I. TON PERSONNAGE ET LA SITUATION ACTUELLE ? Le but du jeu – oui, parce que je pense, malheureusement ou pas, que la vie est un jeu sous une forme totalement différente – a toujours été le même, aujourd’hui comme hier, en temps de paix comme en temps de guerre ou de crise. Ma conception du monde, ainsi que le rôle que je me devais d’y jouer, n’ont pas changé. Vous pourrez me dire que je suis mégalomane et arrogant, vous ne serez pas complètement dans le tort. Toutefois, je plaide la bonne intention, si je puis dire. J’ai toujours eu des grandes aspirations, et la finalité de ma vie est de toucher le monde. Je ne veux pas seulement aider la petite vieille dame à traverser – bien que je le fasse, n’est-ce pas ? – ou donner une pièce au mendiant apitoyé à deux rues de chez moi, je veux changer le monde à grande échelle. Y laisser mon empreinte, une bonne, ou l’égalité absolue serait en place ou en tout cas à portée de main, peut-être même un monde de paix totale où il n’y aurait pas cette fausse idée qu’il faut absolument avancer ou évoluer. Mon idéologie n’a pas changé d’un poil, elle est toujours aussi forte et je ne suis pas prêt à baisser les bras. En cela, je n’ai pas changé du tout… malgré les croyances.
Toutefois, il serait extrêmement faux que de dire c’est la même chose en temps de paix et en temps de guerre. Il y a beaucoup plus de contraintes lors de cette dernière, d’une certaine évidence. Même si je n’ai pas changé, même si mon idéologie est restée la même – et s’est vue même être renforcée –, j’ai du moi aussi m’adapter et faire des sacrifices. J’ai fait partie de l’Ordre du Phénix, par lequel j’ai énormément agi pendant la guerre, contre Lord Voldemort. Pourtant, aujourd’hui, à la fin de la guerre et à la victoire de celui-ci, j’ai conservé ma position au Ministère de la Magie ainsi que mon humble demeure à Londres, je ne suis pas marqué, et je fais partie des gens très influents de ce nouveau gouvernement. Oui, je suis passé dans l’autre camp, et pourtant – j’insiste – je n’ai pas changé. Mes convictions sont toujours en accord avec l’Ordre du Phénix, mort aujourd’hui, et si l’occasion est propice, je ferai partie des rebelles. Ce n’est pas pour sauver mon cul, comme Tomas le clame haut et fort et me blâme pour ce revirement de situation. C’est tout simplement une question d’efficacité. Si je veux me battre pour un monde meilleur, je le ferai bien mieux en observant le camp ennemi, en étant au courant des stratégies, et en m’alliant avec les gouvernements contre ce nouveau régime – bien que j’agisse plus tout seul qu’autre chose. Oui, je suis plus ou moins agent double, si vous le voulez. Je joue la carte de l’intelligence et de la patience, en attendant le bon moment pour agir correctement et efficacement.
Je voudrais rajouter, en dernier lieu, que si apparemment ma vie n’a pas excessivement changé avant et après la guerre, ce n’est pas vrai. Certes j’ai gardé mon boulot, certes je suis toujours un des hommes les plus importants du pays, certes on me laisse tranquille, mais je me retrouve à présent seul, moi qui avais énormément d’amis, et surtout j’ai perdu mon fiancé qui ne fait plus confiance aujourd’hui, et a l’impression que je suis devenu une toute autre personne, que je ne suis plus qu’un inconnu.

