Si écarter mes amis pour les protéger, nécessite de me transformer en véritable monstre pour cela, il est aussi nécessaire de rester avec des personnes auxquelles je revendique vouloir ressembler. Et cela s’avère être un sacrifice énorme que de devoir afficher un air ravi et enjoué tandis que je leur réponds lorsqu’ils me parlent, alors qu’à vrai dire, je préférais qu’ils me laissent dans mon coin et se contentent de m’ignorer même s’ils restent avec moi, comme ils l’ont toujours fait jusqu’à présent. Car ils restent tout de même les personnes que j’ai détestées pendant tant d’années et qui continuent à m’insupporter aujourd’hui. C’est ce à quoi je suis en train de penser, alors que je perçois le visage d’Arabella au détour d’un couloir. Je détourne bien vite le regard cependant, de peur de nous trahir tous les deux. Mais alors que je la dépasse, mon sac se craque soudainement, rependant mes affaires au sol. Je pousse un soupire tandis que je me retourne pour ramasser mes affaires, découvrant un mot au milieu de mes rouleaux de parchemin. « Avancez sans moi, je vous rejoindrai plus tard ! » je lance aux serpentards qui m’accompagnent et ils ne se font pas prier pour partir sur moi. Du coin de l’œil, je perçois la gryffondor se lever pour se diriger en direction des toilettes de Mimi Geignarde. Aussi je finis de rassembler mes affaires, avant de réparer mon sac d’un coup de baguette, ne me mettant à la suivre que lorsque je suis absolument certain que personne ne me voit le faire. « Tu joues un jeu dangereux. » je lance à l’attention d’Arabella alors que je passe enfin le seuil des toilettes des filles, toujours plus ou moins abandonnées. « Comment on aurait fait si l’un d’eux s’était baissé pour m’aider à ramasser mes affaires et qu’il était tombé là-dessus ? » je souffle en brandissant le mot dans sa direction, avant de le rouler en boule pour le jeter dans un toilette. Il faut que le papier absorbe l’humidité de l’eau pour effacer l’encre, dire qu’il ne reste plus de preuve de notre rencontre furtive. « Et se rejoindre aux vues de Mimi Geignarde n’est pas la meilleure idée du monde. Tu sais bien qu’elle ne sait pas tenir sa langue. » Comme ça, j’ai vraiment l’impression de passer mon temps à râler. Surtout qu’Arabella ne mérite pas ça, étant donné que c’est elle qui m’a aidé en ce début d’année, alors que je ne savais pas comment gérer l’arrivée de mon paternel à Poudlard.

Je dois tout de même avouer que mon comportement n’est pas très approprié au fait que je suis censé vouer une certain reconnaissance en la personne d’Arabella. Sans elle, ce ne serait pas de quelques imbéciles pouvant lire un mot écrit à la va-vite sur un bout de papier ou encore à Mimi Geignarde pouvant cafter à tout instant ce qu’il se passe dans l’enceinte de ses toilettes favoris – ceux ayant accueillis le sinistre spectacle de sa mort. Si bien que je finis par passer ma langue sur mes lèvres, avant de pincer ces dernières, préférant ne rien ajouter pour ne pas paraître plus ingrat que cela est déjà le cas. Peut-être que cette histoire de rôle et de fait de se fondre dans la masse, me montent un peu trop à la tête, pour que je continue ainsi à me glisser dans la personnalité que je me suis forgé, même avec les personnes que j’apprécie. J’ai l’impression de m’être transformé en véritable monstre. « Aux dernières nouvelles, tes 'amis' sont des serpentards. Sache, si tu n'as pas eu l'occasion de le remarquer, qu'un serpentard qui se baisse pour aider quelqu'un à ramasser ses affaires, fut-il un camarade, c'est aussi commun que Severus Rogue avec les cheveux lavés. » Je secoue doucement la tête, passant une main sur mon visage alors que je me détourne légèrement de la gryffondor, me cachant de sa vue. J’esquisse quelques pas du côté opposé à celui où elle se trouve, déglutissant alors que ses mots suivants viennent se heurter à mes tympans. « Quant à Mimi Geignarde… Elle va se taire, crois moi. » Je fais volte-face pour me trouver face à Arabella, levant un sourcil afin de la dévisager. Elle semble sûre de ce qu’elle prétend, comme toujours à vrai dire. En même temps, mieux vaut pour moi qu’elle sache ce qu’elle fait, sinon, sans doute que je me trouverais déjà dans de graves embêtements en ce moment même, si ce n’était pas le cas. « D’accord, je te crois. Mais j’espère que si jamais tes affirmations ne sont pas vérifiées, tu as prévu un plan de secours. Surtout en ce qu’il s’agit de Mimi Geignarde, à vrai dire. » Je finis par hausser les épaules, passant une main sur ma nuque alors que je baisse légèrement la tête, essayant de perdre l’air menaçant que j’ai pu revêtir quelques instants auparavant. Me faire gifler par Ainsley et avoir failli basculer par au-dessus les escaliers de Poudlard à cause de Chandler, me suffit déjà amplement, pour que je ne me prenne un coup supplémentaire. « Enfin, j’imagine que tu as déjà tout prévu. » je soupire en haussant légèrement les épaules, essayant de me rattraper quelque peu. Je lance un coup d’œil en direction de ses bras tendus, dont les poings sont résolument enfoncés dans les poches. Je me doute qu’elle ne se retient qu’à grande peine de ne pas m’envoyer de coup, destiné à me briser une dent ou deux. « Toi aussi, je te rappelle. Et puis, de toute façon, même les moutons, ceux qui suivent le mouvement sans faire d'histoire sont en danger. Personne n'est à l'abri, c'est le principe d'un régime de terreur. Alors si on doit être puni, autant que ce soit pour une bonne raison. » Elle n’a pas tord. Tout le monde est en danger. Mais ceux qu’elle qualifie très justement comme étant des moutons, se trouvent tout de même être les moins exposés à la guerre qui agite le monde magique. Et moins exposés aux foudres du Seigneur des Ténèbres, bien qu’ils n’en soient pas entièrement préservés, tellement cet homme – ce monstre ? – se montre fou. « Et malgré tout, tu es parvenue à me préserver par rapport à tout ça. » Me préserver des foudres des mangemorts et de celles de mon père. En aucun cas elle ne me préserve de la perte progressive d’Hester. Mais elle permet tout de même le fait que cette dernière ne se fasse pas embêter par mon paternel. « Je ne te remercierai sans doute jamais assez pour ça. » je souffle à son attention, sans trop savoir si c’est là une suite de mes paroles ou de mes pensées. Certainement un peu des deux, à n’en pas douter. Je décris un instant son visage fermé du regard, me demandant comment elle parvient à être aussi forte sans aucun soutien. Peut-être en a-t-elle, finalement. « Puisqu'on parle de jeu, tout va bien pour toi ? La société est toujours persuadée que tu es passé du côté obscur de la force ? » Voilà donc pourquoi elle m’a attiré ici. J’aurais dû m’en douter tout de suite. Quel imbécile je fais. Je hoche doucement la tête, me demandant comment tourner ma réponse. « Oui, grâce à toi, ma vie se trouve être vivable. » Je me tourne de nouveau vers elle, la dévisageant un instant, constatant qu’elle a une mine plus fatiguée que la dernière fois où je l’ai croisée. La guerre n’épargne vraiment personne. « Et toi ? Un jour, il va bien falloir que je rembourse ma dette à ton égard. Fais-moi signe quand tu auras besoin de moi. » je lui lanc,e en passant de nouveau ma langue sur mes lèvres.