Mon cœur battait la chamade alors que je regardais d'un air distrait l'horloge clouée au mur de ma chambre, l'aiguille semblant accélérer sa course folle à chaque fois que mon regard se posait sur elle. J'avais dix ans. Dix années et des rêves plein la tête. Des envies plein les yeux. Dix ans et un destin qui s'étendait devant moi en une voie rectiligne et uniforme, une voie toute tracée par des génération de Greyback avant moi. Nous étions une famille des plus réputés parmi l'aristocratie magique, une famille dont la pureté du sang guidait les pas depuis toujours, comme un symbole, un étendard. La chimère d'une famille qui vénérait la puissance. Lycanthrope. Le mot traversa mon esprit en une fraction de secondes. Entremêlement de mots qui me contrôlent comme un marionnettiste contrôle son pantin. Lycanthrope. Sombre héritage, celui de mon père, Fenrir Greyback. Je savais que ce moment arriverait, depuis mon enfance l'on ne me parlait que de ce don que l'on me ferait le jour de mon seizième anniversaire. Un don, ou plutôt une malédiction, mais avais-je le choix ? Non, bien sur que non. Il en avait toujours été ainsi, et même si quelque part j'avais toujours espéré que cela passerait, simple lubie passagère d'un père qui ne rêvait que de puissance et de grandeur pour sa noble progéniture. Mais depuis le retour de Voldemort, c'était bien plus que cela. Un destin auquel je ne pouvais échapper, à l'instar de mon frère. Nous étions des armes, l'arme des desseins du seigneur des ténèbres. L’arme de sa démesure. De son obsession. Dehors, la nuit tombait peu à peu, embaumant l’air de ses ténèbres sans fin tandis que la lune se levait. Ronde et gibbeuse. Je me mordis les lèvres, sentant mon cœur s’accélérer alors que les minutes passaient. Vite. Trop vite. Bientôt, je ne serais plus tout à fait moi. Sombre Hérault de l'astre lunaire qui à chaque fois que la lune embaumera les ténèbres de sa plus vive lumière m'enserrera l'âme et le corps sans que je ne puisse lutter. Je fermais les yeux un moment. Sous mes paupières closes l’image de la petite fille pleine de joie sembla me narguer, faisant résonner dans mon esprit son rire frais et honnête. Joie débridée et sauvage. Ephémère. « Elyon ? » J’ouvris les yeux, soudainement éveillée par la voix de mon frère. « C’est l’heure. » Plus encore que le moment de la transformation qui m’attendait, ce fut la voix de mon frère qui me fit mal à ce moment. Dénuée d’émotion, presque impatiente. Je me levais en silence, lui suivant vers la pièce où, je le savais, mon père était enfermé sous sa forme lupine. Il attendait. J’avançais comme un automate, les battements frénétiques de mon cœur résonnaient dans ma tête tandis que je m’approchais de la porte de bois massive devant laquelle deux sorciers attendaient, baguette à la main, près à maitriser le loup-garou pour ne pas qu’il ne blesse trop profondément mon frère et moi. Le moment était venu. Le moment de laisser une partie de moi mourir. Le moment de me donner à la lune, devenir l’arme lupine du mal. Mais le voulais-je vraiment ?