II. TOUT-A-SAVOIR : Edin n’a jamais eu de bons rapports avec son père, il l’a toujours profondément haï ce monstre alors que ce dernier ne semblait même pas prendre conscience de l’existence de son unique fils. Enfant, rebelle et chahuteur, il se confrontait sans cesse à son géniteur… en vain. Avec le temps, il a compris que l’homme n’en valait pas la peine, et s’est empêché de penser à lui pendant des années. Avec la guerre, il s’est retrouvé face à son père : les retrouvailles. C’est d’ailleurs en assassinant ce dernier qu’il a plus ou moins prouvé son allégeance au seigneur noir. ◊ En réalité, l’allégeance d’Edin va toujours au même camp, il n’a jamais retourné sa veste, bien qu’il veut le faire croire. Il savait que la guerre était perdue, et s’est dit qu’il serait bien plus utile dans le camp de l’ennemi qu’emprisonné et surveillé à tout moment. Chose qui a été facile à faire croire, vu les opinions très marquées et extrémistes de son père. Alors, voilà, aujourd’hui même ses anciens amis les plus proches pensent qu’il est devenu un réel mangemort. ◊ Malgré ce double jeu dangereux, et peut-être légèrement immoral, Edin n’a pas un brin de culpabilité. Ce n’est pas un monstre sans cœur, c’est juste une personne qui est très claire avec sa conscience, avec ce qu’il est. Il n’a jamais douté de ses actions et de ses raisons. C’est même une personne assez épanouie – pas heureuse avec les temps qui courent –, malgré  la guerre et la victoire de Lord Voldemort. ◊ Edin est légilimens et occlumens, bien qu’il soit meilleur occlumens. Son père était légilimens, et il s'est toujours senti le besoin de se protéger contre ce don maudit qu'avait la personne contre qui il était réellement vulnérable. Il n'a jamais su s'il s'en était déjà servi contre lui, bien qu'il soupçonne certains « rêves » de ne pas être de simples songes. De plus, Edin a également ce côté mégalomane, ambitieux et épique, qui a fait qu'il trouvait cela plus que « cool » – pour schématiser bien sûr, cela partait réellement d'un sentiment presque grandiloquent – d'avoir des pouvoirs particuliers si puissants en plus. Il a commencé tôt à les apprendre, mais cela n'a pas été une mince à faire. ◊ Il a réalisé très tôt qu’il était homosexuel. Dès l’âge de treize ans, il a su qu’il n’aimait qu’exclusivement les hommes. Même s’il apprécie énormément la présence féminine, sa popularité auprès des filles l’a toujours laissé de marbre. Et même lorsqu’il a fait l’amour à une femme, il a éprouvé un certain dégoût. ◊ De nombreux tatouages jonchent son corps. Toutefois, il a commencé à les cacher quand il a débuté sa carrière au ministère de la magie, en portant des costards trois pièces très couteux – non pas sans un certain second degré. Chose encore plus vraie depuis que Lors Voldemort est son patron indirect. Cela ne correspond plus vraiment à son personnage, de plus il préfère ne pas trop se laisser aller aux fantaisies. On ne sait jamais. ◊ On a toujours connu un Edin plein de vie, qui n'avait pas de langue dans sa poche, toujours à se foutre dans la merde et tout autre attrait d'un Gryffondor assez typique. Aujourd'hui, il n'est pas du tout comme cela. Il est calme, contrôlé et très droit. Ce n'est pas vraiment un personnage qu'il joue, c'est tout simplement ce qu'il est quand il met de côté sa personnalité extravertie. On pourrait dire qu'il a grandi, assez communément, mais ce ne serait pas tout à fait vrai. Il met juste en avant une représentation mature et sang-froid de lui, alors qu'à l'intérieur de sa tête défile des conneries. Oui, cela lui manque, et c'est une des choses qu'il regrette avec la guerre. ◊ Le vrai et unique amour de sa vie est son meilleur ami Tomas. Certes, il a eu d'autres histoires d'amour - des relations plus ou moins sérieuses -, et tombé amoureux d'autres personnes. Cependant, même s'il a été aveugle pendant