Moi qui croyais avoir à reprendre un nouveau départ, sans aucune connaissance, je m’étais visiblement trompé. « J’ai reçu une lettre. » explique-t-elle calmement avant de venir s’avancer un peu plus face à moi, l’air un peu gêné. « Moi aussi. » je lui réponds. Puis, je me lève pour mettre sa propre malle dans le porte bagage, tandis qu’elle prend place face à moi. Après avoir vérifié que j’ai bien accroché ses bagages, je me rassois moi-même sur la banquette face à elle. « C’est cool, au moins, on sera tout les deux. » finit-elle par murmurer, juste avant que le train ne se mette en route. Je hoche doucement la tête pour acquiescer. Elle n’a pas tord, au moins nous serons tous les deux. C’est la première fois que je vais démarrer une nouvelle étape scolaire avec quelqu’un que je connais déjà, je n’ai pas l’habitude.

GRANDE SALLE DE POUDLARD, ANNÉE 1989.
« Tu n’es pas le bienvenue dans cette maison, sang-de-bourbe. » me lance une voix bourrue tandis que je viens m’installer à la table de la maison dans laquelle le chapeau m’a envoyé, quelques secondes auparavant. Serpentard. Pas besoin d’être Einstein pour comprendre que le qualificatif que le garçon m’a envoyé à la figure, n’est pas une gentillesse. « Je ne suis pas celui que tu crois. » je réponds simplement au garçon avant de détourner le regard pour continuer d’observer la répartition. Je ne suis pas encore prêt à me jeter dans une bataille alors que je ne sais pas encore pour quoi je dois me battre.

COUR INTÉRIEURE DE POUDLARD, ANNÉE 1989.
M’adapter, me fondre dans la masse, ne pas trop attirer l’attention ; c’est presque une seconde nature chez moi. J’y suis vraiment habitué depuis que je suis tout petit, ce qui m’a pas mal faciliter la vie et ce, de nombreuses fois. J’avoue que cela ne me déplait pas. Mais cette fois, c’est la première fois que je dois me séparer de quelqu’un pour avoir à m’adapter. Chose qui ne m’était jamais arrivé, car auparavant, cela semblait comme une option imposée d’avance. Ce n’était même plus une option d’ailleurs, à vrai dire. Et aujourd’hui, je comprends que si c’était le cas, c’était avant tout pour me faciliter la vie. « C’est quoi ton problème ? » me crache au visage mon amie. Mon problème ? Mon statut de sang et les autres serpentards qui semblent y prêter une bien trop grande attention à mon goût. Je risque de ne pas supporter cela longtemps, et encore moins pendant les sept années que j’aurais à passer dans l’école de sorcellerie. Du reste, la jeune fille fait aussi partie du problème, puisque tant qu’elle reste accrochée à moi, je ne peux pas laisser mon passé derrière moi. La laisser derrière moi. « Fiche moi la paix Maysilee ! » Je la regarde basculer la tête en arrière pour lever les yeux au ciel. Elle est visiblement dépassée par la situation. Je le suis aussi d’ailleurs, mais j’essaye de ne pas le montrer. L’une des premières choses que j’ai apprise, c’est que lorsque l’on cherche à se fondre dans la masse, il faut avoir constamment l’air sûr de soi, même si on ne l’est pas du tout. « Je ne sais pas quelle mouche t’a piqué, mais il faut te faire soigner mon pauvre. » Je serre la mâchoire, après tout, je ne l’ai pas obligé à venir me parler après tout. « Tu ne peux pas comprendre. » je lui réponds de manière assez froide, avant de jeter un coup d’œil derrière moi, dire de vérifier qu’aucun serpentard ne passe par là. « Je suis à serpentard. Si je veux pas me faire insulter non-stop, je dois agir. » je siffle à l’attention de Maysilee entre mes lèvres pincées. Celle-ci paraît horrifiée par mes dires, marquant une courte pause durant laquelle elle me dévisage. « Alors c’est ça … Tu as choisis de faire de ton mieux pour t’intégrer à ta maison ? » Je hoche doucement la tête. Au moins, elle a vite compris. Ou du moins, essaye-t-elle de comprendre, puisque je doute qu’elle y parvienne vraiment. Après tout, à serdaigle, les gens n’ont rien à faire de savoir qu’elle soit une née-moldue ou non, elle doit avoir la belle vie elle. « Donc tu renies tout. Tes origines. Moi. » Je baisse un instant la tête. Evidemment que je dois la renier elle, je n’ai pas le choix à vrai dire. Elle a tendance à trop mettre en avant ses origines moldues, beaucoup trop pour que cela soit rattrapable dorénavant. Et je ne peux me permettre de rester avec elle alors qu’elle pourrait me causer du tord, moi qui tente de me faire passer pour un sang-pur. Lorsque je redresse la tête, je ne peux m’empêcher de crisper un peu plus la mâchoire, ne sachant trop quoi dire. « Bien. Ce fut donc notre dernière conversation. » Je hoche doucement la tête, toujours incapable de rajouter quelque chose. C’est elle qui tourne les talons la première afin de s’éloigner. Je n’aime pas les adieux.

