I. TON PERSONNAGE ET LA SITUATION ACTUELLE ? La "situation actuelle" n'est que le cadet de ses soucis : devant les problèmes des autres, l'autrefois attentive et fille d'Auror Sage Blackheart, lève les yeux au ciel avec nonchalance. Ses services pour l'Ordre du Phénix n'ont été que très peu reconnus, et à force de se faire déposséder de tout ce qu'elle avait pour une cause vaine, la jeune femme a appris à servir des intérêts qui comptaient : les siens, à elle uniquement. Ce qui la pousse à se questionner, à bouger à nouveau, c'est sa condition actuelle, qui se complique sensiblement de jour en jour : s'ils ont su la retrouver à l'autre bout du monde, elle n'est plus tranquille, elle le sait. Quelle meilleure défense que l'attaque, après tout ? Indépendante et insaisissable, Sage revient dans un monde qui a bien changé depuis la dernière fois qu'elle s'y trouvait, ce n'est pourtant pas dans l'intention de changer le monde, sauver autrui ou détruire ce Nouveau Régime qu'elle est là, elle compte avant tout sauver sa peau, la seule chose qui importe, en somme.

   II. TOUT-A-SAVOIR : rusée, calculatrice, Sage est quelqu'un qui a appris à tirer toujours profit d'une situation : qui plus est, elle a un fort répondant, ainsi qu'une volonté d'acier, il est bien rare qu'on puisse aisément lui marcher sur les pieds, en somme, c'est une négociatrice acharnée, intrépide et inflexible ◊ si les idéaux de Sage ont toujours été pour l'égalité et la liberté de chacun (elle n'est, après tout, pas de sang-pur et n'a jamais eu d'anicroche particulière avec un né-moldu ou un moldu), seul son intérêt compte pour elle à l'heure actuelle : certains la voient alors comme une bonne menteuse, prête à jeter en pâture ses alliés comme ses ennemis à la moindre occasion. Ce qui est sans doute le cas, mais aux personnes auxquelles elle tient, Sage peut également montrer une loyauté sans faille ◊ savant mélange entre les moldus et les sorciers, Sage a su tirer profit des deux mondes : son père l'a toujours poussée à connaître le monde moldu, pour qu'elle ne perde pas de contact avec sa défunte mère. Ainsi, elle passait certains étés chez ses grands-parents, sait se servir de l'argent moldu, d'une carte de transport, elle a même pris des cours de self-défense et ne se déplace jamais sans un poignard dans sa botte, qui l'a déjà beaucoup aidée ◊ elle n'est qu'à peine sentimentaliste au premier abord, Sage conserve pourtant à son cou le médaillon que sa mère portait plus jeune, c'est un peu le seul trésor duquel elle ne compte pas se défaire, la prunelle de ses yeux, la seule chose qui a de l'importance, alors qu'elle n'a eu aucun mal à laisser tout ce qu'elle connaissait derrière elle pour partir ◊ sa mère jouait au piano, aussi, la jeune femme a mis un point d'honneur à apprendre à y jouer également : aujourd'hui, elle n'y touche plus vraiment, mais elle espère que c'est comme le velo, que ça ne s'oublie pas. Jouer lui a toujours permis de penser à autre chose, de vider sa tête et de laisser couler ses inquiétudes ◊ particulièrement rancunière, Sage n'est pas quelqu'un qui laisse aisément une seconde chance à ceux qui l'ont trahie : elle est mieux sans ceux qui risquent de la poignarder dans le dos, elle sait cependant également bien retenir qui sont ses alliés, et se replier vers eux en cas de problème ◊ mine de rien, bien que plutôt talentueuse en sortilèges et défense contre les forces du mal, Sage a toujours été plus stratégique que combattive, alors que d'autres préféraient le club de duel, elle, elle excellait aux échecs ◊ elle n'a pas particulièrement la patience de lire un livre : elle lit assez rarement à vrai dire, la plupart de son apprentissage à Poudlard se faisait en écoutant en classe, se plonger dans de longues lectures n'a jamais été trop son truc, quand bien même c'était l'activité favorite de son père ◊ grande faiblesse qu'elle ne montre pas, Sage a le vertige, peu de gens le savent d'ailleurs, mais elle a toujours détesté les cours de vol et le Quidditch à cause de cela, elle est beaucoup mieux les pieds sur terre ◊ d'humeur plutôt joviale, Sage n'est pas du genre à afficher ouvertement ses faiblesses : au contraire, elle préférera toujours donner l'impression de garder le nord que de laisser son visage la trahir, il est sans doute très difficile de pouvoir la sonder, la comprendre en un regard.