des années, c'était et c'est l'évidence même que Tomas est son grand amour, pour toujours. ◊ Malgré le fait qu'aujourd'hui il soit beaucoup comparé à son père - à cause de son changement de camp,  ainsi que du fait qu'il appuie un peu sur son côté noir -, en réalité Edin ressemble énormément à sa défunte mère. Elle n'était que tendresse, douceur, compréhension, et pourtant d'une force et intelligence inouïes. Elle est la personne qu'il admirait - et admire toujours - le plus. Il essaie de suivre ses pas, mais de toute manière il a ses gènes. Il est ce qu'elle est. Ainsi, il a hérité des dons de sa mère en médecine. Même s'il n'excelle pas, parce que ce n'est pas son métier et qu'il n'en a pas fait ses études, il connaît les bases et sait se débrouiller, de tel qu'il est capable de soigner quelqu'un qui n'a pas quelque chose de très grave. ◊ Même avant Poudlard, il avait l'habitude de jouer en freestyle avec n'importe quelle sorte de balle, et cogner dedans autant que possible. C'est donc sans surprise qu'il a intégré l'équipe de Quidditch des Gryffondors en tant que batteur. Aujourd'hui il ne pratique plus la batte, mais quand il réfléchit il balance une balle contre le mur sans cesse. ◊ Edin, étant le directeur du département de la coopération magique internationale, interagit énormément avec la Russie, et notamment la France - bien qu'elle soit contre le nouveau régime anglais. Cela lui permet de rentrer souvent chez lui, et se reposer secrètement dans la petite maison de campagne de sa mère. Par ailleurs, c'est un excellent diplomate.

Jamais il n’avait réussi à avoir envie de rentrer chez lui, depuis qu’il s’était définitivement établi en Angleterre ; pourtant il avait essayé, il s’était donné du mal, il s’était forcé maintes et maintes fois, il avait même tenté de se faire un conscient lavage de cerveau… en vain. Ce n’est pas qu’il n’appréciait pas le temps brumeux et humide de Grande Bretagne, ou bien qu’il avait un quelconque mal du pays – bien que né à Sainte-Mangouste, le célèbre hôpital sorcier anglais, il avait toujours considéré la France comme sa contrée d’origine –, mais rentrer au bercail signifiait se cloitrer dans un grand manoir sombre et froid, ne pas bouger de sa chambre parce que c’était la seule pièce où il s’y sentait à peu près bien, et où il savait qu’il n’y croiserait pas son père. Homme exécrable qu’il n’avait jamais aimé, d’aussi loin qu’il se souvienne. Comment une femme aussi charmante et douce que sa mère avait pu trouver un petit quelque chose à un monstre comme son père, et tomber sous son charme ? Il soupirait toujours à cette réflexion, retournant dans tous les sens cette question sans réponse, souvent se tortillant en même temps qu’il triturait cette mystérieuse énigme, se retrouvant alors les pieds en l’air contre le mur, et la tête en bas, dans le vide, seulement soutenue au niveau du cou par le rebord du lit. Mais aujourd’hui, c’était différent : il voulait rentrer le plus rapidement possible. C’était différent parce que, aujourd’hui, il avait onze ans.
Rien à voir avec un quelconque anniversaire un peu stupide – enfin, indirectement si, mais, fondamentalement, ce n’était vraiment pas le sujet. D’ailleurs, chaque année, il était le premier étonné quand on venait le voir avec un grand sourire et des cadeaux. Souvent, il restait bouche bée pendant quelques longues secondes avant de se demander qu’est-ce qu’il avait encore pu bien faire. Il était extrêmement intelligent, certes, et cela il n’y avait personne pour le nier, mais il avait tendance à effacer inconsciemment de sa mémoire tous les détails peu importants, se donnant un air stupide, ou en tout cas marginal, par rapport au reste du commun des mortels. Mais oui, aujourd’hui il s’en était souvenu. D’ailleurs si vous n’avez pas encore deviné pourquoi, vous êtes encore plus stupides que la moyenne.
