J'avais l'impression que le pub était plus bondé que jamais. Je ne savais pas d'où me venait cette idée, mais je ressentais un vague sentiment d'étouffement. Il y avait du monde, beaucoup trop de monde. Pourtant, nous n'étions pas un samedi soir, les fêtards n'avaient pas encore envahi les lieux. En plus, les gens me paraissaient particulièrement énervés. Non pas qu'ils étaient en colère, mais ils étaient simplement insupportables à jacasser ainsi, à s'agiter pour rien. Autrement dit, ils me donnaient le mal de mer, et j'étais d'humeur tueuse. Pourtant, il fallait continuer à sourire, même si ce sourire était purement factice. À dire vrai, j'avais hâte que cette soirée se termine alors qu'elle venait à peine de commencer. « Deux whisky pour la table là bas. Une tequila sunrise et une bière aussi. » dis-je à l'adresse du barman, sans reprendre mon souffle. J'aurais bien besoin de tequila moi aussi, ne serait-ce que pour supporter tout ce petit monde. Monde qui par ailleurs ne tournait plus rond. « Je ne sais pas pourquoi les gens sont excités comme ça. » fit remarquer Lindsay, une autre serveuse, qui semblait elle aussi éreintée. « En tout cas, ils sont pénibles. » Je me contentais d'acquiescer en silence, ne trouvant rien à y ajouter. Dans un sens, j'étais plutôt rassurée, ce n'était pas moi l'empêcheuse de tourner en rond. Je pouvais donc râler et récriminer sans me faire passer pour la chieuse de service. « C'est la pleine lune ce soir. » fit remarquer Peter, avec un sourire en coin. Je levai les yeux au ciel. « Quoi, t'y crois à ces trucs là ? » questionnai-je avec acidité. « C'est plausible, non ? » répondit-il en levant les épaules. Je restai silencieuse quelques instants. À dire vrai, cela me surprenait que de simples moldus puissent croire à toutes ces superstitions. Dans leur monde à eux, ça n'avait pas beaucoup de portée. En fait, c'était même plutôt insignifiant. Il n'y avait que chez nous que ça avait un réel impact. La sorcellerie se fondait pour partie sur le calendrier lunaire, contrairement aux moldus qui fonctionnaient selon le rythme solaire. S'ils savaient. Mais ils ne savaient rien, et continuaient à en plaisanter comme si c'était quelque chose de complètement futile, sans intérêt. « Pas le moins du monde. » conclus-je avec mauvaise foi, tandis que j'emportais mon plateau désormais plein avec moi, prête à distribuer les boissons aux clients. Je sentis le regard de Peter rivé sur moi tandis que je m'éloignais d'un pas raide. Dans un sens, j'y étais habituée. Je ne me formalisais même plus quand on me regardait comme si j'étais une créature tout droit venue d'une autre planète. J'étais la fille bizarre, un poil inquiétante, qui semblait traîner ses casseroles partout où elle allait. C'était presque marqué sur ma figure que j'avais des pouvoirs magiques, et un lourd passé, ces deux éléments étant bien évidemment en corrélation.
Lorsque je revins, Peter poussa un shooter dans ma direction. Je n'avais pas besoin de me pencher pour renifler ce que c'était, ça empestait la vodka à des kilomètres. Je regardai le minuscule verre sans comprendre. Ou peut-être que j'avais parfaitement compris, mais cette option n'était même pas envisageable. « Allez, Davis, ne te fais pas prier. » m'invita-t-il finalement, en désignant le shooter de la main. « Bois ça, tu verras, ça te requinquera, parce que là, t'as vraiment une tête à faire peur. » Je lui levai le majeur, avant de retourner derrière le comptoir pour préparer une autre boisson. Bon sang, mais où était passée cette foutue bouteille de gin ? Je pestai entre mes dents. Instinctivement, je pensai à Peter et à Lindsay, qui l'avaient certainement planquée pour me jouer un sale tour, avant de respirer longuement. Non, ils ne pouvaient pas savoir que là bas, on m'avait demandé un gin tonic. ils ne pouvaient pas savoir. Pour un peu, je regretterais presque qu'Emily ne travaille pas aujourd'hui, car elle était nettement moins insupportable que ces deux là. En plus, il fallait tout le temps passer derrière Peter. Il était nouveau, et il faisait plein de bêtises. Certes, j'étais passée par là moi aussi quand je suis arrivée en Septembre, mais quand même, ce n'était pas une raison. Peter jaillit à nouveau à côté de moi, me faisant sursauter. « Non mais ça va pas ! » l'invectivai-je, presque immédiatement, alors qu'il se bidonnait, visiblement content de sa petite blague. Alors, il me prit aussitôt par les épaules – ce à quoi je résistai, avant de me laisser faire parce que plus aucune résistance n'était possible – et il colla presque ses lèvres à mon oreille pour chuchoter quelques mots. « Lindsay et moi avons parié cinq livres que tu ne serais pas cap' de boire ce shooter. » Je jetai à Lindsay un regard exaspéré. Comme les autres, ils devaient sans doute penser que j'étais une fille désespérément frigide, qui ne savait pas s'amuser. La petite intellote qu'on n'invitait jamais aux soirées et autres jolis clichés du même genre. Ils ne le savaient pas encore, mais je n'étais clairement pas le genre de fille qu'il fallait emmerder. « Prépare-toi à perdre, mon beau. » lançai-je d'un ton sarcastique, avant de m'emparer du shooter et de le vider en une gorgée. Je retournai le récipient, pour montrer qu'il n'y avait plus une goutte de liquide dedans, avant de le poser à nouveau sur le comptoir, et de le pousser vers Peter. Quand bien même je l'aurais tout juste absorbé, l'alcool me brûlait encore le gosier, et soudainement, j'eus chaud aux joues. J'aurais pu jurer qu'on pouvait faire cuire un œuf dessus. Mon regard cependant luisait d'une lueur triomphante. Je tendis la main pour demander mon dû. « Leçon numéro une, ne jamais parier contre moi. » glissai-je sur le ton de la confidence à Peter, qui sortit de sa poche un billet de cinq livres pour le déposer entre mes doigts. Je lui adressai un grand sourire hypocrite, avant de fourrer le billet dans la poche arrière de mon jean. D'habitude, je ne m'abaissais pas à ça, encore moins contre de l'argent. Mais l'air de rien, ça m'a fait plaisir de leur rabattre le caquet, à tous les deux. Mon but n'était pas non plus de laisser entendre que sous mes airs de petite fille sage se cachait une nana délurée, non, en fait, si ça pouvait faire taire les messes basses dans mon dos, ça serait très bien. Puis, j'étais tellement orgueilleuse que je ne reculais jamais devant un défi. Jamais. L'échec, quel qu'il soit était très difficile à supporter, et donner raison à ces deux idiots correspondait à l'idée que je me faisais de l'échec. Je soupirai, avant de m'éloigner, mes talons claquant sur le sol. L'alcool m'embrumait un peu les idées, mais je ne me faisais pas de soucis à ce sujet, j'avais une bonne descente. Enfin, c'était une notion tout à fait relative soit dit en passant.
Une fois que je fus hors d'atteinte, j'enlevai mes escarpins, qui me faisaient mal aux pieds. Quelle idée aussi de mettre des nouvelles chaussures pour aller travailler. Cela dit, il fallait bien les casser, et ce n'était pas en les laissant dans un placard que ça allait se faire. Machinalement, je me baissai pour remettre correctement mon collant. Je me sentais nettement mieux pieds nus. En fait, je pourrais même travailler ainsi, mais ça ferait désordre. Mon côté peu conventionnel reprenait le dessus. Plus les jours passaient, et plus je me disais que je faisais tâche. J'avais compris depuis longtemps que je n'avais pas ma place ici, que je ne l'aurai jamais parce que j'étais différente, seulement, je ne voulais pas me l'avouer. J'étais dans le déni. Ou du moins, mon instinct de conservation se mettait en marche. J'étais ainsi. On ne me referait pas. Je soupirai, avant de m'accouder nonchalamment sur le comptoir. M'affaler serait un terme plus juste. J'extirpai de la poche arrière de mon jean un paquet de cigarettes à moitié vide, et m'en coinçai une entre les lèvres. Un cric de briquet plus tard et je recrachai une longue bouffée de fumée âcre et opaque. Pour l'instant, ça se calmait un peu, même si ce répit serait de courte durée. Alors, je pouvais bien m'accorder un moment rien qu'à moi, regardant d'un œil distrait les gens qui bavardait gaiement. J'étais devenue comme étrangère à cette scène, mais peut-être était-ce aussi parce que je m'étais volontairement isolée. Les clochettes de la porte d'entrée tintèrent à nouveau, indiquant que quelqu'un venait d'entrer. Je jetai à la poignée de client un regard indifférent, tirant toujours sur ma clope. Je fis tomber quelques cendres dans le cendrier. Mon regard fut cependant attiré par une silhouette encapuchonnée, qui marchait à vive allure vers le comptoir. Je jetai un regard en biais aux autres, qui étaient là un peu plus loin, et qui étaient le plus à-même de satisfaire une quelconque commande de sa part, seulement, j'avais la très nette impression que c'était moi qu'elle venait voir, et moi seule. D'ailleurs, en moins de temps qu'il fallait pour le dire, elle était là, devant moi. Elle ne retira pas sa capuche – pourquoi le ferait-elle dans un endroit plein de monde ? Je me figeai en voyant des boucles rousses qui pendouillaient de part et d'autre de son visage à demi dissimulé. Je n'en connaissais pas beaucoup de rousses, et ce prénom fit tilt dans ma tête. « Cersei ? » interrogeai-je, la voix légèrement rauque. Puis soudain, tout cela fit sens. Peter, qui annonçait que ce soir, c'était la pleine lune. La présence de Cersei alors qu'elle était recherchée. Pleine-lune. Cersei. Ces deux notions rebondirent à l'infini dans mon esprit, alors qu'un frisson me parcourait l'échine. Les ennuis ne faisaient que commencer.
≡ son emploi : professeur de sortilèges à poudlard.
≡ statut de sang : sorcier de sang-pur, noble jusqu'au bout des doigts, qui tient à la dignité de sa famille.
≡ sa maison : ancien gryffondor, un choix qu'il n'a jamais particulièrement compris ni accepté, tous les siens finissant normalement chez les serpentards.
≡ sa baguette : bois d'ébène, spécialisation en maléfices, longueur de trente-deux centimètres avec pour centre un ventricule de coeur de dragon.
Sujet: Re: full moon (cersei) Ven 27 Déc - 19:15
darßness will maße you strong.
— CERSEI-JANE V. HARKNESS & TRACEY M. DAVIS —
It's so hard letting go, I'm finally at peace, but it feels wrong. Slow I'm getting up, my hands and feet are weaker than before. And you are folded on the bed where I rest my head, there's nothing I can see. Darkness becomes me. But I'm already there, I'm already there, Wherever there is you, I will be there too. There's nothing that I'd take back, but it's hard to say there's nothing I regret. Cause when I sing, you shout, I breathe out loud. You bleed, we crawled like animals, but when it's over, I'm still awake. A thousand silhouettes dancing on my chest, no matter where I sleep, you are haunting me.
Tout le long de la journée, le soleil avait été faiblard, répandant une lumière grisâtre sur la ville de Londres, ses rayons perçant à peine à travers la brume qui n’avait de cesse de s’épaissir. Plus que jamais, la morosité de l’hiver semblait prendre le pas sur l’ambiance de Noël, les promesses d’un bon repas en famille, de jours moins froids, au coin du feu, en bonne compagnie. Cersei se souvenait bien du Noël qu’elle avait célébré l’an dernier : en compagnie de son père et de la famille de celui-ci, le moindre regard dirigé vers elle tandis qu’elle tentait de faire bonne figure, de cacher à tous les plans qu’elle érigeait déjà dans sa tête pour se défaire des desseins auxquels la destinait son paternel. Finalement, il avait gagné. Elle était devenue une meurtrière, une fugitive, pire que ça même. Soudainement, prendre le noir et se faire marquer par Lord Voldemort lui paraissait être un sort meilleur que celui qui lui était finalement tombé dessus : plus fugitive que jamais, la jeune Harkness disparaissait peu à peu dans le néant de l’inconnu, les profondeurs d’une nuit sans fin. Parfois, lorsque la lune était haute dans le ciel et parfaitement ronde, Cersei avait l’impression de mourir toujours un peu plus sous l’influence de la bête qui s’emparait alors de tout en elle, la destituant du peu d’humanité qu’elle pouvait encore posséder. A Poudlard, elle n’avait que peu prêté attention aux cours de défense contre les forces du mal, se considérant nulle en la matière sans avoir besoin que qui que ce soit ne le lui dise : quelle n’avait pas été sa surprise en apprenant que leur professeur, Remus Lupin, était un loup-garou ! Il lui était facile aujourd’hui, d’admettre qu’elle avait eu peur de lui, sans doute avec la même force qu’elle avait peur d’elle-même, de ces lendemains blancs où elle s’éveillait de sa transe temporaire sans même savoir où elle avait été, ce qu’elle avait pu faire. Tout lui avait paru être plus facile dans les forêts du grand nord en Russie ou d’autres pays glacés : où elle se cachait, elle pouvait être persuadée qu’elle n’avait croisé personne, mais ici, en Angleterre, tout était différent. Ici, il y avait Londres, au Nord il y avait l’Ecosse, Poudlard et Elwood, à l’Ouest, il y avait l’Irlande, des endroits qui lui semblaient si familiers, par le simple fait qu’elle avait grandi dans une ville, par là-bas, un petit endroit dont elle ne voulait pas se souvenir du nom. Evidemment, un coin de son esprit s’en rappelant, tout autant qu’il se rappelait en boucle d’Elwood, de leur dernier face à face. De Judith, dont elle n’avait aucune nouvelle depuis plus d’un an à présent, de sa tante, avec laquelle rien n’était plus évident. De Saireann, froissant irrémédiablement son cœur dans une douleur lancinante, qu’elle se plaisait à interpréter comme son orgueil écrasé par la trahison qu’il avait commise à son égard. C’était de là que naissait la flamme ardente de sa colère, cette haine qui alimentait chacun de ses gestes en ces instants, atténuant les tremblements qui la prenaient de la tête aux pieds, à mesure que l’obscurité s’épaississait : bientôt, la lune se lèverait sur l’horizon, flirtant avec celui-ci avant de s’élever haut dans le ciel, plus ronde et plus jaune que jamais auparavant jusqu’alors. Irrémédiablement, le cycle recommençait, la nature reprenait ses droits – et déjà, Cersei sentait cette désagréable sensation électrique glisser de sa morsure, au creux de son épaule, vers chaque fibre de son corps, chaque parcelle de ses veines, de son sang glissant à toute vitesse, précipité par la peur perfide qui s’infiltrait déjà sous sa peau, suintait de toute part, parfumant l’air d’arômes désagréables. Ses sens en éveil, Cersei n’avait de cesse d’examiner la nuit grandissante par-dessus son épaule, comme si elle s’attendait à se transformer à tout moment en une bête sauvage qui assassinerait alors chacun des moldus autour d’elle.
