(hlw) charlotte & neville - Runaways

Humiliée, il n'y avait pas d'autre mot pour décrire l'état d'esprit de la sorcière. Elle était humiliée. Si elle ne s'était pas trouvée au beau milieu de la petite ville d'Arignans, Charlotte se serait tout simplement laissé aller et aurait fondu en larmes. Au lieu de cela, elle marchait les poings serrés, en maudissant intérieurement le sorcier trop hautain et orgueilleux qui venait de lui claquer la porte au nez. Elle était venue jusqu'ici dans l'espoir qu'il la reprenne en tant qu'apprentie, puisque c'était chez lui qu'elle avait débuté sa formation avant d'enfin être acceptée par Ollivander. Son premier tuteur n'avait jamais supporté cet affront et, aujourd'hui qu'elle était au plus bas, avait pris un malin plaisir à lui renvoyer la pareille. Il ne voulait pas la reprendre, alors qu'il était le dernier espoir de la sorcière - elle ne serait pas venue le supplier si elle n'avait pas eu d'autre choix. Et voilà que, avec son refus, elle voyait son rêve s'envoler : jamais elle ne pourrait fabriquer des baguettes. Jamais.

Comme elle ruminait sa déception, elle ne vit pas le jeune homme dans lequel elle fonça. Surprise par le choc, elle s'empressa de lancer un bref : "Désolée..." Puis leva les yeux vers la personne en question, et les écarquilla aussitôt en le reconnaissant. "Tu es... Neville. Neville Londubat !" s'exclama-t-elle alors, en Anglais, cette fois-ci, afin qu'il puisse la comprendre. Lui, bien évidemment ne la connaissait pas - elle n'avait, après tout, rien pour être connue. Mais voir ce gamin qui s'était battu pour ses amis, pour son école, pour ce qu'il croyait juste, fit oublier sa déception à Charlotte. Il avait, quoi, dix-sept ou dix-huit ans, et avait plus de tripes qu'elle. Et, surtout, qu'il se trouve ici lui rappelait à quel point il était facile de passer d'un pays à l'autre, quand on était sorcier. Alors, quand on était le Mage Noir le plus puissant que cette terre ait jamais porté... Combien de temps mettrait-il à envahir la France ? A y régner comme il régnait à présent sur le Royaume-Uni ? Personne n'était à l'abri, pourtant, elle s'était leurrée des mois entiers en se persuadant que fuir avait été la meilleure chose à faire, la solution la plus sure, pour elle mais surtout pour sa famille.

Il avait dû fuir pour ne pas se faire attraper. Le choc de la mort de Harry était encore frais dans son esprit et cela se ressentait sur son corps. Pour autant, le garçon n'avait pas eu l'intention de rester sur place pour se faire attraper et emmener directement au ministère. Pourquoi le ministère, Neville se l'était imaginé ainsi. Il ne savait pas où ceux présents avaient été emmenés mais une chose était sûre, Neville avait fuit.
On aurait pu le traiter de lâche à ce moment là, pourtant c'était un acte courageux puisqu'il refusait de se rendre et s'était dirigé vers la France. Là bas, il avait bien l'intention d'agir avant que Voldemort ne prenne trop de pouvoir et il voulait surtout aider Harry.

Neville marchait sans trop regarder où il allait. Il mit d'ailleurs le pied dans un trou de boue. Enfin c'était ce qu'il pensait avant de voir le trou s'élargir et de tomber. Il cria en brandissant sa baguette devant lui mais sa chute fut amorti par une espèce de grosse plante, tout en restant dans l'obscurité. Neville bougea alors pour se relever mais la plante se défendit et l'attrapa en l'encerclant avec des tiges. Le garçon eut le réflexe de ne plus bouger, en se souvenant de son amie Hermione qui avait vécu une situation identique en première année à Poudlard et dont elle en avait longuement parlé avec Neville. De plus, il n'était franchement pas mauvais en botanique, pour ne pas dire un fervent connaisseur. Puis, après quelques instants d'immobilité, il passa au travers de la plante et tomba sur le sol. Neville regarda au dessus de lui et se demanda franchement qui avait pu placer un filet du diable ici et comment il avait bien pu tomber dedans. C'était franchement bizarre et son impression des français était assez tendue. Ils les trouvaient réellement farfelus.
Quoi qu'il en soit, le garçon ne s'attarda pas dans cet espèce de couloir humide où il ne faisait pas vraiment chaud malgré le mois dans lequel il se trouvait. Il marcha une bonne dizaine de minutes avant d'apercevoir un escalier qui menait à une porte d'où la lumière s'échappait. Il grimpa les marches en courant et se retrouva dans une petite cabane qui semblait abandonnée. Neville en sortit et se retrouva il ne savait où. Toutefois, il continua son chemin pour trouver un endroit où dormir cette nuit et se reposer, et ce n'était certainement pas dans cette cabane.
Il marcha en époussetant son sweet et ne vit pas la jeune femme lui foncer dedans. Elle s'excusa dans une autre langue que l'anglais, certainement le français pensa Neville directement. Puis, elle s'exclama en anglais, reconnaissant Neville. Il leva alors la tête et pourtant, la jeune femme ne lui disait rien. " On se connait ? " Il préférait être prudent et ne répondit ni par oui, ni par non. Il ne savait pas qui elle était et avant d'avoir le cœur certain que ce n'était pas un piège, il garda sa baguette à la main et son regard méfiant.