À bout de souffle, conséquence du fait qu’il ait sprinté de son école privée à chez lui, sans s’arrêter une seule seconde, il enfonça d’une main experte les clefs dans l’étroite serrure et entra dans son humble demeure en défonçant à moitié la porte. Il n’en avait rien à foutre, son père n’était actuellement pas présent. L’apogée du bonheur, car si même son géniteur n’aurait pas réussi à gâcher son plaisir, il en aurait été quand même amoindri. Il balança au hasard son sac, ses chaussures ridiculement hors de prix volèrent dans l’imposante pièce qui servait d’entrée, alors qu’il se jeta sur lui-même sur le premier meuble. Manquant de se rétamer violemment, il brandit l’enveloppe cachetée du sceau de l’école de sorcellerie avec brio, n’essayant même pas de retenir son hurlement de joie. Attention Poudlard, le voilà.


Le cœur battait si fort dans ses oreilles, qu’il en était momentanément assourdi. Quelle drôle de sensation que de mêler excitation et appréhension. Peut-être banal pour certains, c’était la première fois pour lui : il n’appréhendait jamais. Ce n’était pas tant le fait que de monter sur cette estrade, un peu trop lustrée, seul, face à tout le monde – il savait très bien comment se comporter en public, et n’en avait vraiment que faire de l’opinion des autres, encore plus de gens qu’il ne connaissait absolument pas. Si d’autres appréhendaient de toutes manières le choix de la maison – parce que, hey, tu vas être classé comme un pauvre document qui doit aller dans un des quatre classeurs de couleur, et tu vas vivre principalement avec les feuilles qui composent ce même classeur – – sans oublier que certains avaient effectivement une maison de prédilection –, Edin estimait qu’il avait plus de raisons que personne, toujours un peu de la même façon qu’il avait de se placer au dessus des autres. En soi, si, pour des raisons familiales, beaucoup souhaitaient rejoindre les rangs des Serpentards – supériorité du sang et toutes ces conneries – lui, pour des raisons assez similaires, il aimerait faire un doigt à Salazar – ou plutôt lui tirer la langue, il paraît qu’à onze ans on ne devrait pas être aussi grossier.
De Merteuil… De Merteuil… De ou Merteuil ? Edin se concentrait sur cette question qu’il se posait à chaque rentrée, pour savoir où il serait placé dans la liste faite par ordre alphabétique – si c’était stupide, je vous l’accorde, cette réflexion était certainement un peu plus pertinente dans ce contexte : savoir s’il y avait effectivement des chances qu’il vomisse à trop attendre, ou si son calvaire allait se terminer bientôt (ou pour laisser place à un extrême soulagement ou contentement, ou s’il allait tout droit en enfer). De… Cela devait être « de »… C’était toujours « de »…
Forcément, cette fois encore il avait eu raison, et son cœur n’avait pas eu tant de temps que cela pour accélérer encore plus et frôler la crise cardiaque. Bon, il exagérait peut-être un chouilla, mais c’était bien la première qu’il se sentait aussi stressé. C’est bien les yeux ouverts qu’il gravit les marches qui le séparaient du tabouret où il devait poser son cul pour que le légendaire choixpeau magique puisse, lui, s’asseoir sur sa tête de pauvre gamin apeuré, toutefois, il ne percevait rien de ce qu’il se passait autour de lui. Une image avait fait place dans son esprit, et il n’arrivait pas à s’en débarrasser. À ce moment là, il ne pensait plus du tout à son père, mais c’est le sourire doux et les yeux rassurants de sa mère qui l’accompagnaient. Imperceptiblement, il soupira et sourit. Tout allait bien se passer. Assis – il se contenait pour ne pas tortiller du fessier – il eut l’impression que le choixpeau lui déballait toute sa vie, et lui fit une conversation – des plus intéressantes – pendant de très longues minutes. Cependant, il se rendit compte que cela ne faisait même pas quelques secondes. Trop bizarre… « Gryffondor ! » Un immense sourire illumina son visage, et ne put retenir un petit cri de joie lorsqu’il se leva du tabouret. Le début d’une nouvelle vie : sa vie, indépendante aux volontés de son père.