Contrairement à ce qu’elle devait penser, il lui avait été aisé de retrouver Tracey dans la foule de Londres, quand bien même elle s’était visiblement coupée du monde magique : demeuraient certaines traces qui ne s’effaceraient jamais, pour elles deux, probablement. Quand bien même elle était rejetée par cette société qui l’avait accueillie à bras ouverts dès sa naissance, Cersei était encore une sorcière, tout comme l’était Tracey, malgré le statut de son sang, et certaines choses n’étaient pas si évidentes à effacer. Pressée, la jeune femme marchait trop vite pour la foule autour d’elle, bousculant certaines personnes sans leur prêter attention, acculant d’autres de regards noirs avant de les dépasser : à mesure que les fêtes de Noël se rapprochaient, les touristes se faisaient de plus en plus présents dans la capitale anglaise, et elle en arrivait à regretter l’ambiance calme, paisible et neigeuse qu’elle avait toujours connue à Poudlard. A partir de l’emprisonnement d’Elwood à Azkaban, Cersei avait toujours trouvé assez de prétextes pour passer les fêtes de Noël à Poudlard, loin de sa cousine, de son oncle et de sa tante, pour lesquels elle n’arrivait pas à alimenter quelque autre sentiment que de la haine, en des occasions pareilles. Devant le festin de Noël, la jeune Serdaigle n’avait eu de cesse, pendant des années, à penser à son cousin, emprisonné dans cette prison dont personne ne voulait parler, et dont elle n’avait eu qu’un bref aperçu lorsque, lors de sa troisième année, des Détraqueurs avaient débarqués, terrifiants et étouffants, pour protéger Poudlard contre Sirius Black. Maintenant, elle savait parfaitement bien quel genre d’enfer Elwood avait pu traverser : revenaient devant ses paupières closes les images de Nurmengard, le froid mordant chaque recoin de sa peau, le désespoir emplissant son cœur à mesure que le temps avançait ; peu à peu, sorciers et Détraqueurs postés là-bas l’avaient dépossédée du moindre espoir qu’elle avait eus. Le dernier tête à tête qu’elle avait échangé avec Saireann lui paraissait alors être aujourd’hui, baigné dans l’absurdité et l’ironie : elle se souvenait de la façon qu’il avait eu de la présenter, comme prête à voir la rédemption, la moindre lueur d’espoir en chacun – même en quelqu’un comme lui – elle s’était lourdement trompée de voir le monde ainsi. Sa captivité si loin de chez elle, et les longs mois de solitude qu’elle connaissait depuis le début de sa fuite, avaient fini d’avoir raison des maigres attentes qu’elle avait pu encore placer en l’humanité. En certaines personnes, en tout cas : se fier à Saireann avait été une grossière erreur, celle qui lui avait coûté les dernières bribes d’innocence qu’elle avait réussi à sauvegarder en elle, malgré sa fuite, malgré la guerre. Jamais plus elle ne commettrait pareille folie que d’avoir une lueur de confiance en un rafleur, en celui qui avait voué de trop longs mois à lui pourrir la vie, à servir l’homme qui avait décidé de la détruire du tout au tout. Ses pensées s’assombrissant, Cersei accéléra l’allure, serrant la reliure du livre entre ses doigts comme pour saisir à nouveau toute sa volonté : elle ne savait pas si elle pouvait faire confiance à Tracey, tout ce qu’elle savait c’est que, les mains tremblantes, l’esprit sans cesse assailli de multiples menaces et incontrôlables pensées, elle était incapable de faire la potion dont elle avait besoin et ce, malgré les multiples essais qu’elle avait accompli. Dans ces circonstances-là, elle en arrivait presque à se demander où étaient passés ses talents en potions qui avaient tant attiré sur elle l’intérêt du professeur Rogue : d’échec en échec, les maigres espoirs de Cersei s’étaient amenuisés. Il lui était impossible de croire en Tracey, en quelqu’un qui n’avait finalement, été que complice dans les derniers actes de Saireann, ceux qui l’ont ramenée auprès de son père, mais c’était là, le seul réflexe qu’elle avait eu, le seul instinct auquel elle parvenait à se raccrocher.
En passant la porte du pub, elle bouscula à nouveau une silhouette, à laquelle elle ne prêta aucune attention : déjà ses sens étaient assaillis de nouvelles sensations, l’odeur âcre de l’alcool l’étouffant à moitié, la lumière tamisée de l’endroit, qui avait quand même tout pour être éblouissante à ses yeux, en comparaison des ténèbres de dehors. Plissant les yeux, la sorcière baissa la tête, tentant de reprendre ses esprits jusqu’à l’instant furtif où ses azurs se posèrent sur la chevelure, puis l’apparition familière de Tracey Davis. Un désagréable bouillonnement se répandant à travers tout son corps en une fraction de seconde, Cersei sentit chacun de ses muscles se crisper, ses mâchoires se serrer, ses dents grincer, tandis qu’elle restait, pour ce qui lui semblait une éternité, debout au milieu de la salle sans même être remarquée par qui que ce soit. La possibilité de faire demi-tour lui était encore accessible, mais elle ne jeta pas le moindre regard en arrière, toute son attention focalisée sur la sorcière, qui s’était, il semblerait, mêlée dans la foule des moldus comme un caméléon se serait adapté à son environnement pour se planquer : éclatait alors à son esprit l’évidence, elle ne pouvait pas se fier à Tracey, car celle-ci l’avait déjà trahie par deux fois, mais elle n’avait pas le choix – elle n’avait plus le choix, si ce n’est celui de quitter à nouveau le pays, quitte à tomber entre les griffes des exécuteurs qui, eux, seraient dehors, à traquer des fugitifs qui, ce soir, n’auraient aucun moyen de se cacher. Elle ne pouvait pas partir ; elle ne voulait pas partir. Alors ses pieds réduisirent à néant l’espace la séparant du comptoir et, avant même qu’elle ne s’en rende compte, Cersei était assise, là, à quelques pas à peine de Tracey. Et tout s’enchaîna alors plus vite qu’elle ne l’aurait cru, ses entrailles se serrant étroitement alors que la voix de la Serpentard atteignait ses oreilles : plus aigu, plus précis que jamais, le ton de Tracey lui parut limpide à déchiffrer. Elle y démêlait un brin de surprise, puis son cœur manquant un battement sous une peur réflexe qu’elle était incapable de retenir : que pourrait-il arriver, ce soir, alors que la lune était ronde ? Un questionnement qui ne cessait de hanter Cersei, qui l’enchaînait à une triste condition. A cause de Saireann. A cause de Tracey. Elle confirma les doutes de Tracey en levant une œillade dans sa direction, contrôlant difficilement le frisson qui lui parcourut l’échine : sans une once d’hésitation cependant, elle se débarrassa de la capuche masquant son visage, les traits fatigués qui la rendaient sans doute moins innocente, trop éreintée pour son âge ; fustigeant la brune d’un œil sombre. « Tracey. » Articula-t-elle, une lueur moqueuse au fond des yeux, avant de déposer devant elle, à la vue et au nez de tous, le livre qu’elle avait en main. Celui qu’elle avait pris à Elwood, et qui, rien que par son titre, pouvait fortement éveiller les soupçons : les ouvrages qui recelaient des potions telles que celle dont Cersei avait besoin étaient généralement sombres et peu recommandables, pas de ceux que l’on trouvait sur les étagères de la bibliothèque de Poudlard. Cersei, elle, n’avait plus rien à perdre : en plus d’être une sorcière fugitive, condamnée pour le meurtre de son père, elle était un loup-garou. Pourtant, cette illusion de vie, cette atmosphère purement moldue dans laquelle s’était réfugiée Tracey semblait avoir un soupçon d’importance pour elle, tandis que la rousse la défiait d’un regard audacieux : en un claquement de doigts, l’alliance entre Saireann et Tracey avaient arraché à la jeune Harkness tout ce à quoi elle pouvait encore tenir – leur retourner ces faveurs ne serait que justice, mais sans doute que ce ne serait pas pour ce soir. Dans un bruit mat, le livre vint donc se poser entre elles, sur le comptoir en bois, avant que la rousse ne détourne les yeux, désignant une bouteille d’alcool ambré derrière Tracey. « Je veux bien un verre, s’il te plait. » Malgré son ton sardonique et tranchant, elle ponctua sa phrase d’un vague sourire – finalement peut-être avait-elle ça dans le sang, un brin de cruauté qui faisait d’elle la fille de Doezwal Harkness. Qui faisait qu’elle était là, à risquer, minute après minute, la vie de tous les gens autour d’elle. « Crois-moi, je vais être de bien meilleure humeur avec quelque chose à boire. » Même si c’était de l’alcool, même si, légalement, elle n’était pas majeure parmi les moldus, et même si la pauvre Tracey risquait de se faire renvoyer pour une faute pareille ; l’une comme l’autre, elles avaient d’autres préoccupations en tête.
Invité
Invité
Sujet: Re: full moon (cersei) Sam 11 Jan - 15:38
La présence de Cersei en ces lieux n'augurait rien de bon. D'une, parce que ce pub, tout ce qu'il y avait de plus moldu, n'était probablement pas le genre d'endroit où Cersei aimait se planquer. De deux, parmi toutes les conneries que Peter venait de dire, j'avais surtout retenu que ce soir, c'était la pleine lune. Pour tous ces moldus rassemblés là, qui ne faisaient rien d'autre à part boire à outrance et parler gaiement, cela ne signifiait sans doute pas grand-chose, mais moi, je savais parfaitement ce qui était en train de se tramer et il n'y avait certainement pas lieu de s'en réjouir. En fait, c'était même plutôt inquiétant, pour ne pas dire carrément flippant. La catastrophe était imminente et ma mission, si je l'acceptais, était d'emmener la bombe à retardement qu'était Cersei loin d'ici avant qu'elle ne fasse d'horrible dégâts. Tous ces moldus n'auraient aucune chance face à la bête que Cersei devenait les soirs de pleine lune, et quand bien même je serais une sorcière, je n'étais pas non plus immunisée contre tout incident, je n'étais pas à l'abri d'une griffure, ou pire, d'une morsure qui me transformerait également en cette...chose. Ma vie était déjà assez pitoyable comme ça, je n'avais pas besoin qu'elle se complique davantage, et encore moins à cause de problèmes de fourrure. Aussi prudence était le maître mot, et à cette notion venait s'adjoindre celle de l'urgence. Le temps, désormais, m'était compté, et chaque minute supplémentaire passée ici était un pas de plus vers le carnage. Je ne pouvais pas me le permettre, ma conscience ne me le pardonnerait jamais. J'avais trop de sang sur les mains, je ne voulais pas répandre celui de tous ces innocents qui n'avaient rien à voir avec notre monde, ni même avec la nature de loup-garou de Cersei. Loup-garou. Le mot était lâché. Il ne fallait pas avoir fait de longues études ni même être doté d'une intelligence supérieure pour comprendre pourquoi Cersei était là. Malgré toutes mes tentatives aussi vaines les unes que les autres pour améliorer son sort, elle revenait quand même me solliciter, sans doute parce que j'étais son dernier recours. Or, j'étais navrée à l'idée de la décevoir, mais je ne pouvais absolument rien pour elle. Voilà des mois que je n'avais pas touché à la magie et en plus de cela, je n'avais aucunement l'intention de le faire. Ce n'était que pure folie que de se fier à moi alors que j'avais très probablement perdu la main depuis la dernière fois, déjà que mes essais précédents n'étaient pas très glorieux. Si je m'y remettais maintenant – et ce n'était qu'une hypothèse – le résultat n'en serait que plus désastreux encore. La seule solution viable était alors de l'éloigner, de la mettre en quarantaine, le temps que la nuit passe et qu'elle reprenne apparence humaine. Il n'y avait que ça à faire de toute façon, et en admettant que je veuille bien me coller à la confection de cette maudite potion, il me faudrait des heures, voire des jours avant que celle-ci soit prête, alors même en m'y mettant dans la seconde, Cersei n'avait aucune chance de l'avoir avant sa transformation. Elle allait devoir faire sans, encore une fois, parce que quoiqu'on en dise, je n'étais pas Dieu, je ne faisais pas de miracles. Comme tout le monde, je n'étais qu'une humaine, et j'obéissais à l'adage errare humanum, est, je ne faisais pas figure d'exception. J'ignorais ce que Saireann avait bien dû lui raconter pour la convaincre de se laisser aider, par moi qui plus est, mais me hisser sur un piédestal, en vantant je ne sais quel mérite n'était pas une solution, c'était même une erreur, une sordide erreur.
Mes yeux impuissants regardaient Cersei s'installer au bar. Je tressaillis. Elle était plus proche que jamais des personnes que je devais protéger, le loup – et c'était cas de le dire – venait d'entrer dans la bergerie, prêt à dévorer tous les moutons inoffensifs qui se trouveraient à portée de dent. Aucun moldu ne devait l'approcher, pas même les autres serveurs. Déjà qu'ils ignoraient que deux sorcières se trouvaient parmi eux, ils étaient bien loin de s'imaginer que l'une des deux sorcières en question était en réalité un loup-garou en pleine mutation. Cela n'allait pas aider ma couverture à rester intact, mais qu'importe, il y avait des enjeux plus importants qui se jouaient en ce moment même. La première étape de mon plan était désormais enclenchée. Il s'agissait de faire sortir Cersei d'ici sans faire d'esclandre – l'énerver n'était bizarrement pas une bonne idée. Ensuite...advienne que pourra, je n'avais pas encore pris de décision, tout viendra en temps voulu de toute manière. Pour le moment, il fallait simplement que je m'assure de la réussite de la phase une, et ça n'allait pas être une mince affaire. Tâchant de garder l'expression la plus neutre possible, ne serait-ce que pour ne pas attirer l'attention des autres moldus sur moi, je reportai mon attention sur la petite Harkness, laquelle semblait déterminée à rester. Je ne cillai pas lorsqu'elle retira sa capuche, pas davantage lorsque mes pupilles heurtèrent son visage fatigué et creusé – en réalité, je ne devais pas avoir l'air plus reluisante qu'elle, alors je n'étais pas en position de juger. Je ne tressaillis même pas lorsqu'elle prononça mon prénom, ni même lorsqu'elle sembla chercher quelque chose dans son sac. Par contre, je ne pus garder mon flegme plus longtemps lorsqu'elle en sortit un livre, et pas n'importe quel livre. un livre de magie. ou tout du moins, peu importait le domaine qu'il concernait, puisqu'il s'agissait d'un ouvrage venu tout droit de notre monde. Mon souffle se raréfia dans ma poitrine tandis que je sentais la nervosité me gagner. Je jetai quelques regards de côté pour m'assurer que personne ne regardait dans notre direction. Était-il nécessaire de lui rappeler que l'une comme l'autre étions garantes du secret du monde magique ? Probablement pas, tout ceci ne devait être que pure provocation, comme pour me pousser dans mes derniers retranchements. Pour autant, je n'étais pas disposée à céder à cet odieux chantage. Elle était bien placée pour savoir que je n'étais pas facilement impressionnable. Il fallait que je garde le contrôle, ne serait-ce que pour ne pas attirer les soupçons. « Je veux bien un verre, s’il te plait. » Je pinçai les lèvres d'un air réprobateur. Là encore, mon imagination se mettait en branle. Parlait-elle bien d'alcool, ou de toute autre chose ? Comme un verre de potion tue-loup, par exemple. Or, je n'avais pas de ça en magasin. Ce n'était pas le genre de boisson qu'on avait l'habitude de vendre. « Crois-moi, je vais être de bien meilleure humeur avec quelque chose à boire. » Je fronçai les sourcils, mon cerveau percutant encore les allusions qu'elle venait de faire. Peut-être s'agissait-il simplement de mon imagination, de ma paranoïa qui s'exacerbait de minute en minute, mais les paroles de l'adolescente étaient tout sauf innocentes.