CHEMIN DE TRAVERSE, ANNÉE 1995.
Alors que je marche tranquillement sur le chemin de traverse, les mains bien enfoncées dans les poches de ma robe de sorcier, je sens que l’on m’attrape par les épaules – plus que je ne m’en rends compte, dans un premier temps. Je n’arrive à me concentrer sur ce qu’il est en train de se passer que lorsque je me retrouve violemment plaquer contre le mur de briques derrière moi. « T’as pas l’air d’un sang-pur toi. » me crache l’homme à la figure. « Lester, arrête. C’est un ancien serpentard. » intervient alors une voix derrière mon agresseur, que je reconnais plutôt bien. Le serpentard de septième année qui m’avait agressé le jour de mon entrée dans l’école de sorcellerie. Je déglutis, ça sent plutôt mal barré. « Cela ne veut absolument rien dire. » lui répond le premier mangemort d’une voix ferme. Se tournant de nouveau vers moi, il me dévisage longuement avant de sortir sa baguette magique de sa cape et à l’aide d’une incantation silencieuse, faire apparaître un rouleau de parchemin. « Ton nom ? » me demande-t-il alors. « C’est Ruthel Hopkins, monsieur. » répond alors l’autre serpentard avant même que je n’ai le temps d’ouvrir la bouche. Le plus vieux mangemort le foudroie alors du regard. « Excusez moi, monsieur Panderman. » souffle le serpentard avant de baisser les yeux au sol, changeant alors considérablement d’attitude avec son acolyte. Celui-ci se met d’ailleurs à farfouiller dans son parchemin, avant de laisser échapper ce qui ressemble à un glapissement de joie. « Dans la liste des nés-moldus recherchés ! Là ! » s’écrit-il alors. « Né moldu, lui ? Impossible. » Le dénommé Lester Panderman se retourne alors vers son ‘second’, le foudroyant du regard. L’idée que je suis dans la liste des nés-moldus recherchés par le ministère, s’impose alors à moi avec violence. Je ne peux pas me permettre de rester là. Aussi, je profite de l’altercation entre les deux mangemorts pour transplaner. Quels idiots.

PICCADILY CIRCUS, ANNÉE 1996.
J’ai mis du temps à la retrouver, mais aujourd’hui, elle est bien là, juste devant moi. Impossible de s’y méprendre, elle n’a pas changé. Bien heureusement d’ailleurs, j’aime bien la Maysilee que je connaissais à l’époque. Maintenant que je l’ai rejeté, je ne suis même pas sûr de pouvoir dire que je la connais encore. Si ça se trouve, peut-être a-t-elle changé. Au moins a-t-elle gagné en maturité depuis notre entrée à Poudlard. C’est presqu’une évidence à vrai dire, personne ne peut rester avec son âme d’enfant durant autant de temps, surtout avec la seconde guerre en cours. « Poudlard c’est fini. » Triste constatation. Au moins, je n’étais pas considéré comme un moins que rien lorsque j’étais au château. Enfin, moins que rien, c’est vite dit. Je ne vois toujours pas en quoi les moldus sont considérés comme des êtres inférieurs. Autant dire que oui, j’ai un peu suivi aveuglement ce qu’il se passait, sans me préoccuper des conséquences. Aujourd’hui, je le regrette sûrement. Je crois que je n’ai pas encore pris assez de recul pour le savoir concrètement. « Qu’est-ce que ça change ? » Tout. Cela change absolument tout. Je ne peux plus me cacher et me faire passer pour ce que je ne suis pas. Je suis obligé de nous assumer, mes origines et moi. Je peux rejeter mon passé tant que je veux, cela ne dupera plus personne, je suis sur la liste des nés-moldus non recensés et donc des sorciers recherchés. « Je ne peux plus mentir. » Triste constatation. Comme quoi, mes parents avaient raison : un mensonge ne peut durer éternellement. Je baisse doucement la tête, légèrement gêné par la situation et par mes actes. C’est ce moment qu’elle choisit pour lâcher un grand éclat d’un rire imprégné d’ironie. Je redresse la tête, constatant que quelques visages se sont tournés vers nous. Bien heureusement, les gens reprennent vite leur route, nous laissant ainsi toujours baignés dans notre bain de foule moldue. « Et ? Du coup je dois te pardonner ce qui s’est passé quand on est entré à Poudlard ? J’ai aucune raison de faire ça. » Me pardonner ? Je n’en demande pas tant. Je sais que l’amertume restera de toute manière. Je veux juste repartir d’un meilleur pied, que l’on se redonne une chance en termes d’amitié. « Je suis désolé. » je lui souffle, le ventre noué. Je la vois aussitôt hausser les épaules d’un air désinvolte, mes excuses l’important sûrement peu. Peut-être que cela aurait mieux fonctionné si je m’étais jeté à ses pieds, mais il me reste tout de même un peu de dignité en réserve. « Moi aussi. Débrouille toi. » Effectivement, elle a changé. Disparue la Maysilee de l’école primaire, capable de tout pardonner. Elle a un vrai caractère cette fois. Tant mieux dans un sens. « L’union fait la force, on a plus de chance de s’en sortir en restant ensemble Maysilee ! » je tente une dernière fois, bien décidé à ne pas me trainer à ses pieds pour implorer son pardon au final. Mais peut-être que cela aurait été plus efficace, lorsque l’on y regarde bien. « C’est ça ouais. Bha trouve toi quelqu’un d’autre. Tu as décidé de mettre un terme à notre amitié, ne reviens pas sur cette décision aujourd’hui. Ait un minimum de loyauté envers toi-même. » me glisse-t-elle d’une voix ferme avant de tourner les talons pour s’éloigner, me laissant seul sur la place bondée. Je vis cela comme un achèvement, ne me laissant plus la force de bouger, pourtant, je ne peux rester là. Alors moi aussi je pars, seul, à la conquête du futur.