La sueur se déversait sur ses draps fins et blancs, les trempant comme s’il s’était renversé un seau d’eau à cause de la chaleur estivale, et réussissant à se frayer un chemin à travers ses paupières closes, lui piquant alors les yeux. Ses mouvements saccadés lui donnaient un air presque possédé, un cauchemar qui semblait être sur le point de le bouffer. Ce qui n’était pas forcément si éloigné de la réalité que cela. Il se réveilla en sursaut, au même moment où la fenêtre frappa violemment le mur à cause d’une immense bourrasque de vent, pas si naturelle que cela. La respiration totalement éreintée, il devait forcer pour inspirer et expirer un minimum, continuer de respirer malgré tout. Si cela lui faisait mal au niveau des poumons, la souffrance n’était que minime par rapport à la douleur qu’il ressentait au niveau de la tête. Ce n’était pas une migraine ordinaire, non. En plus de la sensation de martèlements, du bruit strident qui l’envahissait, il avait l’impression que son cerveau était en lave, et cela le brûlait violemment, menaçant de le rendre fou. Mais le pire restait qu’il se sentait profondément violé.
Une fois que la douleur fut dissipée et qu’il était à présent très certain qu’il n’en crèverait pas, il rejeta ses draps trempés d’un mouvement de rage, et sauta à terre, n’ayant aucun problème de discrétion, faisant bien comprendre qu’il était entrain de descendre les escaliers et qu’il faisait son chemin jusqu’au bureau de son paternel. Il était presque quatre heures du matin, oui, et, pourtant, son père se trouvait encore éveillé, sans grande surprise. Le corps, et certainement la voix bien qu’il n’ait pas encore parlé, tremblants de rage, il s’approcha de l’homme, qui ne prit même pas la peine de se retourner pour faire face à Edin. « Tu n’as aucun droit de faire cela. » Le quadragénaire tilta imperceptiblement, comme s’il venait de découvrir la présence, ainsi que l’existence, de son fils. Il posa sa plume – comme s’il travaillait à cette heure-ci, il ne trompait personne – toutefois, il ne se retourna pas pour autant. « Je ne vois pas de quoi tu parles, Edin. » Lui qui avait appris à toujours se soumettre, encaisser et ne rien dire face à son père – malgré les petites rebellions de temps à autres – explosa. « Tu es un lâche et un menteur ! Tu n’as pas réussi à m’éduquer comme tu le voulais, alors tu sondes mon esprit pour savoir ce qui cloche chez moi. Tu me répugnes, père. » Il serra les dents et le poing, se faisant alors saigner la paume de la main à cause des ongles qui rentraient dans la chair, pour ne pas saccager la salle. Mais le mal était fait, et même si aujourd’hui il ne regrette en aucun cas sa réaction, sur le moment il vit sa vie défiler devant ses yeux, comme on peut le dire populairement. Ce fut la première fois qu’il vit cette lueur de folie dans les yeux de son père. Une seule fois, mais une fois de trop, où il en portera à jamais des cicatrices, physiques et psychologiques.


Depuis le temps, six ans exactement, le jeune Gryffondor avait pu s’habituer au plaisir qu’il ressentait lorsqu’il revenait à Poudlard après les grandes vacances. Cependant, il n’avait jamais été aussi soulagé de se retrouver de nouveau dans sa salle commune, avachi dans l’un des confortables fauteuils. Logan s’approcha de son meilleur ami, inquiet des énormes cernes bien trop visibles, ainsi que de son air absent. « Qu’est-ce qu’il s’est passé ? » Pas dupe, il le connaissait bien mieux que n’importe qui. Il était bien au courant des relations entre lui et son père, et du calvaire qu’étaient les étés pour lui. Cette fois-ci il semblait s’être passé un événement concret et grave, et pas des moindres. Edin passa une main lasse sur ses yeux bien trop gonflés, rouges et fatigués. Sa vie n’avait été qu’une succession de petits détails qui contrariaient son géniteur, et pourtant, le jeune homme avait l’impression qu’il n’en avait pas encore fait assez. « Il faut que je devienne occlumen, et un meilleur légilimen qu’il ne l’est. Il faut qu’il perde à son propre jeu. » Logan en resta bouche bée. Quelle idée saugrenue ! Malheureusement, il semblait tout à fait déterminé, et même si c’était idiot ou impossible, quand il était dans cette état, rien ni personne ne pouvait l’en dissuader.