Je fis claquer mes ongles sur le comptoir, signe qui trahissait parfaitement ma nervosité croissante. La déloger allait s'avérer plus difficile que prévu. Elle était en train de me défier. Elle me défiait de lui servir de l'alcool alors qu'elle était encore mineure, ou bien de tout plaquer séance tenante pour honorer la promesse que j'avais faite, à savoir, la protéger. c'est la pleine lune. L'urgence se précisait, la situation devenait de plus en plus pressante. Je devais trouver une solution, et rapidement, de préférence. « Ta carte d'identité, s'il te plaît. » C'était à mon tour de la défier. Puisqu'elle était une sorcière venant d'une longue lignée de sorciers, elle n'avait certainement pas de papiers aux normes moldues, ou alors, ils étaient forcément faux. Là encore, je n'avais pas de plan, j'appliquais simplement la procédure. « Je n'ai pas le droit de servir d'alcool aux mineurs. » expliquai-je alors, indiquant du menton l'écriteau qui signalait que la vente d'alcool était interdite aux mineurs, mineurs dont elle faisait partie, aux dernières nouvelles. « Mais peut-être que si tu me prouves que tu as l'âge requis, je te le servirai, ce verre. » c'était à mon tour de la défier, de l'asticoter un peu. C'était de bonne guerre après tout, elle était venue dans mon bar sans doute dans le seul et unique but de foutre en l'air ma couverture. Manque de bol, je ne comptais pas me laisser faire. Je m'accoudai alors au comptoir avec nonchalance, avant de glisser vers elle la carte des boissons – la poser par dessus le livre serait plus exact. « Dans le pire des cas, je peux toujours te proposer des cocktails sans alcool. Ou du jus de fruit. Ou encore...un diabolo menthe, ce genre de choses. » Et alors que je tâchais de rester la plus professionnelle possible, ce qui n'était guère chose aisée en raison de mon angoisse qui montait crescendo, je gardais un œil sur ce livre, ce livre maudit qui avait parfaitement l'allure d'une pomme de discorde. Méfiance, donc. « C'est toi qui choisis. » dis-je doucement, un rictus sarcastique flottant sur mes lèvres. Chacun son tour, après tout. « Alors, jus de fruit ou cocktail sans alcool ? Dis-moi ce que tu veux et je te le préparerai. » Après tout, mélanger du sirop et de l'eau n'avait rien de bien sorcier, c'était même un jeu d'enfant en comparaison à la préparation d'une potion-tue loup, qui requérait des connaissances et une technique très pointues. Cela dit, je jouais quand même à un jeu très dangereux. Je n'avais plus qu'à espérer qu'elle ne me parle pas de la potion tue-loup, auquel cas la conversation semblera vraiment étrange au yeux des simples moldus qui nous entouraient.
≡ son emploi : professeur de sortilèges à poudlard.
≡ statut de sang : sorcier de sang-pur, noble jusqu'au bout des doigts, qui tient à la dignité de sa famille.
≡ sa maison : ancien gryffondor, un choix qu'il n'a jamais particulièrement compris ni accepté, tous les siens finissant normalement chez les serpentards.
≡ sa baguette : bois d'ébène, spécialisation en maléfices, longueur de trente-deux centimètres avec pour centre un ventricule de coeur de dragon.
Sujet: Re: full moon (cersei) Sam 8 Fév - 21:12
darßness will maße you strong.
— CERSEI-JANE V. HARKNESS & TRACEY M. DAVIS —
It's so hard letting go, I'm finally at peace, but it feels wrong. Slow I'm getting up, my hands and feet are weaker than before. And you are folded on the bed where I rest my head, there's nothing I can see. Darkness becomes me. But I'm already there, I'm already there, Wherever there is you, I will be there too. There's nothing that I'd take back, but it's hard to say there's nothing I regret. Cause when I sing, you shout, I breathe out loud. You bleed, we crawled like animals, but when it's over, I'm still awake. A thousand silhouettes dancing on my chest, no matter where I sleep, you are haunting me.
C’était un chemin dangereux vers lequel elle s’engageait en cette soirée, particulièrement lugubre. Cersei marchait sur les traces d’un passé qu’elle ne pouvait plus ignorer, quand bien même l’éviter aurait été la meilleure chose à faire. Non seulement la guerre était finie, avec une défaite écrasante du camp en lequel elle avait placé tous ses espoirs, mais en plus, ses cauchemars à elle ne s’arrêtaient pas là : quand d’autres pouvaient quitter le pays, traverser des frontières pour se construire autre part, il n’y avait pas à douter qu’un loup-garou comme elle n’était désiré nulle part. Pas même au sein de sa propre famille, quand bien même Elwood avait tenté de la convaincre à coup de sourires et de paroles sympathiques : elle ne voulait pas revenir auprès d’eux, elle aurait bien voulu - ça aurait été si facile, à vrai dire - faire ressortir la douce et fragile Cersei, tomber enfin en sanglots afin d’éveiller la sympathie de son cousin. Mais elle n’en était plus là : ce soir, plus que jamais, alors que les humeurs de Cersei lui brûlaient l’esprit, elle se révélait dangereuse, imprévisible ; indigne d’être à proximité de qui que ce soit. Ces instants-là éveillaient chez elle cette colère qui la consumait peu à peu, celle qu’elle éprouvait à l’égard de son père qui avait détruit sa vie, celle qu’elle éprouvait à l’égard de Saireann qui l’avait trahie. A l’égard de Tracey, qui avait été là, la dévisageant, mue sans doute par une certaine curiosité, mais ne daignant guère lever le petit doigt pour lui sauver la vie, à l’instant où l’orgueil de Saireann avait pris le pas sur tout le reste. Les erreurs que la jeune femme avait commises en trahissant le rafleur de la sorte n’avaient pas mérité le châtiment éternel qu’elle porterait avec elle à présent, celui qui l’avait exilée si loin de chez elle : pour s’être jouée de Saireann, afin de survivre, Cersei payait le prix de ne plus jamais pouvoir regarder son cousin dans les yeux, ne plus jamais pouvoir le toucher sans avoir peur de l’assassiner sur place, devenant une bête cruelle et sanguinaire, ce visage par lequel on avait toujours décrit la race à laquelle elle appartenait à l’heure actuelle. C’était dans une autre vie à présent, que le nom même de Fenrir Greyback avait suffi à la faire frissonner d’horreur, maintenant, quand bien même elle n’était pas devenue un Mangemort, elle était comme lui, gardant au fond de ses entrailles une créature incontrôlable et meurtrière. Dans ces nuits où la lune était ronde et pleine, les instincts qui noyaient Cersei se voulaient revanchards, impétueux, grondant au fond de ses tripes comme une bête prête à sauter à la gorge de quelqu’un : c’était de sa haine que se nourrissait le loup qui avait muté dans son sang, cette colère qu’elle n’avait pu s’empêcher de ressentir, quand bien même la doucereuse, aimante jeune élève de Poudlard s’était accrochée à la vie. Si ardemment, que celle-ci l’avait rejetée de la plus brutale manière qui soit, la force d’attraction de la réalité transformant ce coeur si fragile en une pierre indestructible, cette sensibilité si naïve en une tristesse servile. La stupide Cersei qui était sortie de derrière le refuge des ténèbres était bien loin désormais, on n’avait eu, après tout, aucun remord à l’abandonner dans les endroits les plus sombres de ce monde, oubliant volontiers que le monstre qu’elle était devenue avait été créé par cette même guerre que tout le monde cherchait à oublier aujourd’hui. Tracey Davis plus que n’importe qui, terrée parmi les moldus comme une sorcière qui aurait renoncé à son statut pour ne plus jamais être rattrapée par son passé : son passé, cet héritage brûlant, c’était ce que Cersei avait cherché à fuir de toute son âme pendant ses longues périodes de fuite. Mais la confiance aveuglée qu’elle avait placé en Saireann, en Tracey, lui avait tout coûté : en quoi ne serait-il pas légitime de leur rendre la pareille ? Cette tentation de céder à ces monstrueux instincts glissait sans cesse au bord de son esprit, à chaque fois que la lune jaune rendait la bête plus présente, à chaque fois que la petite Cersei mourait un peu plus, étouffée sous l’horreur.
C’était mieux ainsi, son père n’était plus là pour la traquer, et peut-être pouvait-elle espérer que comme Tracey, Saireann soit assez lâche pour se cacher parmi des vermines insignifiantes : à mesure que de tels cheminements de pensée naissaient au creux de l’esprit de la jeune femme, elle tentait de son mieux de les faire taire, ces instincts qui ressemblaient tant à Doezwal, mais il lui semblait de plus en plus impossible de faire taire ses volontés revanchardes. Dans ce monde ou dans un autre, le statut de Cersei ne changerait pas : avec ou sans Voldemort, on la traiterait comme une bête, ce qu’elle était devenue au fond, sans le vouloir bien évidemment, une croix qu’elle porterait pourtant éternellement. Saireann avait jugé son crime à la hauteur d’une telle punition, à croire qu’il s’était placé en juge suprême, l’homme au coeur brisé, s’attachant à la mauvaise personne, comme s’il était le seul à avoir eu plus d’une fois ses sentiments écrasés par l’indifférence. Le sort de Cersei était scellé, condamnée à la fuite pour les temps à venir, à vivre en paria si jamais le Ministère d’autrefois venait à être rétabli : tout comme on avait jeté la pierre à Dumbledore lorsque la vérité sur l’identité du professeur Lupin avait été dévoilée, on jetterait la pierre à toute personne désirant donner une chance à Cersei. Si tant est qu’elle survive aux vagues de chasse intensives qui sévissaient dans tout le pays, dans la Russie, certains coins de l’Europe qui n’étaient plus guère des refuges. Le monde moldu lui-même lui semblait hostile, il accueillait après tout, des traitres comme Tracey, il ne serait presque guère étonnant pour la sorcière de voir débarquer la police magique pour venir la prendre suite à une dénonciation de la sympathique serveuse qui lui faisait face. A maintes reprises déjà, les circonstances lui avaient fait douter de Tracey, de cette mince confiance qu’elle pouvait placer en elle pour lui demander la moindre aide : après tout, elle était de la maison des Serpentard, se répétait-elle, qu’elle soit de sang-mêlé ou de sang-pur, c’était pour une raison. Elle se retrouvait ici malgré tout, à, d’un air désinvolte, défier sa vis-à-vis : à mesure que la nuit s’épaississait, Cersei sentait battre en ses veines le pouvoir incontrôlable du loup, qui éveillait ses sens et rendait chaque instant plus douloureux que le précédent. A cela, elle pouvait presque percevoir les ralentissements dans les palpitations du coeur de Tracey, la façon imperceptible dont son teint avait blanchi : elle pouvait la défier du regard tout autant qu’elle le voulait, c’étaient les secrets de Tracey plus que les siens qui étaient en danger ici. Quand bien même, plus jamais elle ne pourrait revenir auprès de son cousin, retourner à Poudlard ou reprendre la vie qu’elle avait tant chéri, Cersei n’attachait donc aucune importance à sa survie, à sa mort, quelle qu’elle soit. Pourrir au fond d’une cellule à Nurmengard lui avait donné bien des chances de réfléchir, réfléchir encore et encore sur cette condition qui vibrait dans son sang à mesure qu’elle continuait de vivre : elle préférait mourir que de retourner croupir dans ces ténèbres qu’elle avait connus. Finalement, elle s’avérait très similaire à son cousin, ils se ressemblaient, tous les deux habités par ces mêmes expériences dévastatrices qui leur donnaient une vision très pragmatique, des choses. Il était triste après tout, de n’accorder plus la moindre importance à sa vie, à dix-huit ans à peine : un sentiment que Tracey ne pouvait pas comprendre, sinon, elle n’attacherait pas tant d’importance à cette nouvelle vie qu’elle avait construite ici, dans un tout nouvel anonymat. Cersei, quant à elle, resterait toujours Cersei, sans la moindre formule magique ou possibilité d’y échapper, chaque pleine lune se rappellerait à elle, toujours. « Ta carte d'identité, s'il te plaît. Je n'ai pas le droit de servir d'alcool aux mineurs. Mais peut-être que si tu me prouves que tu as l'âge requis, je te le servirai, ce verre. » Avaient déjà dû se faire dans l’esprit de Tracey tout un tas de calculs et de constructions de pensée : elle savait ce qu’était Cersei, lui ayant déjà promis de l’aide qui n’avait finalement guère porté ses fruits. Au moins, l’adolescente avait en elle encore assez de bonne volonté pour bien vouloir donner à Tracey une chance de mieux faire. Il était donc presque curieux de voir la sorcière répondre d’une telle manière à une simple formule de politesse : pour les sorciers, Cersei était majeure, mais depuis bien plus longtemps déjà, on l’avait volontiers abandonnée à devoir survivre par elle-même au beau milieu d’une guerre qui avait déchiré le monde magique. Depuis bien longtemps, les formalités telles que lui demander son âge ne faisaient plus parties de celles auxquelles la jeune femme se cognait, il y avait même certains cas de pubs moldus où on ne lui avait rien demandé. Tracey se montrait revêche, que ce soit dans son attitude ou dans ses paroles, ce qui n’avait rien de surprenant : comme tous les Serpentard, elle était orgueilleuse, certainement déterminée à chasser la gêne que représentait la simple présence de Cersei dans les alentours. Cependant, maintenant qu’elle était vissée sur son tabouret, la rousse ne comptait pas partir de sitôt, advienne que pourra, il était déjà loin le temps où elle avait le moindre remord à voir le monde magique déborder sur celui des moldus.
