the day we met, frozen I held my breath.
MANOIR NOTT ⨯ 9 ANS
Théodore grogna, son doigt manquant la touche blanche qui atterit alors sur sa voisine, rompant la mélodie. Agacé, son professeur (de musique) le réprimanda séchement, frappant frénétiquement l'air de sa baguette, qui loin de lui servir à battre la mesure, lui permettait plutot de corriger son élève lorsqu'il se laissait distraire. Il en portait encore les marques sur les bras, là où le bois avait frappé. Tandis qu'il reprenait sa partition où il l'avait arreté, le jeune garçon se surprit à regretter son affiliation à la famille Nott, s'interrogeant sur ce que vivait les autres sorciers au sang pur, mais de caste différente. En effet, peu le savaient, mais être l'unique héritier d'une grande famille de sorciers à la pureté reconnue impliquait un bon nombre de responsabilités, la plupart -pour ne pas dire toutes- étant fastidieuses et, à long aussi bien qu'à court terme, ennuyeuses. Vous deviez non seulement connaitre les noms et prénoms de chacun de vos ancêtres, de l'arrière (...) arrière grand-père Ephraïm Arthur Ronald Samuel Nott, à celui de votre dernière petite cousine venue au monde, mais etre également capable de réciter leur biographie complète, sans faire la moindre petite erreur. Mais la torture ne s'arretait pas là : non content de monopoliser votre précieux cerveau avec de telles futilités, il vous fallait vous préparer à assurer la fortune familiale une fois votre heure venue, exigeant de vous une certaine rigueur, difficile à obtenir lorsque vous etiez jeune. Certes, on vous y préparait dès votre naissance en vous inculquant les arts délicats de la politesse, du respect aux ainés, de l'éloquence, mais ça ne rendait pas la chose plus aisée, surtout pas lorsqu'il s'agissait d'un enfant comme lui. Plutot docile, au demeurant, il ne lui fallait cependant pas beaucoup de temps pour se lasser, ce qui donnait souvent des résultats désastreux, au grand damn du père Nott, qui comptait sur son fils unique pour reprendre possession de ses biens une fois son corps rongé par les insectes. Quel doux euphémisme ! Théodore ne pouvait se plaindre de ce qu'il avait : on le craignait, on l'appréciait, on le couvrait de cadeaux, mais bien au-dela de ces preuves d'amour et d'admiration factices se trouvaient celles, absentes, de ses propres parents. Nathaniel Nott passait le plus clair de son temps libre loin du manoir familial et lorsqu'il ne quittait pas sa propriété , il recevait de pompeux representant d'autres familles au sang pur pour des "conversations d'adultes" disait-il. Quand a sa mère, Alexandra Nott, comme toutes les femmes de riches sorciers, elle tuait le temps en organisant des galas, des receptions où toutes les vipères pouvant prétendre à etre ses amies se retrouvaient, alors plus tentées de cracher leur suintant venin lorsqu'elles etaient en bande. Et lui, il était là, au milieu d'eux, avec ses cours de musique, sa nourrice, ses questions et sa solitude. Il retint un cri lorsque la fine baguette de son tuteur claqua sur ses doigts, alors qu'il réiterait sa précédente faute, la musique s'arretant une nouvelle fois. Ouais, la solitude et la douleur.