Edin observait son homme préparer le dîner, un tablier autour de la taille, de sa place dans le salon, un sourire heureux et sournois sur les lèvres, prétendant bosser. À presque vingt ans, il avait réussi à obtenir un poste au ministère de la magie, au département international, et même si ce n’était pour le moment pas le boulot rêvé, il comptait bien monter les échelons jusqu’à ce qu’il fasse réellement ce qu’il voulait. Même s’il ne niait pas la chance qu’il avait d’avoir la vie dont il disposait : amant, maison, et travail dans la filière qu’il avait toujours voulue. Pourtant, malgré cela, il ne pouvait s’empêcher d’être anxieux. Même si le gouvernement n’en parlait jamais, de nombreuses rumeurs transportaient l’idée d'une montée de la magie noire et d’un mystérieux sorcier. S’il n’avait pas pour habitude de prêter attention aux idées populaires, il fallait être idiot, aveugle, ou sourd, pour ne pas s’apercevoir de la dégradation actuelle du monde. Pris de court, il avait rejoint cette organisation appelée l’Ordre du Phénix, bien qu’un peu sceptique sur son efficacité et son sérieux. Même si les sorciers qui composaient l’ordre semblaient réellement préoccupés de l’avenir du pays, et de la souffrance de ses citoyens, parfois Edin avait l’impression que c’était une réunion d’anciens élèves. Et bien oui, la plupart provenait de Poudlard, et était issue de la même génération. Il était dur de croire à une certaine crédibilité lorsque les Maraudeurs en faisaient partie… Même s’ils semblaient avoir mûris. Il soupira, un bref instant déconcentré de la vision de Logan entrain de couper les légumes. Il avait un très mauvais pressentiment.



Le chaos régnait en Grande-Bretagne, partout, tout autour de lui, avec cette sale sensation qu’il était extérieur à tous ces événements, que ce bordel n’arrivait pas à l’atteindre. Malgré le fait que la bataille n’ait pas encore été amorcée, que les corps ne tombaient pas à son passage, qu’il ne vivait pas dans un champ de ruine, il avait l’impression que cette montée des ténèbres était encore plus violente que lors de la première guerre, où pourtant les sorciers n’avaient droit à aucun répit, lançant sort sur sort, dans le but de blesser ou tuer son adversaire. Quelle boucherie. Mais, cette fois-ci, c’était bien trop calme. Bien trop glauque… Edin ne pouvait s’empêcher de faire un rapprochement avec la « Drôle de Guerre », soit l’attente des français de la seconde guerre mondiale. Le calme avant la tempête, en d’autres mots. Il avait même peur que, cette fois-ci, l’Ordre du Phénix ne suffise pas.