A la carte des boissons et cocktails sans alcool que lui proposa Tracey, Cersei n’y porta que peu d’attention, son regard froid ne se focalisant qu’entièrement sur la sorcière qui lui faisait face. Finalement, Cersei leva les yeux au ciel, repoussant avec une certaine grâce la sympathique proposition de sa vis-à-vis, lui décrochant un regard quelque peu critique. « Je n’avais pas souvenir que tu étais si procédurière, excuse-moi. » Ses excuses sonnaient faux, elle ne tentait même pas d’avoir un ton aimable, elle se contentait d’être obséquieuse à souhait, l’agacement venant titiller sa bonne volonté bien plus vite qu’à l’accoutumée : pour elle comme pour Tracey, le temps manquait, les minutes s’amenuisaient et les rayons de la lune se faisaient de plus en plus brûlants : sans doute que venir en rampant aurait éveillé la sympathie mièvre de la sorcière qui lui aurait alors tendu une main qu’elle aurait pensé généreuse, mais encore une fois, cette part stupide d’une Cersei trop jeune était morte dans les geôles de Nurmengard, sous la prise des Détraqueurs, au milieu des cauchemars qui avaient déchiré son être là-bas, si loin de chez elle. Le sous-entendu de la sorcière était clair : Tracey n’avait pas été si regardante sur son âge ou sur sa vulnérabilité le jour où elle avait laissé Saireann la trahir, le jour où ils l’avaient tous les deux abandonnée aux griffes de son père. « Ce n’était pas vraiment dans l’habitude des gardiens de Nurmengard de demander ma carte d’identité. » A nouveau avec une indifférence mesurée, Cersei balaya le comptoir d’un geste du bras, écartant à côté d’elle le livre qu’elle avait posé si discrètement juste sous le nez de Tracey. A présent, elle occupait dignement deux places à elle toute seule, et l’ouvrage de magie s’imposait dignement pour attirer l’attention : au coin de son champ de vision, Cersei crut deviner d’ailleurs un regard graviter dans leur direction. Elle tira de sa poche quelques billets moldus et les déposa devant son interlocutrice : « Il y a des chances que je puisse manger ou alors il y a aussi une politique concernant la nourriture ? » Leurs retrouvailles ne sonnaient définitivement pas doucereuses et enchantées, à ses souvenirs, Tracey avait été plus encline à l’aider la dernière fois qu’elle était venue, revêtant à cette époque l’apparence de la jeune fille paumée et désespérée : Tracey préférait sans doute s’élever au rang de bon dieu aidant les défavorisés, pourtant, depuis bien longtemps déjà Cersei avait appris que ce n’était plus ainsi qu’elle devait s’afficher pour ne plus avoir à subir la moindre traitrise.
Invité
Invité
Sujet: Re: full moon (cersei) Ven 14 Mar - 20:31
Peut-être qu'au final, le moment où j'aurai à payer pour mes crimes venait d'être avancé. Mon juge prenait les traits de Cersei Jane, cette pauvre gamine qui n'avait jamais rien demandé à personne et qui pourtant se transformait tous les mois en une bête hideuse, assoiffée de sang, dont les pulsions meurtrières éclipsaient tout le reste et surtout, son humanité. Pourtant, je ne me sentais pas réellement concernée par ce qui lui était arrivé. Je persistais à croire que ce n'était pas de ma faute, après tout, je n'étais pas celle qui l'avait mordue. Certes, j'avais échoué dans toutes mes tentatives d'enrayer ce phénomène dévastateur, mais pouvait-on m'en vouloir ? J'étais jeune après tout, inexpérimentée, preuve en est, je n'avais même pas passé mes ASPIC. Comment pouvait-on me blâmer d'avoir lamentablement foiré ? Ce n'était pas faute d'avoir essayé, pourtant. Oui mais voilà, dans l'esprit de la rousse, cela devait revenir au même. J'avais promis de la protéger. C'était le sens même du serment inviolable qui m'unissait à Saireann, serment qu'elle avait scellé elle-même. À l'époque, si j'avais accepté de me lier au rafleur de cette façon, c'était d'une part pour évincer un ennemi potentiel mais aussi, d'autre part, pour qu'il me garantisse qu'il ne ramènerait pas cette gamine à son père. J'avais promis, j'avais mis la vie de Saireann en risque pour cela et je n'avais pas respecté ma promesse jusqu'au bout. Elle devait avoir une bien haute opinion de moi à présent. Elle devait probablement se dire que ma parole ne valait pas grand-chose, qu'au final, je représentais plutôt bien la maison dans laquelle le Choixpeau m'avait répartie au tout début de ma scolarité. Je toisais ma nemesis d'un regard froid, implacable, empreint d'une dureté qui n'avait rien d'exceptionnel lorsque l'on me connaissait bien. Sous quelle forme mon châtiment allait-il donc se présenter ? Allait-elle engendrer un carnage dans ce bar pour me montrer à quel point j'étais impuissante, que de toute évidence, je n'étais guère douée pour protéger les autres et surtout les plus faibles que moi ? Allait-elle au contraire choisir une punition bien plus personnelle afin de me marquer au fer rouge, pour me faire payer les dommages qu'elle avait subis du seul fait de ma négligence ? Ou au contraire, allait-elle me forcer à sortir de ma zone de confort pour me faire renouer avec un passé dont je ne voulais plus jamais entendre parler, à savoir, mon passé de sorcière ? Elle m'incitait à faire un choix en me poussant dans mes derniers retranchements. Je n'avais pas le temps de réfléchir aux tenants et aux aboutissants d'une quelconque décision, je devais agir vite et bien. Suffisamment rapidement, en tout cas pour que personne ne se doute de rien ou pire, soit blessé dans l'opération.
Mon but n'était pas de faire des vagues. Il ne fallait pas non plus que l'existence du monde magique soit révélée au grand jour à cause de la survenance de tels événements. Une telle révélation serait désastreuse, surtout en des temps aussi troublés. La guerre ne pouvait pas s'étendre non plus chez les moldus. Ce n'était pas mon but lorsque je suis venue me planquer ici. Mon but était simplement de me faire oublier. Tout ce temps, j'avais espéré obtenir ma rédemption. Pourtant, il semblerait que les traîtres ne méritaient pas le pardon. En dépit de tout cela, je pouvais prétendre être une personne honorable. C'était ce qui avait fait la différence avec les autres pendant toutes les années passées à Poudlard. La guerre m'avait-elle fait perdre cette qualité, faisant de moi ce monstre dénué d'empathie face à tant de misère ? Ma vraie nature, au final, était revenue prendre le dessus : dans le fond, j'étais égoïste, à l'image de la princesse capricieuse et tyrannique que j'avais été depuis mon plus jeune âge. J'avais toujours fait le monde à ma façon, me montrant intransigeante et rigide, voire même impitoyable. Faire dans la charité n'avait jamais été dans mes habitudes. Pourquoi cela changerait-il maintenant ? Pourquoi j'en viendrais soudainement à me préoccuper des âmes en peine ? Cersei n'avait été qu'un instrument dans ma propre lutte, dans ma propre vendetta. Depuis le début de la guerre, je n'avais jamais cessé de servir mes propres intérêts. Je l'avais déplacée comme un pion sur mon échiquier pour faire échec au roi – Saireann en l'occurrence. À présent, je ne contrôlais plus rien. Tout avait dérapé, devenant hors de contrôle. Par lâcheté, par égoïsme, j'avais abandonné le champ de bataille, laissant mon propre bataillon exsangue, en pleine débandade. En tant que déserteuse accomplie, j'avais été capturée et emprisonnée, j'avais échappé à la guillotine de peu. À présent que j'étais exilée, la gamine venait réclamer son dû, non sans venir me provoquer sur mon propre territoire.« Je n’avais pas souvenir que tu étais si procédurière, excuse-moi. » un sourire aigre vint étirer mes lèvres. Oh, bien sûr, je n'avais jamais été très orthodoxe dans ma façon de faire les choses, j'étais plutôt brutale et peu soucieuse du protocole, lesquels me semblaient obsolètes au regard de l'urgence suscitée par les temps qui courent. Malgré tout, je ne tenais pas à attirer l'attention, encore moins à faire d'esclandres. Pour une fois, il fallait faire les choses proprement, sans bavures.
Ça n'allait pas être évident dans la mesure où l'agitation de Cersei avait déjà attiré le regard de plusieurs personnes. Il y avait ce gars un peu plus loin, assis sur ce tabouret, qui semblait intéressé par le livre que Cersei avait mis bien en évidence. Il suffit d'un regard noir de ma part pour qu'il détourne la tête et retourne à son verre, après tout, il n'avait pas à écouter notre conversation, cela ne le regardait pas. De mon côté, je choisis de vouer une indifférence profonde envers le bouquin. Mon attitude serait bien plus suspecte si je le regardais comme s'il s'agissait d'une bombe prête à exploser. « Ce n’était pas vraiment dans l’habitude des gardiens de Nurmengard de demander ma carte d’identité. » Bien sûr. Eux ne se préoccupaient pas vraiment des personnes qu'ils balançaient aux cachots. Tous étaient à mettre dans le même panier. Moi-même quand j'avais été enfermée à Azkaban, le Ministère ne s'était pas préoccupé de l'âge que j'avais, le seul fait que j'avais commis des crimes avait suffi à me faire enfermer. « Moi non plus ils n'ont pas été regardants sur mon âge au moment où ils m'ont jugée. » glissai-je avec une certaine ironie, suffisamment bas pour qu'elle seule puisse l'entendre. « Cependant, tous ces gens ne savent pas qui nous sommes, ce que nous avons fait, ils ne connaissent rien de nos lois mais moi je connais les leurs et il n'y aura pas de passe-droit. » Ce monde, c'était aussi le mien, c'était celui dans lequel j'avais grandi. Ma mère en était même issue. Mon père quant à lui avait eu exactement la même attitude que moi : quand les problèmes avaient commencé à pointer le bout de leur nez, il s'était terré chez les moldus pour se faire oublier. L'adage tel père telle fille se vérifiait parfaitement. Je l'avais blâmé pendant des années de m'avoir caché ma vraie nature mais au final j'agissais exactement de la même façon que lui, tout portait à croire que c'était inscrit dans mes gênes. « Il y a des chances que je puisse manger ou alors il y a aussi une politique concernant la nourriture ? » De mauvaise grâce, je regardai les billets qu'elle me tendait, sans toutefois m'en emparer. « Je suppose que c'est possible, tant que ça n'implique pas de la chair humaine. » c'était probablement une blague de très mauvais goût, d'ailleurs, je n'étais même pas sûre que ça en soit réellement une, mais peu importait, nous n'étions pas là pour causer rhétorique. « En vrai, qu'est-ce que tu veux ? » demandai-je assez âprement, en plantant mon regard dans le sien. « Je doute que tu sois venue ici chez moi pour une simple visite de courtoisie. Si tu cherches Saireann, je suis désolée, mais je ne l'ai pas vu depuis des mois, depuis que j'ai été enfermée à Azkaban en réalité. Qui sait, il est peut-être mort à l'heure qu'il est. » Mensonge, mensonge, mensonge. Bien sûr que oui Saireann était encore en vie, même qu'il était déjà venu me voir à plusieurs reprises et il m'avait même aidée à me débarrasser de Sahan. Cela étant, ce n'était probablement pas Saireann qu'elle cherchait, sinon, elle ne serait pas venue me voir moi. « Allons, tu t'en fiches comme d'une guigne de l'alcool, ou de la bouffe, qu'est-ce que tu veux, Cersei, que suis-je censée faire pour toi depuis le fin fond de mon trou à rats ? » J'émis un rire légèrement sardonique. Tout de suite, je ne dirais pas non à un autre shooter. Je me détournai d'elle et m'emparai de la bouteille. Je versai un fond de vodka dans un petit récipient, avant de le vider cul sec. Un peu de courage, bon sang. « Je n'ai plus pratiqué la magie depuis des mois. Dans la mesure où j'ai accepté de me soumettre à la trace, c'est plus prudent. Comme ça, je disparais, totalement, sans laisser la possibilité au Ministère de me pister comme les chiens qu'ils sont. D'ailleurs, tu as une petite mine, tu devrais prendre l'air, je suis sûre que ça te ferait du bien. » C'était un conseil bien dérisoire que je venais de lui donner, surtout lorsqu'on savait que c'était précisément ce qu'il y avait dehors qui lui faisait du tort. Dans tous les cas, elle était prévenue, la magie ne faisait plus partie de ma vie désormais, je ne voulais plus qu'elle fasse partie de ma vie, elle avait détruit trop de choses autour de moi, elle me faisait même peur.
≡ son emploi : professeur de sortilèges à poudlard.
≡ statut de sang : sorcier de sang-pur, noble jusqu'au bout des doigts, qui tient à la dignité de sa famille.
≡ sa maison : ancien gryffondor, un choix qu'il n'a jamais particulièrement compris ni accepté, tous les siens finissant normalement chez les serpentards.
≡ sa baguette : bois d'ébène, spécialisation en maléfices, longueur de trente-deux centimètres avec pour centre un ventricule de coeur de dragon.
Sujet: Re: full moon (cersei) Sam 29 Mar - 2:48
darßness will maße you strong.
— CERSEI-JANE V. HARKNESS & TRACEY M. DAVIS —
It's so hard letting go, I'm finally at peace, but it feels wrong. Slow I'm getting up, my hands and feet are weaker than before. And you are folded on the bed where I rest my head, there's nothing I can see. Darkness becomes me. But I'm already there, I'm already there, Wherever there is you, I will be there too. There's nothing that I'd take back, but it's hard to say there's nothing I regret. Cause when I sing, you shout, I breathe out loud. You bleed, we crawled like animals, but when it's over, I'm still awake. A thousand silhouettes dancing on my chest, no matter where I sleep, you are haunting me.