Face aux traits fermés de Neville et à son attitude méfiante, Charlotte réalisa qu'il y avait eu certainement meilleure façon d'engager la conversation. Elle fit cependant l'effort d'ignorer la baguette qu'il tenait toujours à la main pour lui offrir un sourire qui se voulait rassurant avant de lui répondre, plus posément qu'avant : "Non, on ne se connait pas. A proprement parler. Mais..." La sorcière avait conscience que ses paroles sonnaient bizarrement, et avec la guerre qui faisait rage, elles pouvaient être interprétées aisément comme des menaces à peine voilées. Elle pesa donc soigneusement ses mots pour poursuivre : "Disons simplement que j'ai beaucoup entendu parlé de toi." Elle se pinça légèrement les lèvres avant de se décider à ajouter : "Et je dois dire que j'admire beaucoup ton courage." Son courage, sa détermination, l'espoir auquel il s'accrochait - tout ce qui lui manquait, à elle. Dire qu'il n'avait même pas fini sa scolarité ! Et qu'il devait connaître à peine un tiers des capacités d'un Mangemort - sans même parler de Vous-Savez-Qui. Une part de Charlotte le trouvait simplement suicidaire et le prenait en pitié, une autre, qu'elle refusait d'écouter en général, le trouvait exceptionnel et ne demandait qu'à l'aider. Face à lui, pourtant, et à son air épouvantable, c'était la deuxième qui l'emportait... Au risque de rendre Neville méfiant plus qu'autre chose. Elle fronça donc légèrement les sourcils en posant les yeux sur la baguette du jeune homme, puis secoua un peu la tête : "Sans vouloir te vexer, tu as l'air... épouvantable." Normal, pour un fugitif, pensa-t-elle aussitôt. "Est-ce que je peux faire quoique ce soit pour t'aider ?" dit-elle plutôt. L'aider ? Vraiment ? Et pourquoi lui ferait-il confiance, au juste ?

Neville regarda la jeune femme qui semblait peiner dans ses explications. Et il n'était pas d'un naturel patient, surtout en ce moment. Il s'appuya sur une jambe et croisa les bras, tout en conservant sa baguette dans une main. Il était étonné qu'on puisse le connaître en France, mais après réflexion, il se rappela qu'elle devait certainement être du Royaume Uni pour parler anglais avec lui. Simplement, cela ne lui avait guère traversé l'esprit lorsqu'il l'écoutait parler.
Lorsque la jeune femme lui parla de sa tenue, Neville baissa le regard et constata que le filet du diable ainsi que sa petite escapade lui avait laissé quelques traces sur les vêtements. Et puis, ses cheveux, n'en parlons pas. C'était évident qu'il n'était pas propre. Depuis combien temps n'avait-il pas pris une bonne douche ? Cela devait bien remonter à plusieurs jours. En plus, il était parti avec très peu de choses, et les vêtements n'avaient pas été sa priorité. Une subite envie de rire le prit, quand il pensa que ce n'était pas chez une femme qu'il trouverait des habits pouvant lui convenir.
" On vous a parlé de moi ? ... Avant toute chose, puis-je savoir qui vous a parlé de moi ? " Neville voulait bien la croire, mais il aurait aimé savoir dans quel camp elle se situait. Elle n'avait pas l'air d'une mangemorte et encore de quelqu'un de dangereux mais les apparences cachaient en effet beaucoup de choses. " Et bien, si vous pouviez m'indiquer un endroit où je pourrai acheter des vêtements ainsi qu'une auberge ou quelque chose du genre ça serait parfait. Vraiment. " Il verrait ainsi par lui même l'endroit et si sa source était fiable. Qui pouvait lui prouver qu'elle ne faisait pas parti des mangemorts qui devaient le rechercher ?
Heureusement, le garçon avait aujourd'hui plus de dix-sept ans et il ne portait plus la Trace. C'est d'ailleurs la date de son anniversaire approchant qui refit surface dans son esprit. Dans moins d'un mois, il aurait dix-huit ans, et il savait que cet anniversaire passerait à la trappe. Car Harry ne le fêterait pas. Et car lui ne sera pas en compagnie de ses amis. Et il savait que son anniversaire serait oublié pour encore de nombreuses années, pour la mémoire de Harry. Il ne se permettrait pas de le fêter.