La victoire de Lord Voldemort n’était qu’une question de temps, et Edin avait pris sa décision. Il n’en avait parlé à personne, et serait très probablement désapprouvé de tous ses amis et alliés, incompris dans ses raisons. Mais c’était la seule solution, il n’accepterait jamais une défaite totale. Alors il arpentait les rues, à la recherche de l’homme qui pourrait lui permettre d’accéder à la place qu’il voulait. S’engouffrant dans une rue étroite de l’allée des embrumes, il trouva l’homme en question. C’était étrange de le revoir après tant d’années… vingt ans, exactement. Il n’avait pas seulement pris un énorme coup de vieux, il avait l’air d’être un malade mental, un fou qui n’avait plus toute sa tête. Cette lueur de folie qu’il avait captée dans ses yeux, dernière fois qu’il avait vu également cet homme qui ne représentait plus rien pour lui, n’avait donc pas été un fait de son imagination. À l’entente de ses pas, le mangemort se retourna pour faire face à son agresseur. « Edin… ? » Et oui, il l’avait reconnu, et semblait fort étonné du fait qu’il se tenait devant lui. « Salut, père. »  Le vieil homme ouvrit la bouche, comme s’il voulait adresser quelque parole à son fils unique, mais en seize ans ils n’avaient jamais échangé plus de deux mots, alors que pouvait-il bien lui dire maintenant ? Edin sourit… Il n’aurait jamais pensé que son père lui soit un jour d’une quelconque utilité, mais il faut croire que le destin nous réserve bien des surprises. Le ministre des relations internationales était un choix royal pour Lord Voldemort, ce dernier ne pouvait en aucun cas passer à côté d’un homme de son importance, sans oublier que ses facultés en occlumencie et légilimencie n’étaient pas des moindres non plus. Cependant, l’ancien Gryffondor devait pouvoir prouver son allégeance, et son paternel serait la clef. Celui-ci n’en savait rien, mais il avait été classé comme fou et sénile, d’aucune utilité, et encore plus : dangereux aux autres mangemorts, et Voldemort avait souhaité sa mort. « Je t’aurais bien remercié, mais tu ne comprendrais pas. Comme si tu as été un jour capable de comprendre quelque chose. » Une lumière verte surgit de sa fidèle baguette magique, frappant de plein fouet le mangemort, qui s’effondra dans un bruit sourd.



Les cris avaient cessé à l’extérieur, mais ce silence de peur, du peuple qui n’ose même pas respirer, atteignait beaucoup plus Edin à l’intérieur de son bureau. Pièce qui n’avait pas énormément changé, malgré un aspect plus noir, conforme à la situation actuelle, et au personnage sombre et mystérieux que se devait de jouer le directeur de la coopération magique internationale, fidèle au poste. Il soupira. Même bureau, et pourtant l’ambiance qui s’en dégageait était des plus morbides – satané nouveau régime –, disparus les photos de ses amis et de Logan ses petits et inutiles gadgets qui envahissaient son espace, menaçant à chaque seconde de le déconcentrer de ses priorités, et d’autres souvenirs de son histoire. Logan… Il ne l’avait plus revu depuis qu’il avait retourné sa veste et assassiné son père, cependant il le visualisait très bien l’engueulant d’un tel changement de comportement. Il aurait quand même bien gardé une photo de lui sur son bureau, pour qu’il puisse regarder son visage mécontent par rapport à ses actions.
Il marchait à travers les couloirs du Ministère de la Magie, vides de toute vie, et pourtant bondées de monde. Instaurer un nouveau régime demander beaucoup de travail, et ils seraient sûrement plein à craquer pendant de bonnes semaines : donner de nouvelles responsabilités, expliquer tout ce qu’il se passait aux citoyens, traquer les fuyards, et imposer la marque aux rebelles attrapés… Une queue se profilait, d’hommes et de femmes têtes baissées d’une manière des plus honteuses, loin devant lui. Ne pouvant l’éviter en prenant un autre couloir, il ne put que la dépasser en marcher à côté. Puis après tout, pourquoi la fuirait-il ? Il était un membre du gouvernement de Lord Voldemort à présent, il ne devait aucunement avoir honte. N’ayant aucun intérêt pour les sorciers qui stagnaient attendant patiemment que cela soit leur tour pour qu’on leur pose la marquer, son cœur rata un battement quand il sentit des yeux bleus qui lui étaient certainement pas inconnus se poser sur lui. Brièvement, il tourna la tête dans cette direction, et croisa le regard de Logan. Son cœur se brisa instantanément, c’était le regard le plus misérable qu’il avait vu de toute sa vie : incompréhension, haine, tristesse et trahison. Bien qu’il ne bougeait pas les lèvres, il entendant très nettement sa question en boucle : « pourquoi ? » Edin, ne pouvant pas trop s’attarder, détourna le regard comme si cela lui était égale, et s’en alla d’un pas lourd.