Si ses pas l’avaient amenée jusqu’ici, ce n’était pas pour combler un urgent besoin d’aide - pas de l’aide comme Tracey devait se l’imaginer : n’importe qui se soucierait sans doute plus des vies à sauver avec une potion Tue-Loup, c’était ce qui rendait les loups-garous si mal vus dans la société sorcière, que ce soit sous ce Nouveau Régime ou sous l’ancien. Cersei avait déjà depuis bien longtemps perdu de vue les potentielles victimes humaines qu’elle pouvait faire sur sa voie : de ses nuits de transformation, elle ne gardait généralement peu de souvenirs. Personne ne pouvait vraiment prétendre comprendre ce qu’était la transformation en loup avant d’en connaître une, et aucun cours de Poudlard ne préparait à de telles extrémités. Les nuits de pleine lune, Cersei les passait généralement à obéir à ses sens uniquement : ce qui lui revenait surtout en mémoire lorsqu’elle essayait d’y repenser, c’étaient ces instincts se bousculant en elle à toute vitesse, le besoin de courir, de hurler, les bruits qui se faisaient si vivaces à ses oreilles, des images totalement nettes à ses yeux, quand bien même la nuit était noire et épaisse. Elle s’était souvent réveillée avec des traces de sang sur les mains - son propre sang au départ, lorsqu’elle avait essayé de s’entraver pour sauver des vies, ainsi qu’à Nurmengard, où on l’avait volontiers laissée s’auto-mutiler quand elle se transformait. Le sang d’autres créatures sans doute depuis, peut-être des animaux, espérait-elle sans cesse, peut-être autre chose : au fond, était-elle devenue sans âme à ne que peu se préoccuper de tous ceux qu’elle laissait sur son sillage quand elle se transformait en bête ? Ces cadavres n’étaient qu’à peine les siens, ils étaient ceux que son père l’avait forcée à tuer, le jour où il avait décidé de la transformer en loup-garou. Ces mots planaient tout autant sur la conscience de Saireann et de sa chère amie Tracey que sur la sienne : c’étaient du moins, les bonnes paroles haineuses et coléreuses que Cersei aimait se répéter lorsqu’elle y pensait, dans ses longues nuits de solitude. Parfois, son cerveau faisait tout le boulot pour elle, alors que ses nuits de sommeil se retrouvaient agités par des rêves créés de toute pièce par son imagination, où elle se voyait comme une bête féroce tranchant des cous et dévorant des êtres humains. Se torturer était quelque chose que Cersei savait parfaitement bien faire à présent ; elle avait remué tant de remords, tant de rancoeurs dans ses longues périodes d’exil, dans ses geôles à Nurmengard, qu’elle avait sans doute fait elle-même le tour de tous les crimes qu’elle avait pu commettre. Dans le monde actuel, le pire qu’elle ait commis, c’était de ne pas avoir su se défendre lorsqu’un loup-garou fou s’était jeté sur elle et l’avait mordue : elle aurait presque préféré mourir des suites de cette blessure plutôt que de survivre telle qu’elle était à présent. Pourtant, le destin s’avérait être bien ironique, et si le sort avait décidé de la faire survivre, elle osait espérer que ce soit pour une autre raison que celle de faire durer encore ses souffrances plus longtemps. Peut-être était-ce une once de désespoir qui l’amenait ici, quand bien même aucune faiblesse ne trahissait ni son regard ni les traits de son visage : elle savait que les Exécuteurs étaient encore plus présents ici qu’ailleurs, dans la capitale du monde sorcier britannique. Elle ne pouvait pas se permettre de perdre le contrôle en se transformant : c’était généralement en cette période de la nuit que les Exécuteurs étaient envoyés pour chasser les pauvres fous qui ne savaient pas se maîtriser. Pour contrer ça, Cersei avait déjà essayé maintes fois de réalisé elle-même la potion, elle avait même emprunté cet ouvrage dans la librairie de son cousin, il fallait croire qu’elle devait encore ramper pour demander l’aumône à quelqu’un, ce qui, rien qu’en soit, l’exaspérait plus que de mesure. Pouvait-elle faire confiance à Tracey, ses opinions oscillaient sans cesse sur cette idée : Saireann l’avait, après tout présentée comme une gentille fugitive, pauvre née-moldue prête à l’aider. Tout ça, avant de la doubler, la jeter en pâture à son père et l’abandonner là, à un sort bien plus détestable que ce qu’elle aurait cru.
A cet instant, alors que ses yeux clairs n’avaient de cesse d’inspecter Tracey, Cersei n’était pas encore sure quant à l’issue de ses pensées : le temps pressait, pour elle tout autant que pour la jeune sorcière qui se faisait passer pour une simple serveuse. D’ici peu, la lune serait à son zénith, et les choses deviendraient bien plus compliquées : plus encore qu’être une menace pour les gentils et innocents clients autour d’eux, Cersei deviendrait une menace pour elles deux, rameutant tous les Exécuteurs à proximité, sur elle mais à la fois sur Tracey la fugitive. Finalement, elles avaient tout à gagner d’un commun accord, restait que Cersei se retrouvait incapable de regarder son interlocutrice et de ne plus avoir le moindre doute : déjà la jeune femme l’avait trahie à quelques reprises, et elle ne semblait pas regretter tant que ça son geste, à voir la désinvolture avec laquelle elle agissait. Si la haine de Cersei était un tant soit peu bien placée, Tracey n’avait cependant aucune raison de se montrer hostile envers cette visiteuse inattendue... pour le moment, en tout cas. Leur tête à tête pouvait bien finir par n’être que ça, un tête à tête, dont le noeud du problème finirait par se défaire de lui-même, si elles consentaient toutes les deux à lâcher du leste. Mais ce que les maisons de Serpentard et de Serdaigle avaient en commun, c’était le profond orgueil de leurs fondateurs, un trait de caractère qui semblait se transmettre dans chacun des élèves qui les composaient. « Moi non plus ils n'ont pas été regardants sur mon âge au moment où ils m'ont jugée. » Indécise, la rousse arqua un sourcil, une question lui brûlant subitement les lèvres : dans ce cas, croire en Saireann lui avait coûté à elle aussi ? Finalement, il était bien ce qu’il avait toujours semblé être... un rafleur, guère plus, guère moins. « Cependant, tous ces gens ne savent pas qui nous sommes, ce que nous avons fait, ils ne connaissent rien de nos lois mais moi je connais les leurs et il n'y aura pas de passe-droit. » Quelques choses dans le caractère de Tracey rappelait à la jeune adolescente sa cousine, Sansa la peste, qui avait toujours la langue acérée et les mots qu’il fallait pour blesser. Tracey n’avait pas plus de finesse que Sansa pour ce qui était d’avoir les mots tranchants, aussi, alors qu’elle était bien facilement intimidée par sa cousine, Cersei eut un sourire mutin, avant de se pencher vers Tracey. « Bah, j’ai fait faire mes papiers russes, mais je viens tout juste d’arriver en Angleterre, alors tu sais... il faut un certain temps. » Dans le monde moldu russe, personne ne lui avait posé de question lorsqu’elle avait demandé à ce qu’on lui serve un verre d’alcool : la plupart du temps, on l’avait dévisagée, espérant sans doute qu’elle s’évanouisse à force d’être ivre pour qu’ils puissent faire ce qu’ils veulent avec elle - pourtant, être un loup-garou semblait avoir aidé sur ce point, elle résistait plutôt bien à l’alcool, quand bien même elle avait toujours été une adolescente douce et candide qui n’avait jamais touché à ça. La vie avait bien changé maintenant, et Cersei avait bien dû s’adapter pour survivre, heureusement pour elle, elle n’avait pas toujours été confrontée à des êtres aussi frigides que Tracey, sans quoi, elle n’aurait jamais pu boire ni manger. Manger n’était d’ailleurs pas quelque chose qu’elle avait l’habitude de faire les soirs de pleine lune, tant son estomac se nouait dans tous les sens, mais histoire de ne pas perdre le nord, elle enchaîna sur cette idée, guère surprise par les premières réponses de son interlocutrice. Elle leva donc les yeux au ciel, ignorant l’insulte : elle s’était déjà flagellée de toutes les manières possibles pour être devenue celle qu’elle était à présent, et on pouvait presque croire à présent que Cersei avait bien accepté sa misérable condition de bête sauvage. Ce n’était qu’une façade, qui ne se craquelait que lorsque les périodes de solitude se faisaient trop longues, lorsqu’elle n’avait pas à prétendre. « En vrai, qu'est-ce que tu veux ? » Un air innocent passant sur son visage, la jeune Serdaigle dévisageant Tracey comme si elle l’avait offensée. « Je doute que tu sois venue ici chez moi pour une simple visite de courtoisie. Si tu cherches Saireann, je suis désolée, mais je ne l'ai pas vu depuis des mois, depuis que j'ai été enfermée à Azkaban en réalité. Qui sait, il est peut-être mort à l'heure qu'il est. » Son regard s’assombrit au nom de Saireann : pourquoi le chercherait-elle ? Tracey la pensait-elle assez idiote pour se jeter aux pieds de la même personne qui l’avait condamnée à tant de misère ? La seule raison qui pourrait la pousser à retrouver Saireann, c’était l’envie de lui arracher la tête, qui brûlait au fond de ses entrailles à chaque fois qu’elle se repassait cette scène de faiblesse où elle avait cédé à ses stupides paroles. Tracey continua de débiter quelques flots de parole, mais ils coulèrent sur Cersei comme de l’eau sur une roche, contre le marbre qui englobait son coeur à chaque fois qu’on le refroidissait si brutalement : personne ne pouvait comprendre ce qu’elle avait placé entre les mains de Saireann, sous l’apparence de Marianne ou ce soir-là, quand elle avait décidé de le croire. Personne, surtout pas cette petite arrogante en face d’elle. Sans crier gare, la main de Cersei vint se poser sur le bras de Tracey, enserrant la chair de son bras entre ses ongles : sous la pulpe de ses doigts, elle sentit le sang de Tracey battre dans ses veines au rythme de son coeur. Elle avait peur. Elle était en colère. Et elle débitait des mensonges plus vite qu’il n’était possible d’en dire. Et la main de Cersei écrasa plus encore la peau de la brune alors que mille sensations se bousculaient dans sa tête, ses yeux dévisageant la Serpentard, inspectant son regard, tandis que d’un simple toucher, filtraient plus d’émotions qu’on ne pourrait le croire. Finalement, elle cilla, reprenant le cours de la réalité, Cersei la relâcha, contrite : la nuit avançait vite, déjà les odeurs se faisaient plus hostiles à son nez, les sons moins délicats à ses oreilles. Mais elle ne voulut pas perdre le nord. « J’ai assez pris l’air, crois-moi. » Articula-t-elle finalement, ne pouvant retenir son attitude de replis, serrant ses bras contre sa poitrine. « Pour avoir scellé le Serment Inviolable qui te lie à Saireann, je ne suis pas stupide. Je sais qu’il est vivant, sinon tu ne serais pas là, à prétendre être quelqu’un que tu n’es pas : tu te contentes de faire la serveuse parce que tu sais qu’il accourra au moindre problème. Mais je crois bien que tu n’as pas rempli ta part du marché. » Elle arqua un sourcil, elle en était la preuve vivante (ou semi-vivante). Si Tracey pouvait se permettre de faire des sarcasmes sur la chair humaine, la pleine lune et la mine désastreuse de Cersei, c’était bien parce qu’elle n’avait pas su respecter les promesses qu’elle avait faites sous la baguette de la sorcière. « Pour toutes les fois où cet imbécile t’a sauvé la vie pendant que tu jouais les moldues, tu m’en dois une. » Finit-elle d’un ton tranchant, ramenant le livre entre elles-deux : ses intentions étaient plutôt claires, et vraiment honorables en soit. Si elle avalait la potion, elle ne blesserait des gens que si elle le désirait, irrémédiablement, en l’aidant, Tracey sauverait des vies, elle qui aimait tant faire ça. Ou promettre de le faire, en tout cas.
Invité
Invité
Sujet: Re: full moon (cersei) Lun 7 Avr - 22:21
L'alcool commençait à produire ses effets. Je n'avais plus les idées aussi claires, tout se mélangeait dans ma tête. J'avais du mal à assimiler les informations qui me parvenaient jusqu'alors. Sur un coup de tête, j'avais décidé de confronter Cersei. S'il n'y avait plus de temps à perdre, alors il fallait agir vite, chaque minute était précieuse et chaque instant supplémentaire passé en ces lieux devenait davantage périlleux non seulement pour mes collègues, mais aussi pour les simples consommateurs. Ils n'avaient aucune espèce d'idée de ce qui était en train de se tramer juste sous leurs yeux. Au mieux, ils songeraient à une illuminée tout juste échappée de l'asile psychiatrique. En effet, dans leur monde, personne de suffisamment sain d'esprit ne se promenaient avec de tels artefacts. De plus, si on s'approchait encore un peu, on pourrait y voir la démence briller au fond du regard de Cersei-Jane. Ne pas attirer l'attention. C'était ce que je m'efforçais de faire depuis tout à l'heure, car les conséquences seraient regrettables, pour elle comme pour moi. Je n'avais aucune envie de voir la police débarquer pour faire interner d'office la sorcière. Nous savions toutes les deux que si cela devait arriver, un carnage sans nom s'en poursuivrait. Les maigres moyens des moldus pour entraver les malades seraient insuffisants pour retenir la bête qui grondait en elle. De toute évidence, ils n'étaient en rien parés pour faire face à des menaces surnaturelles, simplement parce qu'ils s'imaginaient même pas que ça puisse exister. Les moldus avaient cette fâcheuse tendance à jouer les autruches. Ils refusaient sciemment de voir ce qu'il y avait pourtant juste sous leurs yeux. Lorsque par le plus grand des hasards ils étaient confrontés à de tels phénomènes, ils préféraient croire à une hallucination – ou une hystérie collective si c'était à plus grande échelle. Ils préféraient tout simplement plaider la folie plutôt que d'admettre qu'une telle chose soit réelle. Cela pouvait se comprendre aisément, de tout temps, l'homme avait eu besoin de se rassurer en créant des dieux, des allégories pour expliquer telle ou telle chose. Il fallait simplement le voir pour le croire. Quoiqu'il en soit, à cause de Saireann, je m'étais retrouvée à être la babysitter d'une jeune louve, à haut potentiel meurtrier. Je me souvenais très bien du jour où il avait sollicité mon aide, dans cette forêt. J'avais essayé de lui fausser compagnie plusieurs fois mais il m'avait toujours rattrapée, peu disposer à laisser tomber cette idée saugrenue qu'il avait derrière la tête : peut-être que moi je saurais comment m'y prendre avec elle. Lorsque j'y pensais, j'aurais mieux fait de refuser. Non seulement je n'aurais pas eu affaire au rafleur plus que nécessaire, mais en plus je n'aurais jamais eu cette gamine dans les pattes. Si nous étions dans cette situation à l'heure actuelle, c'était clairement de la faute de l'irlandais et pas de la mienne. Je n'aurais jamais dû accepter de l'aider à retrouver Cersei-Jane. J'aurais dû le laisser se démerder avec ses problèmes. Cela m'apprendra à avoir eu de la pitié pour ce pauvre type. La pitié n'apportait jamais rien de bon de toute façon. D'ailleurs, en parlant de lui, était-il au courant de ce que Cersei-Jane était devenue par sa faute ? Était-il au courant que c'était parce qu'il avait commis la connerie de l'emmener chez son père qu'elle s'était fait mordre par un taré et que dès lors sa vie avait changé ? Non, il ne le savait pas, et pourtant, c'était moi qui en ce moment me retrouvais dans les emmerdes jusqu'au cou, à devoir gérer une bombe à retardement prête à exploser.