GLEMORE FOREST PARK, ANNÉE 1997.
Alors que j’atterris dans ce parc d’Ecosse après un transplanage, je n’ai qu’une idée en tête : Maysilee doit être là. Je le sais, je le sens. Comme-ci au fil du temps, j’avais développé une sorte de sixième sens me permettant de la retrouver, quoi que je veuille ou fasse. « May ! May ! » je cris en marchant lourdement dans la forêt. A croire que je n’ai plus aucun esprit de survie. Mais à vrai dire, je me fiche du fait de me faire prendre, du moment qu’il n’emmène pas Maysilee aussi. Seul, je ne suis plus rien. J’ai besoin d’elle. Pendant de nombreuses semaines, l’idée – presque – obsessionnelle de la retrouver, n’a pas arrêté de me trotter en tête. « May ! May ! » je continue de tenter en avançant toujours plus profondément dans la forêt. Je sais qu’il ne vaut pas la peine de m’en sortir si je reste dans le doute qu’elle aille bien. J’ai vraiment besoin d’elle, je ne saurais expliquer pourquoi. Peut-être parce que c’est l’amie que j’ai gardé le plus longtemps ? Quoi que l’on ne puisse pas dire que les années passées à Poudlard soient de vraies années d’amitié. Alors que je commence à me dire que je ressemble de plus en plus à un gibier n’attendant que d’être cueilli par un chasseur, je l’aperçois enfin. Elle s’avance entre deux arbres, la baguette tendue en avant, les sourcils froncés.

QUEEN ELIZABETH FOREST PARK, ANNÉE 1997.
Je scrute la forêt autour de notre tente. Il n’y a pas âme qui vive par ici. S’en est même quelque peu déconcertant lorsque l’on y regarde bien. Mes doigts serrés autour de ma baguette commencent à se geler, se fendillant par endroit à cause de l’attaque du froid certainement. Je ne vois pas l’intérêt de monter la garde à présent. Après tout, les mangemorts et les raffleurs ont mieux à faire en période de fête, que de courir après nous, simples fugitifs ? Sûrement oui, surtout qu’ils ont déjà dû amasser assez de gallions durant le restant de l’année. Ce serait stupide de leur part de continuer à patrouiller en cet instant. Aussi je me lève et rejoins l’intérieur de la tente. En me voyant arriver, Maysilee fronce les sourcils. Je hausse simplement les épaules pour lui montrer qu’il n’y a rien avant de venir m’asseoir à côté d’elle. Ses yeux ne quittent pas mon visage, aussi je laisse mon regard rencontrer le sien. Sans que je ne sache réellement pourquoi, nos deux têtes s’avancent au même moment, comme d’un commun accord. Nos lèvres se rencontrent alors quelques instants, tandis que mon cœur se met à bondir dans ma poitrine. Survient alors une explosion à l’extérieur. Je ne cherche pas à comprendre et me lève d’un seul bond, l’adrénaline s’infiltrant dans chacune de mes veines. Je me précipite hors de la tente, avant de rester pétrifier face au spectacle extérieur. Des raffleurs. Et c’était moi qui devais être de guet. Aussi je ne cherche pas à comprendre et je hurle : « Va t-en May ! » Je me retourne un instant pour lui adresser un regard insistant, presque pour lui dire qu’elle n’a rien à craindre. Nos yeux se rencontrent quelques instants, avant qu’elle ne tourne les talons pour s’enfuir à travers la forêt. Alors que j’entends qu’elle s’éloigne, je me retourne vivement vers les raffleurs et sors ma baguette de ma poche. Je veux lui faire gagner du temps, le plus possible.