Charlotte s'embourbait dans ses explications et elle sentait bien Neville devenir de plus en plus méfiant. Et, de son côté, la sorcière, désireuse de prouver sa bonne foi et de gagner sa confiance, enchainait certainement les maladresses... Si bien qu'après un moment, elle jugea préférable de simplement se taire et de laisser le jeune homme décider de la suite - il pouvait fuir en courant, l'attaquer ou peut-être, continuer la conversation. Au grand étonnement de la Française, il choisit la dernière option, et lui répondit malgré la suspicion qui se lisait sur chacun de ses traits. Il lui demanda brièvement qui lui avait parlé de lui et elle comprit aussitôt qu'ils s'engageaient sur un terrain glissant. Elle ne désirait nullement impliquer son mari là-dedans (surtout que ce n'était pas par lui qu'elle connaissait le nom de Londubat et qu'évoquer son implication dans l'Ordre faisait presque office d'excuse pathétique, même dans la tête de Charlotte), et ne voyait aucune explication qui ne puisse être prise comme une menace voilée pour quelqu'un de méfiant. Et Neville avait tout pour être méfiant.

Cependant, il continua en lui demandant si elle connaissait un endroit où il pourrait acheter des vêtements, et passer la nuit. Elle sourit brièvement, et sincèrement : sur ce point-là, elle pouvait l'aider. "Bien sûr, je connais assez bien Arignans... Mais je te conseillerais de faire attention..." son regard se posa sur la baguette que le sorcier tenait toujours à la main, prouvant qu'il n'avait pas besoin de son conseil. Elle poursuivit toutefois : "Malgré tout ce que le Ministère français dit pour calmer la population, la guerre a déjà dépassé les frontières britanniques et certains ici ne demanderaient pas mieux que de participer à l'arrestation d'un des Indésirables les plus recherchés par Tu-Sais-Qui." Charlotte lisait chaque jour La Gazette, même depuis la France et on y voyait souvent le visage de Neville y apparaitre, avec une récompense bien grasse à la clef. "Cela dit, tu devrais encore moins écouter les conseils d'une inconnue. C'est pour ça que je vais me présenter : je m'appelle Charlotte. J'ai suivi ma scolarité à Beauxbâtons mais ai vécu cinq longues et belles années en Angleterre... Jusqu'à ce qu'Il ne revienne, et que la guerre ne me force à revenir - ou à fuir, dirais-je - en France. Pourquoi ? Parce que tu vois, ma mère est secrétaire et mon père, dentiste. Des Moldus, oui et ma seule naissance me priverait de ma baguette." Elle avait parlé d'un ton acide qui illustrait à quel point elle haïssait la situation, qu'elle méprisait le gouvernement qui lui avait arraché sa vie, son avenir. Elle croisa les bras et acheva : "Mais si je tiens à conserver ma place dans le monde magique, je tiens surtout à suivre ma morale - autrement dit, je ne suis pas de ceux qui iraient vendre quelqu'un juste pour servir leurs intérêts." C'était l'essentiel, certainement. Restait juste à savoir si c'était suffisant pour un fugitif qui avait toutes les raisons du monde de se montrer paranoïaque.