En cet instant précis, mon ressentiment envers l'irlandais était palpable. Ce n'était même pas après Cersei-Jane que j'en avais, c'était ça le pire. Au final, elle n'était que l'avatar de ma propre colère, de mes propres vicissitudes. Elle n'y était pour rien dans toute cette mascarade, elle n'avait été qu'un dommage collatéral. M'en sentais-je coupable pour autant ? Absolument pas. À mon sens, j'avais fait ce qu'il fallait pour l'aider, avec mes maigres moyens. Je retins à grand peine un ricanement cynique de s'échapper de mes lèvres. Pour solliciter mon aide, l'aide d'une fille plus jeune que lui de toute évidence, Saireann devait vraiment être au bout du rouleau. En plus, il ne me faisait même pas confiance. C'était absurde, tellement absurde. Il aurait dû faire confiance à quelqu'un qu'il côtoyait régulièrement et appréciait un minimum plutôt que de se fier à une fille qu'il ne pouvait pas encadrer. Pour le coup, je ne saisissais pas la logique de la chose, simplement parce qu'il n'y en avait pas. Sans doute sous l'influence de l'alcool, ma colère monta d'un cran. C'était lui qui aurait dû gérer tout ce merdier, pas moi. Moi, je n'aspirais qu'à une vie tranquille, loin de ce qui avait été mon enfer personnel. J'avais renoncé à la magie, le message était pourtant clair, non ? Alors, pourquoi n'était-il pas rentré dans les mœurs ? Ce n'était pas comme si j'étais une grosse perte pour le monde magique en plus. Le nouveau régime a eu bien des occasions de me montrer à quel point je n'étais rien, rien du tout. Ils m'avaient traitée comme de la merde, déniant mon humanité. Je n'étais même pas une personne, à leurs yeux, je ne méritais pas d'être considérée comme telle. Je n'étais qu'un traître, une menace et il fallait me traiter comme telle. Ils n'hésiteraient pas une seule seconde à m'éradiquer en cas de besoin, voilà pourquoi je m'étais efforcée de rester à l'écart de tout ça. Il s'agissait simplement de ne pas s'attirer plus d'emmerdes que nécessaire...mais les emmerdes savaient bien où me trouver apparemment, cela ne faisait aucun doute. Je ne cillai même pas lorsque Cersei agrippa mon bras sans aucune délicatesse. Personne ne pouvait se douter qu'un être si fragile en apparence puisse être doté d'une telle force, et pourtant je sentais presque ses ongles labourer ma chair. Je ne savais pas si c'était à cause de l'alcool qui empoisonnait mon système ou bien si c'était parce que j'étais totalement déconnectée du monde extérieur mais je ne ressentais pas la douleur, c'était comme si j'avais été privée de toutes mes sensations. Au final, peut-être que je n'étais même plus humaine, comme on pouvait s'en douter, la prison m'avait flinguée et pas qu'un peu. Je ne ressemblais en rien à la Tracey que j'étais auparavant. Nous n'avions plus rien en commun. « J’ai assez pris l’air, crois-moi. » du coin de l'oeil, je surveillais ses faits et gestes. Elle paraissait tellement fragile en ce moment, tellement démunie. Elle aussi avait été sacrément amochée. Combien d'autres étaient dans le même état ? Trop, pour que cela puisse être supportable. Je ne détournai cependant pas le regard de cette vision, laquelle aurait dû provoquer en moi une certaine empathie, mais dans la mesure où j'en étais complètement dépourvue, cela n'arriva pas. « Pour avoir scellé le Serment Inviolable qui te lie à Saireann, je ne suis pas stupide. Je sais qu’il est vivant, sinon tu ne serais pas là, à prétendre être quelqu’un que tu n’es pas : tu te contentes de faire la serveuse parce que tu sais qu’il accourra au moindre problème. Mais je crois bien que tu n’as pas rempli ta part du marché. » Ma joue tiqua. Cependant, elle se trompait. Je ne me contentais pas de jouer les serveuses comme elle le disait si bien. Comme tout à chacun, j'essayais de mener ma propre vie de la meilleure façon possible. Mon plus grand souhait était de mener une vie normale autant que faire se peut, loin de la magie et de ses dangers. Je n'avais pas réellement choisi d'être serveuse, ça s'était en quelques sortes imposé à moi. En même temps, vu que je n'avais pas passé mes ASPIC, je ne pouvais pas faire grand-chose d'autre. J'aurais pu rester à Poudlard, mais j'aurais préféré mourir plutôt que d'y rester ne serait-ce qu'une minute de plus. « Pour toutes les fois où cet imbécile t’a sauvé la vie pendant que tu jouais les moldues, tu m’en dois une. » Je m'esclaffai. C'était un rire sans aucune joie, sans aucune sympathie. C'était un rire plutôt moqueur, empli de cynisme. « Tu penses vraiment que je n'ai pas honoré ma part du marché, hein ? » demandai-je une fois l'instant d'hilarité passé, soudainement redevenue très sérieuse. « Mais quelle part du marché au juste ? Je ne pense pas avoir été malhonnête avec toi. Je n'ai jamais garanti pouvoir réaliser cette foutue potion. Au contraire, je me souviens bien d'avoir dit que dans la mesure où c'était un breuvage compliqué, qui requérait beaucoup de compétences techniques que je n'avais pas parce que je n'ai jamais passé mes ASPIC, je n'étais même pas certaine d'y arriver. Alors non, je ne vois pas où j'ai pu faillir à ma promesse. » Mon ton s'était asséché mot après mot, tandis que mon agacement montait crescendo. « Cependant, nous nous accordons sur un même point : c'est Saireann la source de nos problèmes. Parce que tu vois, lui aussi n'a pas tenu ses engagements envers moi. J'ai noué ce serment inviolable pour assurer mes arrières et éliminer un ennemi potentiel, et selon les termes de ce serment, il était censé me protéger. Or, s'il avait fait son taf comme il faut, je n'aurais jamais été enfermée à Azkaban et je pense que cette douleur qui lui déchire les entrailles de temps à autres n'est qu'une juste rétribution pour tous les tourments que j'ai endurés parce qu'il a lamentablement foiré. » La colère brillait à présent au fond de mon regard si sombre. Le rouge m'était monté aux joues tandis que mon sang pulsait dans mes veines. Je plantai mon regard dans celui de la rousse et esquissai un sourire sardonique. « Alors oui, peut-être qu'en fin de compte j'ai menti, ça se pourrait fort bien, même. » je levai les yeux au ciel. « J'ai ptêtre revu Saireann plusieurs fois depuis que je suis sortie de prison, mais sois tranquille, je ne lui ai jamais rien dit de notre petit secret. Autrement dit, je crois qu'il nous a bien entubées toutes les deux, dans la mesure où il m'a confiée ta protection et il s'est tiré ensuite pour ne plus avoir d'emmerdes. Maintenant, c'est moi qui ai hérité des emmerdes en question, et en attendant, il se la coule douce pendant que nous pataugeons dans une merde noire. » Santé mimai-je en faisant semblant de lever un verre imaginaire en un geste parfaitement ironique. Je m'accoudai ensuite au comptoir, appuyant ma joue contre ma main, avant de me mettre à pianoter sur le bois lustré avec nonchalance. « Pourtant, je ne suis pas une mauvaise personne. J'ai un abri à te proposer pour cette nuit. C'est un peu loin d'ici, mais...ça devrait faire l'affaire. C'est la maison de mes parents. Je n'y ai pas remis les pieds depuis qu'ils ont été assassinés par les Mangemorts. » Mon regard se fit fort lointain tandis que les souvenirs de ce jour ô combien désagréable me revenaient en mémoire. Je frissonnai lorsque l'image de leur corps mutilés me passa devant les yeux. Je me mordillai la lèvre inférieure. « Elle n'a plus servi depuis un bail, alors autant qu'elle soit utile à quelqu'un. En plus, pas mal de mes artefacts magiques sont restés là bas, alors, peut-être qu'éventuellement je pourrais m'atteler à la préparation de cette potion, même si de toute évidence, j'ai perdu la main alors je ne garantis pas le résultat. » je toisai à nouveau la rouquine, guettant une quelconque réponse de sa part. En fait, elle avait tout intérêt à accepter mon offre, fut-elle présentée de façon si peu orthodoxe. Le temps presse, comme elle disait si bien.
≡ son emploi : professeur de sortilèges à poudlard.
≡ statut de sang : sorcier de sang-pur, noble jusqu'au bout des doigts, qui tient à la dignité de sa famille.
≡ sa maison : ancien gryffondor, un choix qu'il n'a jamais particulièrement compris ni accepté, tous les siens finissant normalement chez les serpentards.
≡ sa baguette : bois d'ébène, spécialisation en maléfices, longueur de trente-deux centimètres avec pour centre un ventricule de coeur de dragon.
Sujet: Re: full moon (cersei) Jeu 10 Avr - 0:44
darßness will maße you strong.
— CERSEI-JANE V. HARKNESS & TRACEY M. DAVIS —
It's so hard letting go, I'm finally at peace, but it feels wrong. Slow I'm getting up, my hands and feet are weaker than before. And you are folded on the bed where I rest my head, there's nothing I can see. Darkness becomes me. But I'm already there, I'm already there, Wherever there is you, I will be there too. There's nothing that I'd take back, but it's hard to say there's nothing I regret. Cause when I sing, you shout, I breathe out loud. You bleed, we crawled like animals, but when it's over, I'm still awake. A thousand silhouettes dancing on my chest, no matter where I sleep, you are haunting me.
D’un côté et de l’autre du comptoir, c’était une réelle joute qui s’initiait entre les deux sorcières : aucune ne cillant du regard, l’une et l’autre ne laissant guère transparaître le moindre ressentiment sur leurs doux visages (ou s’essayant à ne pas le faire), Cersei et Tracey se livraient un véritable duel de nerfs. Ce que Tracey avait sans doute du mal à estimer à sa juste valeur, c’était l’importance du crépuscule arrivant, la tombée irrémédiable de la nuit, la levée de la lune qui amènerait avec elle, le lot de changements déplaisants dans la personnalité - et la personne même - de la rousse en face d’elle. Il n’y avait pas à douter que Tracey n’avait jamais eu affaire à un loup-garou ; Cersei non plus au fond, puisque quand le loup prenait part sur l’humain, elle s’éteignait comme dans un sommeil profond, perturbé de flashs et de souvenirs bien compliqués à décrypter. Elle avait pourtant à son actif plus de dommages que la brune ne pouvait le soupçonner, et à voir les réactions de son interlocutrice, Cersei comprit finalement, malgré l’atmosphère qui s’électrisait entre elles, qu’un véritable quiproquo les opposait. Elle n’avait jamais vraiment su ce qui avait lié Tracey à Saireann, ce qui les avait poussés à s’accorder sur quelque chose d’aussi stupide qu’un Serment Inviolable. Elle n’avait qu’à peine compris les termes de leur entente : tout ce qu’elle savait, c’était que cette rencontre entre eux trois avait fini par lui coûter à elle plus que la conscience de Tracey ne voudrait bien le reconnaître. Et plus que Saireann ne savait. Au milieu de tout ça, elle estimait sans aucune honte que demander une potion Tue-Loup à la personne qui l’avait condamnée à ce qu’elle était devenue, c’était un équilibre pour le moins assez juste : elle aurait pu demander à Saireann, si seulement son père n’avait pas toujours souligné à quel point le petit rafleur n’était qu’un incapable - de sa scolarité à Poudlard, elle se souvenait bien des indéniables talents des Serpentard dans le domaine des potions. Et Tracey était une Serpentard, il y avait forcément quelque chose qu’elle savait faire de ses dix doigts : ce n’était pourtant pas une question de confiance, elle était loin de lui faire confiance, ça avait sans doute tout de l’acte de la désespérée, et Tracey avait déjà dû le deviner, rien qu’à voir l’assurance avec laquelle elle ricochait sur chacune des répliques de la rousse, sans même se poser un brin de question. Tant de temps dans son petit monde avait laissé la sorcière en grand décalage avec la réalité : encore une fois, Cersei ignorait parfaitement quels accords liaient présentement Tracey et Saireann, mais quelque chose lui disait que dans leurs tête à tête, ils ne s’étaient jamais donnés la peine de s’interroger sur la pauvre adolescente de dix-sept ans qu’ils avaient balancée en pâture entre les pattes d’un fou furieux tel que Doezwal Harkness. Indéniablement, l’on pouvait lire dans les yeux de Cersei chaque seconde, de chaque heure des dommages qu’elle avait vécus, non seulement auprès de son père, des Greyback, pendant sa convalescence ou même après, emprisonnée comme un animal, destinée à une mort lente et épuisante, oubliée de tous, son si gentil et idéal cousin, sa timbrée de cousine, sa tante soit-disant si bienveillante. Pourquoi donc aurait-elle cru que les remords avaient dévoré Tracey de l’intérieur ? Elle était une Serpentard après tout, ils n’étaient bons qu’à être concentrés sur eux-mêmes : pauvre petite sorcière, protégée, quel difficile sort d’être exilée du monde magique, avec la protection d’un gentil rafleur pour garantir sa survie. Effectivement, son quotidien devait être un véritable enfer : le sarcasme, quand bien même il ne franchit pas les lèvres de Cersei, brilla avec défiance au fond de ses yeux lorsqu’elle écouta le petit récit de sa vis-à-vis. Devraient-elles vraiment se lancer dans le concours de la plus misérable des deux ? Il n’y avait qu’à les regarder pour deviner laquelle s’en était mieux tirée que l’autre; il n’y avait qu’à s’interroger sur qui deviendrait une bête meurtrière d’ici une poignée de dizaines de minutes si les choses ne changeaient pas. Au fond, cuisiner une potion, ce n’était pas sorcier, en comparaison de tout ce qu’elle avait accepté de faire auprès de Saireann.