GARE DE KING'S CROSS, VOIE 9 ¾ ⨯ 11 ANS
Monsieur Malfoy. Monsieur et madame Parkinson. Madame Zabini. Tout le gratin des hautes spheres etait là, leurs progrénitures pour le moins bruyantes suivant docilement, chaque père echangeant une poignée de mains avec un sourire teinté d'amertume, chaque mère arborant son plus beau sourire, comme s'il etait necessaire de chercher à séduire, meme loin des mondanités. En progressant sur les quais, Théodore reconnut quelques visages pour qui il ne témoigna, cependant, pas le moindre intéret, veillant à rester auprès de ses parents. Pour une fois qu'ils étaient tout deux réunis et qu'ils ne se lançaient pas des remarques blessantes, il tenait à en profiter, meme s'ils n'agissaient ainsi que pour faire bonne figure auprès de leurs "amis" respectifs. Il rayonnait, et meme lorsque Nathaniel Nott posa une main sur son épaule pour l'inciter â s'arreter, il ne put se départir de son sourire. Silencieux, il se tourna vers sa mère qui se pencha alors en avant afin de déposer un baiser sonore au sommet de son crâne, en profitant pour réarranger ses cheveux en bataille -qu'il s'empressa d'ebouriffer- avant de lui murmurer à l'oreille. « Sois sage, mon fils, d'accord ? Et ne t'eloigne pas de ton groupe tant que tu ne sauras pas dans quelle maison tu seras, tu veux ?" Contrairement à tous ces autres ancetres, sa mère n'avait pas étudiée à Serpentard, mais à Serdaigle et il se doutait, qu'au fond, elle esperait qu'il integre cette derniere maison, sans doute pour "ne pas finir comme son père" comme elle le lui répétait regulierement. Il n'en revenait pas qu'ils se soient mariés ! Tandis que sa mère etait douce et patiente, son père transpirait la violence et la perfidie. S'il ignorait les termes exacts de leur mariage, il se doutait pourtant que les deux parties n'avaient pas été vraiment consentants dans cette histoire. Son père, manifestant son empressement, se racla doucement la gorge, sa façon à lui d'inviter sa femme à se lever, sans doute, et se contentant d'exercer une legere pression sur l'épaule du garçon, finit par se détourner, entrainant sa femme dans son sillage. Brusquement gené, Théodore les regarda s'eloigner avec un pincement au coeur qu'il fit beaucoup d'efforts pour dissimuler, tirant ses bagages vers les wagons d'un air qui se voulait résolu, en apparence.
POUDLARD EXPRESS ⨯ 11 ANS
Théodore soupira, dévisageant les adolescents encore présents sur les quais, tous accompagnés de leurs parents, voir même de leur majordome ou de leur nourrice. Il avait été le premier à monter dans le train et il avait pris soin de s'installer le plus loin possible des points d'entrées, s'assurant une certaine tranquillité. Du moins, il le croyait.
« Je peux m’asseoir ? » Sans trahir son mécontentement d'etre interrompu en pleine reflexion, il leva les yeux vers la fille à la voix chantante qui venait d'ouvrir la porte de son compartiment, ses lourdes valises derrière elle. Sans attendre de réponse, la jeune fille s'installa et il la dévisagea, intrigué. Petite, brune, frêle, avec des yeux bleus aussi perçants que ceux de sa soeur. Parkinson, aucun doute. Le train s'ébranla finalement, sans qu'aucun des deux jeunes gens n'aient prononcés un seul mot, bien que la politesse l'exigat. Raison pour laquelle il finit par lacher, dans un nouveau soupir.
« Salut. » Courte pause, histoire de jauger sa réaction.
« Moi c’est Théo. Théodore Nott. » Une leger sourire tendit la bouche de la cadette Parkinson, révélant une rangée de dents parfaitement alignée.
« Enchantée, moi c’est Pansy, Pansy Parkinson. » Elle sembla hésiter avant d'ajouter, hésitante.
« On se connait, non ? » « On s’est croisés à plusieurs reprises pendant des réceptions. » « Tu dois être un ami de Malfoy alors ? » Il ne put retenir un ricanement. Pas mecontent de ne pas l'avoir eu dans les pattes jusqu'à présent, il ne put s'empecher de se dire que ça risquait d'etre bientot le cas : Malfoy semblait beaucoup s'amuser des changements de temperature qu'il produisait lorsqu'il entrait dans une pièce. « Non, pas vraiment… » Plutot heureux d'avoir quelqu'un avec qui converser, sans compter qu'elle n'etait pas aussi detestable que l'avait affirmé son père, Théodore parvint à se detendre, eclipsant ses sombres pensées. Mais c'etait sans compter sur Drago qui, précédé du chariot de friandises, ouvrit la porte pour laisser passer sa tete de fouine, jetant un regard à l'interieur. Il sembla satisfait de ce qu'il vit car il se glissa derechef dans le compartiment, lachant de sa voix sifflante.
« Parkinson, Nott. » Comme Théodore s'y attendait, la jeune Parkinson baissa le nez, intimidée. Tous connaissaient les Malfoy, tous les respectaient, tous les adulaient. Le blond s'installa à coté de lui, -volontairement-, vrillant son regard de serpent sur Pansy, assise en face de lui, alors que Théo souffait entre ses dents serrées, crispé.