Neville écouta attentivement le récit de la jeune femme. Ainsi, elle s'appelait Charlotte est s'était une Née-Moldue. Il comprenait très bien qu'elle ait fui l'Angleterre pour sa sécurité. Il baissa alors sa baguette, ramenant son bras près de son corps. Neville avait toujours été un peu méfiant envers les personnes qu'il ne connaissait pas. Mais là, elle lui semblait sincère et de toute façon il avait besoin d'aide. Pourtant, il restait une question en suspens et il ne l'avait absolument pas oublié. Etait-il déjà recherché activement ? Cette pensée lui disait que sa cavale n'en était pas finie. " Excusez-moi, mais vous ne m'avez pas répondu. Comment me connaissez-vous ? " Oui, il n'avait pas l'intention de lâcher l'affaire. Toutefois, il devait aussi lui répondre sur le reste de son récit. " Je peux comprendre ... Je suppose que Hermione est partie en cavale aussi. C'est une amie, et elle est Née-Moldue aussi. J'espère qu'elle est en sécurité. ... Mais, il me semble que l'on est assez tranquille concernant Voldemort en France non ? D'après ce que je sais, mais je ne suis pas très renseigné. Heu, par contre, ça vous dérange si on va dans un endroit moins fréquenté ? On sait jamais quoi .. "
Neville avait envie de lui faire confiance. Pourtant, quelque chose lui disait qu'il devait toutefois faire attention. Il ne savait pas comment elle le connaissait et c'était un point qu'il voulait éclaircir. Il regarda derrière lui et se décala pour laisser passer un sorcier et passa sa main dans les cheveux, avant de tenir sa baguette à l'horizontal, des deux mains, devant son ventre. Il avait quelques tics en ce moment. En fait, il les avait toujours eu, mais ça s'accentuait un peu en ce moment, car le stress était tout de même de mise.
Puis, il regarda rapidement le dos de sa main et vit qu'il saignait. Rien de méchant, bien sûr, mais il n'avait pas trop envie de rester avec une tâche de sang sèche sur la main. Il ne se rappelait pas de la formule pour nettoyer cela, et il n'avait pas de plante de lavement sur lui. " Excusez-moi, vous auriez quelque chose pour nettoyer ça ? "

Apparemment, les explications de Charlotte suffirent à Neville qui baissa sa garde, avant de lui poser de nouvelles questions. Elle avait pourtant eu l'impression d'être claire, auparavant. Il lui montra ensuite une blessure à la main et la demoiselle inspecta la coupure avant d'ôter le sang sec d'un geste de la baguette. Comme il souhaitait un endroit plus tranquille pour continuer à discuter, et éventuellement, y rester quelques jours, la sorcière proposa : "Je connais un endroit, pas très loin d'ici. C'est pas l'idéal et on dit même par ici que c'est hanté. Mais au moins, la réputation du lieu aura le mérite de garder les curieux loin, et tu pourras peut-être y rester un peu ?" D'un geste de la tête, elle l'invita à la suivre jusqu'au dit-lieu. Tout en marchant rapidement, elle clarifia les choses qui, apparemment n'avaient pas été claires jusqu'ici : "Je ne sais pas trop ce que tu imaginais, mais sache qu'on parle de toi au moins une fois par semaine dans la Gazette du Sorcier et la récompense est juteuse pour ta tête. Comme pour celle de certains de tes amis..." Et de mon mari, pensa-t-elle amèrement. Mais ce détail, elle le garda soigneusement pour elle, peu désireuse, à son tour, d'attirer les oreilles indiscrètes. "Même en France, ce genre d'argument fait des adeptes, ne te méprends surtout pas là-dessus. Tu n'es pas en sécurité ici, mais tu ne le seras probablement jamais plus nulle part." En tout cas, c'était ainsi qu'elle-même se sentait.

Ils s'engagèrent dans une allée en silence, traversèrent un verger pour arriver à une maison isolée et qui semblait abandonnée depuis des lustres. Une drôle d'aura semblait émaner de la maison, et un frisson remonta le dos de Charlotte qui se demanda alors si son idée avait été bonne. Finalement, elle respira un grand coup et s'avança jusqu'à la porte, l'ouvrit puis adressa un sourire confiant à Neville, et d'un geste de la main, l'invita à la rejoindre.