Plus les minutes s’égrenaient, plus une autre facette de Cersei naissait du fond de ses entrailles : c’était ce qu’elle était devenue lorsqu’elle avait reçu la morsure, non pas seulement un animal déchaîné les jours de pleine lune. Également quelqu’un d’aussi dur que du marbre, d’aussi insatiable qu’affamée, aussi impérieuse que la froideur de la glace : les menaces auraient sans doute été les prochaines paroles sortant de la bouche de la rousse, rien que sa présence ici en était une. Si Tracey ne consentait pas au plus vite à l’aider, elle resterait vissée sur ce même tabouret jusqu’au levé de la lune, et Tracey serait irrémédiablement la première personne à qui elle viderait les entrailles sur le sol. Elle n’avait pas vraiment l’impression de devoir formuler ces faits à haute voix non plus, mais s’il le fallait, elle était prête à le faire : pas très crédible, au fond, sortant de la bouche d’une fine jeune femme de dix-sept ans, mais l’avis de Tracey changerait bien vite lorsque les premiers effets de la métamorphose se feraient sentir. Un sourire torve passa sur les lèvres de Cersei face au récit de la brune, et elle leva les yeux au ciel, la coupant presque dans son élan de bienveillance. « Que c’est aimable, venant de l’apprentie moldue que tu es. Ne t’en fais pas, je me souviens tout à fait du jour où tu as raté la potion. » Elle ne s’en souvenait pas au sens propre du terme, elle se souvenait surtout des jours qui avaient suivi, de la culpabilité qu’elle continuait de ressentir quand elle pensait à Elwood, ou lorsqu’elle l’avait regardé la dernière fois qu’ils s’étaient vus. Rien que la façon dont elle se sentait toxique dans sa vie était quelque chose qu’elle ne pouvait pas oublier, quelque chose qui ne se déferait jamais d’elle, tout autant que la morsure faisait partie d’elle. « Avant que tu te crois plus généreuse que tu l’es, cependant, clarifions la situation. Tu es assise derrière un bar, à servir des cocktails à trois moldus par soir, tu es restée trois mois dans une prison abandonnée, sans Détraqueur, avant qu’une âme bienveillante ne t’en sorte - ton papa, Saireann, ton tonton ? - et tu espères sérieusement me faire croire que nous sommes dans les mêmes emmerdes ? » Le regard flamboyant, Cersei sentit ses mâchoires se serrer nerveusement : si elle devait faire le bilan de ces derniers mois, son histoire à elle avait quand même de quoi être sensiblement plus chaotique. Rien que par le fait que personne n’était venue pour elle, si ce n’est, bel et bien des Détraqueurs déchaînés, des Exécuteurs prêts à l’exterminer, ou même des gardiens tortionnaires pour la détailler dans toute sa misère. Proportionnellement, leurs situations, quand bien même elles étaient liées à la même personne, n’avaient rien à voir. « On pourrait rester assises toute la nuit à vociférer sur le vilain Saireann, mais tu sais, tu étais censée être la gentille Serpentard à qui je devais avoir confiance, l’adolescente de dix-sept ans qui peut me comprendre si bien, celle en qui Saireann avait une confiance aveugle, celle qui l’aiderait à me sauver la vie de mon si méchant père. » Quelle belle poésie, elle se souvenait encore de toute la philosophie avec laquelle Saireann avait traité le sujet, les bonnes paroles qu’il avait prononcées, celles qu’elle avait été assez stupide pour croire : comment avait-elle pu se fier à une Serpentard et un rafleur ? Elle n’en avait aucune idée, mais c’était comme si toutes les années qu’elle avait passées à essuyer les moqueries de ces imbéciles argent et vert s’étaient envolées du jour au lendemain. Quelle idiote, au fond. « Je peux concevoir, donc, que pour le bien être de ton esprit, tu te persuades d’être une victime dans l’histoire, mais comme je vois les choses, tu es en vie grâce à moi. Je ne crois pas que tu aies eu grand chose à faire, à part rater une potion dans l’équation, en échange, je passe le reste de ma vie en tant que bête fugitive et Saireann est bon à voler à ton secours au moindre pépin. » Elle s’en fichait bien du sort de Saireann, qu’ils crèvent tous les deux à cause du Serment Inviolable que Cersei avait scellé, serait une justice trop logique pour que le Destin en arrive là. « Parce que tu sais quoi ? A la fin, je suis celle qui vous a fait confiance à tous les deux, et qui n’a aucun petit rafleur minable pour me sauver dès que j’ai un pépin, ni aucune petite vie tranquille qui m’attend dès que je pose ma baguette pour prétendre être celle que je ne suis pas. » Amère, Cersei ne lâchait pas des yeux Tracey, comme si elle cherchait à laisser déborder la plupart de ses ressentiments rien que d’une oeillade : si elle ne savait absolument pas ce que Tracey avait vécu, l’inverse était on ne peut plus vrai également, personne, personne ne pouvait se mettre dans les bottes de Cersei à sa place, elle n’allait certainement pas laisser cette brune prétendre comprendre quoique ce soit à ce qu’elle vivait, ou même se placer à sa hauteur dans l’échelle du malheur incurable. « Je ne suis pas ici à cause de Saireann, je suis ici à cause de toi. Dans mon idée, ton implication dans l’histoire ne reposait pas sur le fait de me concocter une potion une fois que je serais devenue une sale bête, mais d’empêcher un tel sort de m’arriver. Alors indéniablement, tu as échoué dans ta mission, et tu n’as pas levé le petit doigt au moment d’agir. » Elle finit par souffler, haussant les épaules. « Mais puisque tu tiens à prouver que tu n’es pas une mauvaise personne, je peux te suivre, sous condition qu’il y ait une quelconque raison de te faire confiance. Ou je peux simplement quitter cet endroit, garder en mémoire toutes ces fois où toi, ou Saireann, avaient déshonoré ce soit-disant Serment Inviolable que vous avez fait, et poursuivre ma vie de paria éternelle loin, histoire d’alléger votre conscience. Tu n’auras qu’à continuer de jouer à la moldue innocente et Saireann continuera de jouer au chevalier servant pour se donner bonne conscience : un jour ou l’autre, ne t’étonne pas cependant si ton héros en cape blanche ne vient pas à ton secours. » En mettant les pieds en Angleterre, elle avait longuement oscillé entre la rédemption et la vengeance : ce soir, que ce soit contre son gré ou non, Tracey avait une chance d’offrir à Cersei le chemin qui pouvait encore un tant soit peu préserver son humanité. C’était un ultimatum, indéniablement, qu’elle lui envoyait en pleine figure, mais à la guerre comme à la guerre n’est-ce pas ?
Invité
Invité
Sujet: Re: full moon (cersei) Jeu 10 Avr - 14:11
Loin de me sentir offensée par les paroles acides de la rousse, je me sentais plutôt amusée. C'était amusant de voir à quel point elle pouvait rejeter la faute sur les autres. Elle me reprochait précisément de penser que je n'étais qu'une pauvre petite chose sur laquelle le destin semblait s'acharner, mais Cersai-Jane n'était guère différente en cet instant. Je voyais très clair dans son jeu. Elle mettait en avant toutes ces horreurs pour réveiller le semblant d'empathie que j'étais censée éprouver face à la misère du monde, mais s'il y avait bien un point sur lequel elle se trompait, c'était sans doute que j'étais incapable d'éprouver de la moindre compassion à l'égard de quiconque. Cette part de moi-même, si tant est qu'elle ait existé un jour était morte au fond de cette cellule d'Azkaban. Les faits étaient là : Saireann n'avait rien fait pour m'empêcher de tomber entre leurs griffes. En tant qu'ancienne membre de l'Ordre, j'étais vouée à être traitée comme de la vermine. Les endroits les plus chauds de l'enfer sont réservés aux indécis qui restent neutres en temps de crise morale disait le président John Fitzgerald Kennedy. Ce n'était pas vrai. J'avais donné ma vie à l'Ordre, les dernières bribes de ma jeunesse et de mon innocence, j'avais combattu à leurs côtés parce que je croyais en ce qu'ils faisaient. Je m'étais dévouée corps et âme à leur cause, au détriment de ma propre vie alors qu'on m'avait maintes fois sommée de rester à l'écart de tout cela. On nous avait fait des promesses, de belles promesses qui au final avaient été réduites à néant, faisant voler en éclats nos espérances et nos aspirations. Pour autant, je portais aussi mon fardeau. Contrairement à ce que Cersei-Jane pensait, je n'étais pas qu'une simple sorcière exilée chez les moldus. J'étais tellement plus que ça, bien plus que je voulais l'admettre. Il n'était plus question d'être considérée comme une criminelle aux yeux du nouveau régime. Je savais, et je n'ai rien fait. Voilà quel était mon fardeau, ma croix, la source même de la culpabilité qui me rongeait. À l'époque, j'avais préféré ignorer et faire l'autruche, bien que dans le fond je savais pertinemment que la cause qu'on défendait était définitivement perdue. J'avais vu Potter se faire tuer sans jamais y croire. J'avais tout simplement refusé d'y croire simplement parce que les enjeux étaient trop importants, les conséquences auraient été désastreuses bien que j'étais à mille lieues d'imaginer qu'une telle chose ait pu surgir des ténèbres. Je n'avais en aucun cas été une indécise, mais j'étais quand même vouée à brûler dans les flammes de l'Enfer parce qu'au final, jamais je n'avais partagé avec quiconque ce douloureux secret. De toute façon, qui m'aurait crue ? Ils étaient tellement persuadés que la prophétie émise des années plus tôt à propos d'un Élu allait se réaliser qu'ils avaient tous foncé droit dans le mur – moi incluse – sans jamais se douter un seul instant que les choses puissent changer entre temps. Le destin n'était pas quelque chose d'infiniment linéaire, il contenait beaucoup de variables et je croyais d'autant plus à cette théorie que personne n'avait vu venir ce qui s'était dès lors passé. Ils avaient été fauchés en plein élan, pris de court tous autant qu'ils étaient. Je savais et je n'ai rien fait. Je n'étais certes pas une bête féroce et sanguinaire, j'étais même tout autre chose mais je me sentais en colère, en colère parce qu'elle n'avait pas le droit de croire que je n'avais rien fait pour l'aider, pire, que j'avais laissé Saireann faire sans lever le petit doigt comme elle le disait si bien. Il me fallait rétablir la vérité au plus vite parce que je ne pouvais pas tolérer ça. Elle pensait que j'étais de mèche avec le rafleur mais elle était tellement loin du compte, si on avait scellé ce serment inviolable, c'était bien pour gommer les désaccords flagrants qu'il y avait entre nous car ni l'un ni l'autre n'avions les mêmes vues quant au destin de Cersei-Jane. Quelle ironie quand on y pense, Saireann et moi étions comme deux parents qui se disputaient la garde de leur enfant, ou quelque chose dans le même goût. Un frisson me parcourut l'échine tant l'idée me révulsait.
Je m'exhortai à inspirer profondément, comme pour me défaire de la sensation de dégoût qui s'était emparée de moi. Bien sûr que nous pourrions passer notre temps à dégueuler notre colère sur Saireann tant les griefs que nous avions l'une comme l'autre à son égard semblaient immenses, mais dans le fond c'était inutile parce qu'elle n'en avait rien à foutre de Saireann, c'était après moi qu'elle en avait. Dans le fond, Saireann n'était qu'un crétin qui s'était laissé prendre au piège, par deux nanas plus jeunes que lui de surcroît. Cersei-Jane pour sa part avait su jouer des apparences et camper un rôle qui n'était pas le sien, sans nul doute faisait-elle une excellente comédienne. Pour ma part, j'avais simplement bougé un pion de telle sorte qu'un de mes ennemis s'en était retrouvé complètement neutralisé, dans l'incapacité totale de me faire du mal sans en pâtir à son tour. Si je devais chuter alors je l'entraînerais irrémédiablement dans ma chute, c'était aussi simple que cela. « C'est quand même comique de me reprocher de jouer un rôle, alors qu'il me semble que toi aussi tu es plutôt douée en la matière. » ironisai-je en plantant mes prunelles foudroyantes dans les siennes. « N'est-ce pas, Marianne ? » Marianne, ou le nom de la rafleuse qu'elle avait incarnée pour tromper Saireann et l'empêcher de mettre la main sur la douce Cersei-Jane. Cependant, ce qu'elle ne savait pas, c'était sans doute que son rôle de composition comportait quelques failles que je n'avais pas tardé à mettre à jour. J'avais effectivement secoué Saireann pour qu'il comprenne que sa Marianne et Cersei-Jane était la même personne, ce qui avait déclenché sa furie et corrélativement, mis en branle sa volonté de ramener Cersei chez son père manu militari mais ce que la gamine ne savait pas, c'était que je n'avais jamais cautionné le fait qu'il la ramène chez son père. Je le lui avais dit cette fois où on s'était rencontrés dans la forêt et où il avait sollicité mon aide. J'avais réitéré mon opinion cette fois là, tâchant de le raisonner autant que faire se peut, persuadée que ce n'était pas la solution mais il n'avait rien voulu entendre, il m'avait repoussée comme un balayait un vulgaire fétu de paille. J'avais espéré le doubler de vitesse avant qu'il ne commette l'irréparable mais je n'étais pas arrivée à temps. Je l'avais maudit de tout mon être d'avoir laissé filer Cersei-Jane, et il me semblait que c'était la dernière fois que l'on s'était vraiment parlés. La voilà, la vraie histoire, celle qui s'est réellement passée. Mais bien sûr, j'étais la méchante de l'histoire, la méchante sorcière qui avait condamné la frêle petite princesse qu'elle était à un sort bien moche. « Peut-être que je n'aurais pas dû lui faire comprendre que Marianne et toi étiez la même personne c'est un fait. Mais pour moi, il était hors de question qu'il te ramène chez ton père, je savais très bien quels desseins Doezwal nourrissait pour toi et je m'y suis toujours fermement opposée, et ce dès la seconde même où il a sollicité mon aide pour te retrouver. » Après tout, elle ne connaissait pas l'envers du décor, les négociations parfois houleuse qui avaient eu lieu derrière son dos, mais une chose était-il, c'était que je ne comptais pas laisser cette gamine me donner ce mauvais rôle, ni même me discréditer. « à la seconde où j'ai compris ce qu'il comptait faire, sur un coup de tête débile il faut l'avouer, j'ai tout fait pour l'en empêcher. J'étais tellement déterminée à ne pas le laisser t'emmener chez ton père que j'aurais été prête à le tuer si nécessaire. Alors non, ne crois pas que je l'ai laissé faire parce que c'est faux, entièrement faux. » La colère luisait au fond de mon regard, brûlante comme les flammes de l'enfer, promesse de tourments à venir. Elle pourrait me penser bipolaire que je n'en avais rien à faire, de toute façon, pour beaucoup, j'étais considérée comme folle, tout juste bonne à enfermer.
Cependant, j'étais loin d'en avoir fini avec elle. À cet effet, je me penchai davantage vers la rousse, dangereuse comme jamais. Mes mains, elles, étaient posées bien à plat sur le comptoir. « Qu'est-ce que j'ai à proposer, en gage de ma bonne foi ? Bonne question. » raillai-je, en faisant mine de réfléchir. « Je n'ai aucune raison de te livrer aux autorités ou que sais-je, sans doute parce que je n'aurais aucun intérêt à faire ça, mais surtout, parce que je sais ce que c'est d'être une sorcière et d'avoir...quelque chose en plus. » Je ne savais plus vraiment ce que je devais dire tant ma propre folie me consumait de l'intérieur, exacerbée par toute cette rage que je ressentais mais je le disais quand même, quitte à ce que ça m'écorche la gueule. Je n'avais plus rien à perdre de toute façon. « J'ai des visions. » dis-je enfin, avant de pouffer d'un rire nerveux, comme si j'étais en train de raconter une bonne blague alors que non, c'était loin d'être marrant. « En d'autres termes, je vois l'avenir. » C'était tellement ridicule comme idée que même moi, je n'y croyais pas. Et pourtant, c'était là, bien réel. Je n'oublierai jamais le jour où Abby avait débarqué pour me confier les vieilles affaires de notre grand-mère, laquelle me léguait un lourd héritage que je n'avais pas été en mesure de refuser parce que c'était tout simplement impossible. J'avais été obligée d'accepter ce fardeau sans ciller, et ce soir, j'admettais enfin que j'avais quelque chose en plus, quelque chose qui pouvait être considéré comme une tare ou pire, comme une déficience mentale. « Je te laisse imaginer ce que l'on ferait de moi si je venais à tomber entre de mauvaises mains. » Ils pourraient m'utiliser à des fins malhonnêtes, et dès lors, il n'y aurait plus aucun espoir pour notre propre camp puisqu'ils seraient en mesure de déjouer notre stratégie rien qu'avec mes visions. Ma volonté de me terrer dans le monde moldu n'avait rien d'un hasard, ni même d'une lubie passagère. Je me protégeais autant que faire se peut. La visite d'Abby avait été l'élément déclencheur de tout ça, puisque après j'étais retournée au pays pour me fondre dans la masse, sans faire d'histoires. Tous ces éléments une fois mis bout à bout n'étaient sûrement pas une coïncidence. Le raisonnement était dès lors très simple : si je ne me faisais pas remarquer en tant qu'ancienne rebelle, si je rentrais sagement dans les rangs, il n'y avait dès lors aucune raison pour qu'ils viennent me chercher. Une voyante, une belle aubaine pour les Mangemorts. Moi, je ne voulais pas devenir un instrument entre leurs mains. « Alors ? » la pris-je directement à parti. « On y va ? Il me semble que nous n'avons pas toute la soirée. » Et si cela ne suffisait pas, j'étais prête à abandonner séance tenante mon poste pour l'emmener dans cet abri que je lui avais promis. J'aurai bien le temps de réfléchir plus tard aux conséquences de ce que je venais de lui révéler. Il semblerait que ce soir, j'ai arrêté d'être dans le déni pour au moins une chose, même si ce n'était probablement celle qu'elle avait espéré. Tant pis.