« Malfoy. »there's just too much that time cannot erase.MANOIR NOTT ⨯ 13 ANS
Théodore inspira profondément, leva la tête et appuya sur le bouton de sonnette. Il avait trouvé porte close à son arrivée : on ne l'attendait pas, de toute évidence. Moins de cinq secondes plus tard, un homme âgé au visage buriné ouvrait la porte, un air sévère peint sur le visage. Il lui passa sous le nez, convaincu que le majordome ne lèverait même pas le petit doigt pour l'arrêter, sachant pertinemment qui il était. Il monta quatre à quatre les marches en grès du vaste escalier, jusqu'au troisième étage, où une autre porte l'arrêta. Celle-là était en acajou massif, et de l'autre côté, c'était le sanctuaire de Nathaniel Nott, son père. Deux ans qu'il n'était pas entré dans cette chambre. Pas depuis un jour d'été de ses onze ans, lorsqu'il avait été surpris assis au bureau, une gigantesque dalle de marbre noir, par son aîné, qui lui avait sévèrement fait regretter cette intrusion. Théodore ouvrit la porte avec une telle violence qu'elle alla cogner contre le mur. Son père leva les yeux de ses feuilles tout en coulant sa main droite sous son bureau, à l'endroit où il gardait sa baguette, dans un tiroir à ressort.
« Théodore ! » dit-il, choqué. Et il fut surprit de voir le visage de son père traduire une réelle préoccupation.
« Que fais-tu ici ? Ne t'ai-je pas demandé de rester à Poudlard dans la lettre que je t'ai adressé ? » « Où est-elle ? » Nathaniel, qui s'était à moitié levé, se rassit derrière l'énorme bureau de marbre.
« Tu n'as rien à faire dans cette maison et encore moins dans ce bureau, mon fils, je te prierais de sortir. » fit-il, en le jaugeant d'un regard froid, indifférent. Théodore serra les dents pour s'empêcher de hurler. Bon Dieu, ce qu'il avait toujours détesté ce ton sec, léger, qui n'avait pas son pareil pour ironiser, trancher, blesser. Il pinça les lèvres, se forçant au calme. Il fallait qu'il reprenne le dessus, qu'il refoule ses émotions, comme on le lui avait toujours inculqué. Il savait d'expérience qu'on ne pouvait se permettre de manifester la moindre étincelle de sentiment auprès de Nathaniel, d'exprimer quoi que ce fût qui ressemblât à de l'amour, de la haine, de la tristesse, de la peur ou même de la colère, parce que les sentiments ouvraient une brèche en vous, une brèche qu'il utilisait ensuite pour vous éviscérer. Nettement et sans bavure. Théodore approcha de la grande dalle de marbre noir qui était son bureau, lentement, pour gagner du temps. La pièce était magnifique mais froide, comme son occupant. En forme de triangle, elle s'avançait, telle la proue d'un navire, dans le ciel au-dessus de la Tamise et du London Bridge. Contre le seul mur qui n'était pas occupé par une baie vitrée du sol au plafond se dressait une bibliothèque scandinave qui avait couté les yeux de la tête. Il y avait quelques livres sur les étagères, mais surtout les plus beaux trophées de son père. Encore aujourd'hui, il souffrait beaucoup à l'idée que, pour son père, ces antiquités comptaient plus que lui.
« Père, laissez moi la voir, je vous en conjure ! » "Père, laissez moi la voir" répéta Nathaniel sur un ton railleur avant d'ajouter, flegmatique.
« Je crains fort que ce ne soit impossible, mon fils. » « Elle est ma mère, j'exige de la voir. » « Elle ne le sera bientôt plus. » « Mère m'aime. Elle n'approuverait pas votre décision si elle était là aujourd'hui ! Elle m'aime et ça a toujours été votre problème. Vous êtes jaloux. Jaloux de votre propre fi... » Une gifle le renversa et il tomba sur les fesses, le feu aux joues. Son père flanqua un coup de poing sur le bureau, si fort que la lampe oscilla. Mais ce n'était pas de la colère. Théodore avait déjà vu son père en colère, avant, et ce n'était pas ça.
« Ta mère est morte, Théodore, et je te suggère de te faire rapidement à cette idée, car elle ne reviendra plus dorénavant. » « Je vous déteste, vous n'êtes qu'un monstre ! Un monstre ! » hurla-t-il avant de quitter la pièce, son visage baigné de larmes.