Revenir en Angleterre avait quelque chose de pervers, comme si elle cherchait à s’auto-mutiler, se punir pour quelque chose qu’elle avait fait. Aux yeux de n’importe qui, de la douce Sage d’avant la guerre, elle avait de quoi être punie, châtiée, regardée de travers. Autour d’elle, elle avait eu déjà l’occasion de remarquer à quel point les choses avaient changé dans son pays d’origine, à quel point elle avait eu raison de partir. Ce pays n’était plus celui dans laquelle son père aurait voulu vivre, sa mère non plus sans doute : tous les deux étaient morts pour tenter de le sauver de la noyade, et finalement, tout ceci n’avait servi à rien. Sage se plaisait à croire que sa décision avait été la plus intelligente qui soit, et que survivre à tout cela valait en soit, tout ce qu’elle avait pu accomplir par le passé : les bonnes comme les mauvaises actions. Son passé la rattrapait cependant, non pas parce que les remords la tiraillaient ou parce que quelqu’un avait cru bon de venir la chercher à l’aide. On l’avait chassée de l’existence qu’elle avait si durement gagné, et Sage comptait bien savoir qui pouvait s’en prendre à elle d’une telle manière : même, qui avait eu assez de ressources pour la retrouver, à l’autre bout du monde, dans ce petit coin abandonné et ignoré où elle s’était échouée. A Londres, il fallait quand même avouer qu’elle avait plus d’alliés que sur la petite île au milieu de la mer où elle avait pris ses vacances depuis quelques temps : comment avait-elle pu se dorer au soleil pendant qu’ici, le chaos déchirait le monde qu’elle avait toujours connu ? Bonne question, elle-même ne savait pas ce qui l’avait poussée à tant haïr cet univers qui l’avait vue grandir, ce qui l’avait poussée à ne pas avoir envie de sauver ce qui pouvait rester d’espoir dans ce néant d’existence. A quoi bon, au fond ? Quoiqu’elle ait pu faire, elle avait quand même été confrontée au regard foudroyant d’Evander quand il avait appris ce qu’elle avait fait, elle avait quand même perdu son père, sa mère. Tous les membres de sa famille auxquels elle tenait, si ce n’est sa stupide demi-soeur, la dernière Blackheart avec elle, quelqu’un qu’elle échangerait volontiers à la grande faucheuse pour retrouver son père.

En passant le seuil de la grande maison des Blackheart, Sage sentit une vague de nostalgique l’écraser de toute part : elle se souvenait encore des jours où elle courait dans cette grande maison, la fois où elle était tombée dans les escaliers, et qu’elle avait dit que Sigrid l’y avait poussée, tout simplement parce qu’elle détestait cette demi-soeur qui lui volait peu à peu son monde. Histoires d’enfants, bien évidemment : désormais, les querelles qui opposaient les deux soeurs étaient bien plus complexes que cela, sans doute impossible à résoudre désormais. Ce n’était pas pour renouer avec sa frangine que la jeune femme était revenue jusqu’ici, de toute manière : aux dernières nouvelles, Sigrid était un être encore plus pourri qu’elle, à croire que la nouvelle génération des Blackheart avait de quoi se faire retourner dans leurs tombes leurs ancêtres. Peu importe, Sigrid ne semblait pas être là : tout était éteint, et la poussière avait déjà élu domicile sur les meubles de la grande baraque. C’était donc ça qu’il restait des Blackheart, après tant de temps ? Simplement des vieux meubles, de la poussière. Elle poussa l’interrupteur, éclairant la pièce tout autour d’elle : elle reconnaissait les lieux comme si c’était hier. C’était hier, sans doute. Ou il y a plusieurs mois déjà, aussi incroyable que cela puisse paraître, elle se sentait plus en sécurité ici, au milieu de ses ennemis et alliés, au milieu de la guerre, que dans sa retraite solitaire.