Dernière édition par Tracey M. Davis le Ven 11 Avr - 20:21, édité 2 fois
≡ son emploi : professeur de sortilèges à poudlard.
≡ statut de sang : sorcier de sang-pur, noble jusqu'au bout des doigts, qui tient à la dignité de sa famille.
≡ sa maison : ancien gryffondor, un choix qu'il n'a jamais particulièrement compris ni accepté, tous les siens finissant normalement chez les serpentards.
≡ sa baguette : bois d'ébène, spécialisation en maléfices, longueur de trente-deux centimètres avec pour centre un ventricule de coeur de dragon.
Sujet: Re: full moon (cersei) Jeu 10 Avr - 22:12
darßness will maße you strong.
— CERSEI-JANE V. HARKNESS & TRACEY M. DAVIS —
It's so hard letting go, I'm finally at peace, but it feels wrong. Slow I'm getting up, my hands and feet are weaker than before. And you are folded on the bed where I rest my head, there's nothing I can see. Darkness becomes me. But I'm already there, I'm already there, Wherever there is you, I will be there too. There's nothing that I'd take back, but it's hard to say there's nothing I regret. Cause when I sing, you shout, I breathe out loud. You bleed, we crawled like animals, but when it's over, I'm still awake. A thousand silhouettes dancing on my chest, no matter where I sleep, you are haunting me.
Elle était loin l’époque où Cersei avait été une fille douce et empathique : les rares fois où elle avait laissé ce trait de caractère ressortir, ça avait été en présence d’Eyron, dans ces soirées difficiles où il était venu la réconforter. Depuis qu’Elwood était devenu un officiel paria pour avoir soit-disant assassiné une famille d’Aurors, la rousse avait eu pour habitude de se fermer à tout ce qui l’entourait, quitte à être complètement hermétique à tout ce qui pouvait se passer autour d’elle. Elle n’avait jamais connu d’amour de jeunesse, ni de véritable amitié sans doute, si ce n’est celle qui l’avait liée à Judith. Judith ne l’avait jamais jugée, tout autant qu’Eyron ne l’avait jamais fait : pour lui, c’était plus évident que pour Judith, puisque le nom même qu’il portait était aussi maudit que le sien à elle. Eyron et Cersei, isolés dans ce petit monde où seuls tous les deux pouvaient se comprendre, c’était quelque chose qui leur était allé bien : finalement, même ces temps sombres à Poudlard étaient préférables à ce qu’elle connaissait aujourd’hui. A présent, elle ne parvenait même plus à regarder sa tante dans les yeux sans sentir des élans de rage et de culpabilité se mixer au fond de ses entrailles, elle ne pouvait pas penser à Elwood sans se sentir comme une criminelle, une bête insatiable et sanguinaire. Ni idéaliser son père comme elle avait pu le faire à une époque, ni penser au côté humain de Saireann sans penser à quel point il l’avait blessée. Tout le petit monde qu’on avait dressé avec soin pour rassurer Cersei l’orpheline, Cersei la petite fille si jeune, s’était finalement effondré comme un château de cartes. Et ça l’avait laissée transformée, comme un gouffre sans fond, plongeant à bras ouverts dans les abysses d’un néant de tourments. Peut-être qu’elles avaient ça en commun, d’une part et de l’autre du comptoir du bar, à se toiser du regard, à se défier d’une oeillade flamboyante à chaque fois qu’elles ouvraient la bouche. Finalement, alors que la brune rebondissait sur ses paroles, Cersei se permit de ciller enfin, roulant des yeux comme si leur joute devenait subitement plus barbante que n’importe quelle cérémonie pompeuse à laquelle elle avait pu assister. Si la soirée venait à se prolonger, allaient-elles continuer à se défier de la sorte, remontant à leurs plus profonds traumatismes d’enfance pour savoir laquelle des deux méritait d’être la plus malheureuse ? Laquelle des deux était le plus en danger en ce bas-monde ? Si les Exécuteurs venaient à mettre la main sur elle, ils n’hésiteraient pas à abattre Cersei comme un animal, et c’était tout ce qui comptait pour elle. Tout ce qui devrait compter à présent : elle; toujours elle et rien qu’elle. Le destin dans lequel l’avait balancée Saireann la condamnait à une épaisse solitude, elle en était donc irrémédiablement devenue parfaitement égoïste, en exact miroir avec sa vis-à-vis : l’une et l’autre demeuraient sourdes aux complaintes de l’autre, ignorant le malheur qu’elles avaient chacune essuyé. Ce n’était pas tant un problème d’empathie que d’ego surdimmensionné, d’orgueil d’acier forgé par les épreuves. C’était la guerre après tout, et Cersei savait assez bien que le cercle des gens qui importaient pour elle s’était considérablement amenuisé depuis qu’elle avait pris sur elle d’avoir ses propres emmerdes, et de devoir les régler par elle-même : elle n’en avait franchement rien à faire de Tracey, du beau jour où elle tomberait entre les mains des Exécuteurs, ou de la pitoyable période qu’elle avait passé à Azkaban. Indéniablement, l’inverse était bien vrai également, donc pourquoi perdaient-elles ainsi leur temps à parler ? Elles ne finiraient certainement pas par devenir les meilleures amies du monde, et le temps n’était pas aux discussions à coeur ouvert.
Elles en arrivaient irrémédiablement à se tirer dans les pattes de toute manière, et voir Tracey évoquer Marianne la traitresse, n’était pas une surprise pour Cersei. Elle ne laissa aucune mine de culpabilité, aucune quelconque mélancolie passer sur son visage : ce n’était certainement pas un sujet que Saireann avait alimenté auprès de cette fille, ce qu’ils avaient partagé lorsqu’il s’était confié à Marianne, était quelque chose qu’elle conservait pour elle. Elle espérait au moins, qu’à défaut d’avoir tenu sa parole de la protéger, Saireann en avait fait autant avec ce qu’ils avaient pu partager. Ça n’avait rien eu de faux, pas pour elle, au final, elle avait fini par croire, au moment où elle avait compris l’attachement qui liait le rafleur à cette illusion de jeune femme, que le visage qui cachait le caractère n’avait eu aucune importance. Qu’elle soit blonde ou qu’elle soit rousse, c’était bien avec Cersei qu’il s’était entretenu, et non pas la folle rafleuse orgueilleuse et violente qu’était en réalité cette dénommée Marianne. Les choses auraient été bien différentes pour lui, si tel avait été le cas : le lien qui unissait Marianne à Saireann était comme un jardin d’Eden qui ne les concernait qu’eux, quelque chose sur lequel Tracey ne pourrait poser qu’un infime toucher insignifiant. Quelque chose que Cersei avait aimé à une époque, qu’elle répugnait à présent : ça ne faisait pourtant pas pour autant d’elle quelqu’un sans honneur, ainsi, les secrets de Saireann étaient bien gardés auprès d’elle. Un sourire sans joie passa les lèvres de Cersei alors qu’elle dévisageait la brune : elle pouvait faire sa maline autant qu’elle voulait, Tracey venait de cogner dans un iceberg dont elle ne voyait qu’un infime morceau. Oh oui, persuadée d’avoir percé à jour le jeu de Cersei, elle devait sûrement être sure de tout comprendre, mais loin de désirer lancer le sujet plus avant, la sorcière ne répondit guère à cette appellation. Elle avait fait ce qu’il fallait pour survivre au premier abord, mais contrairement à ceux de Saireann, ses sentiments et sa bienveillance avaient été réels au moment crucial de leur face à face. Il ne l’avait pas compris, et cette idiote sans âme face à elle n’avait pas compris : quelle importance cela avait ? Elle ne répéterait pas les mêmes erreurs deux fois, de toute manière. « Ne t’en fais pas, je comprends. Tu as été si intelligente de comprendre mon petit manège, forcément que tu te devais de faire comprendre à Saireann ma mascarade. C’était de la bienveillance après tout. » Ce n’était guère plus de l’ironie qui passait les lèvres de Cersei, mais de la colère froide et tranchante prononcée avec un faux sourire : cette Tracey était une digne héritière de la maison des Serpentard, aussitôt qu’elle avait compris le truc, il avait fallu qu’elle prouve sa merveilleuse valeur autour d’elle, qu’elle se montre la plus intelligente, la plus clairvoyante. Et qu’elle foute tout en l’air. Mais Cersei n’oubliait pas cependant que c’était Saireann qui avait passé des mois à la traquer, que c’était Saireann qui lui avait menti, et que c’était Saireann qui lui avait tourné le dos, au moment de l’abandonner entre les mains de son père. Au milieu de ça, Tracey n’était que l’outil dont il avait usé pour le faire, qu’elle ne se prenne pas pour la reine du monde, quand même. « J’avoue, quelle imbécile j’ai été de croire que tu ne voulais pas me sauver, voyons. » Un rire clair sortit du fond de sa gorge, avant qu’elle ne poursuive, un sourire impeccable éclairant son visage. « J’aurais dû deviner que trente kilomètres derrière quelqu’un essayait de m’aider. Peut-être que dans ce cas-là, tu aurais dû deviner qu’un rafleur reste une raclure pourrie jusqu’à la moelle, et qu’il vaut mieux garder certaines choses pour soi. » Elle arqua un sourcil, implacable à nouveau : oh la colère de cette petite sorcière ne lui faisait pas peur. A mesure que le soleil disparaissait à l’horizon, son arrogance à elle grandissait, et son âme se consumait dans le néant, elle n’avait pas peur, elle n’avait plus peur depuis bien longtemps, il n’y avait aucun Enfer dans lequel on pouvait la jeter où elle n’avait pas déjà croupi. « Peut-être qu’on peut simplement dire que tu aurais mieux fait de rester en dehors de tout ça, tu sais, te contenter de ta petite vie de fugitive, laisser les problèmes des autres de côté. Bien entendu, tu ne voulais que faire le bien autour de toi, peut-être qu’un jour je finirai par y croire. Mais tu sais, il y a une limite, entre le fait de comprendre quelque chose, et de s’incruster dans quelque chose qu’on ne comprend absolument pas. » Elle pouvait se prendre pour la reine de désespérées, la pauvre petite victime de cette histoire, mais Tracey ne pouvait pas, ne pourrait jamais prétendre comprendre le lien qui avait lié Saireann et Cersei. Qu’elle avait déchiré, avec ses soit-disant bonnes paroles et son nez fouineur qu’elle avait eu besoin de foutre dans les histoires des autres. Qu’elle ne vienne pas pleurer, pour en subir les conséquences à présent.
« Tu sais quoi ? Si tu as des visions, tu devrais en profiter pour essayer de voir ce qui va arriver d’ici une trentaine de minutes. Ou tu aurais dû utiliser tes dons avant d’ouvrir la bouche quand tu m’as vendue en pâture. Alors tu n’as aucune raison de me livrer aux autorités, mais soyons claires sur une chose, je bouge tout le temps, tu restes toujours au même endroit : et qui sait, peut-être qu’un jour je pourrais avoir une raison de te livrer aux autorités. Rien que pour voir si tes visions sont réelles. » Elle prit un faux air préoccupé, sans doute celui que Tracey avait dû avoir quand elle a compris que le vilain Saireann était fâché par les révélations qu’elle avait eu le bon esprit de faire. « Et j’espère vraiment que Saireann viendra à ton secours ce jour-là. » Car il était indéniablement trop occupé pour venir au sien à elle, quand bien même elle n’en voudrait pas. Il devait savoir que s’ils venaient à se recroiser, sa survie se jouait à une chance sur deux : sous forme de loup-garou ou tout simplement sous cette apparence de frêle sorcière, évidemment. Il était loin le temps où il avait pu l’écraser rien que par la force de son mépris et de ses paroles. Cersei finit par taper des mains sur le bois du bar, haussant les épaules comme pour mettre fin à ce débat sans intérêt. « Tu sais quoi ? Tu as raison, je vais attendre dehors, juste devant, et je vais te laisser faire fonctionner ton esprit de génie de la clairvoyance, et on verra ce que tu décideras. » Non, il y avait bien peu de chances pour qu’elles deviennent les meilleures amies du monde un jour : peut-être bien que Cersei aurait pu demander de l’aide à Judith pour sa potion, si seulement elle savait où sa meilleure amie pouvait être. Si seulement elle n’avait pas peur de la blesser également, si seulement elle n’avait pas honte de ce qu’elle était devenue. Le point positif dans le fait que Tracey était un de ses bourreaux, c’était qu’elle, elle savait bien ce qu’elle avait créé. Et Cersei se fichait bien de son dégoût ou de sa colère. Elle l’ignora donc ouvertement au moment de glisser au bas du tabouret, la défiant d’une oeillade avant de disparaître en quelques pas vers la sortie. Derrière elle, elle veilla à bien laisser en évidence le livre qu’elle avait amené avec elle : c’était triste à dire, elle ne voulait pas vraiment le reconnaître (pas du tout même), mais Tracey représentait la seule chance qu’elle avait de s’en sortir dans cette histoire. Celle-ci semblait loin d’admettre cependant qu’une petite bonne action pourrait alléger sa conscience : irrémédiablement, la corruption coulait dans les veines de Cersei, de par son père, de par sa cousine. Et elle avait eu de longs mois d’apprentissage pour perfectionner ce côté sombre au fond d’elle, elle venait de découvrir, ce soir, qu’elle maniait les menaces tout aussi bien que son père. A l’air frais, Cersei souffla une seconde, expulsant un brin de l’agacement qu’elle avait collecté dans cette pièce à l’atmosphère étouffante. Elle sentait la nuit grandir jusque dans chacune des fibres de son corps, une faiblesse la prendre pour un instant, alors qu’elle s’appuyait, dos contre le mur le plus proche.