Tout en la suivant, Neville commençait à ne franchement pas l'apprécier. Même si sa tête était mise à prix et qu'il n'était pas en sécurité en France, il ne fallait pas que cette sorcière croit qu'il était assez bête pour ne pas le savoir. Et puis, de toute façon, il avait bien l'intention de changer les choses. Ce gouvernement n'allait pas durer. Il trouverait des adeptes. C'était obligé que d'anciens membres de l'Ordre ne veuillent pas tolérer cela. Et puis, il y avait aussi les élèves qui sortaient de Poudlard. Neville ne les oubliait pas non plus. Il n'oubliait personne susceptible de reprendre la main et le contrôle et de donner une bonne leçon aux mangemorts et à Voldemort. Eux qui avaient détruit la vie de certains et qui avaient brisé des rêves et des espoirs, Neville ne les oubliait pas.
C'était comme cette histoire de maison hantée. Cette blague ! Neville était franchement remonté. Il se fichait qu'il y ait un fantôme là dedans ! Il avait vécu avec des fantômes toute sa scolarité à Poudlard et il n'en était pas mort. Le garçon ne disait rien mais elle l'énervait. Aussi, il ne répondait plus à ce qu'elle disait. Pourtant il avait une question. Si elle admirait son courage, pourquoi voulait-elle lui plomber le moral ? C'était quelque chose qu'il ne comprenait pas.
Il entra derrière elle dans la maison et posa son sac. Sans une crainte, il défit son manteau qu'il posa sur la table, attrapa sa baguette et fit le tour du propriétaire. Une chambre et une salle de bain, ça lui suffisait. Pour manger, il trouverait bien quelque chose. C'était bien propre, pour une maison qui se disait abandonnée. " Vous m'excuserez." Puis Neville jeta un sort à la serrure pour la crocheter histoire qu'on ne puisse pas l'ouvrir. " Vous n'aurez plus qu'à la déverrouiller et la refermer à clé après. " Ce n'était pas une invitation à partir mais ce n'était pas non plus une invitation à rester. " Qui habitait ici ? Car c'est bien propre ! En attendant je ne vois rien d'effrayant pour le moment. " C'était vrai, Neville n'avait pas la frousse. Maintenant, ce n'était plus ce genre de chose qui lui faisait peur, mais des choses beaucoup plus réelles. Tragiques aussi.
" Je dois vous paraître un peu froid et distant. Mais je n'ai pas l'intention d'abandonner. Tant que le ministère et Voldemort seront toujours debout et moi vivant, jamais je n'arrêterai de défendre ma cause. " Ce n'était pas une justification, il souhaitait simplement savoir à quel camp elle appartenait. Il ne pensait pas qu'elle faisait parti des mangemorts ou du mauvais côté de la barrière. Elle n'adhérait peut être pas à ses idées mais le gouvernement ne l'appréciait pas du fait de son sang. Alors Neville pensait bien qu'elle n'appréciait pas le gouvernement non plus. Et puis ... elle l'avait aidé.

Charlotte n'avait jamais été du genre à prendre des baguettes quand elle était stressée. Et en ce moment, elle était en permanence sur les nerfs. Comme le jeune homme marchait en silence à quelques pas d'elle, la sorcière se demanda si elle ne l'avait pas vexé, avant de décider qu'elle s'en fichait. Quelles étaient les chances qu'ils se croisent à nouveau ? Et quand bien même, il avait voulu la vérité, elle lui avait donné, où était le mal ? Plutôt que de chercher à s'excuser, elle avança sans piper mot jusqu'à la maison dont elle avait parlé, ouvrit la porte et commença à inspecter les lieux. Elle ne savait pas vraiment à quoi elle s'était attendue ; certainement à retrouver une maison hantée comparable à celles qui servaient de décor pour un film d'horreur moldu. Pourtant, elle en avait vu des fantômes depuis son entrée à Beauxbâtons, et savait parfaitement qu'ils étaient inoffensifs. Restait que l'endroit, s'il était rangé et pas trop sale, lui fichait les jetons. Neville, lui, au contraire, semblait déjà s'installer, si bien qu'elle se demanda si elle ne devenait pas paranoïaque. Elle resta dans un coin, l'observant se déplacer dans la pièce, poser ses affaires. Quand il demanda si quelqu'un avait vécu ici, elle haussa les épaules puis expliqua : "Je n'en ai aucune idée, je connais cet endroit de réputation, c'est tout..." Elle se pinça les lèvres, balaya du regard la pièce avant de reporter son attention sur le jeune homme, qui parlait de nouveau, lui expliquant cette fois-ci qu'il n'abandonnerait jamais son combat. Le cœur de Charlotte se serra dans sa poitrine - c'était le genre de choses que Adam aurait pu dire, le genre d'idées qui l'entrainait dangereusement loin d'elle, pire, loin de tout ce qu'il avait été. Ne sachant pas vraiment quoi répondre à cela, elle hocha simplement la tête puis dit : "Bien... Tu as raison de garder espoir. N'oublie juste pas qu'on n'arrive jamais à grand chose seul" Pourquoi elle lui avait dit cela ? Elle s'empressa d'oublier cette conversation en ajoutant : "Est-ce que ça ira ici ? Tu as besoin de quelque chose ?" Et comme elle s'approchait de quelques pas, un forme blanchâtre surgit du sol, traversant son corps et lui faisant l'effet d'une douche glacée. Elle ravala un cri de surprise, puis regarda Neville interloquée alors que le fantôme hurlait d'une voix qui n'avait plus rien d'humain : "Hors de ma demeure, pauvres humains ridicules !" Concrètement, la sorcière était consciente que l'esprit ne pouvait rien leur faire, cela ne l'empêcha pas de saisir sa baguette.

Ainsi, elle l'avait emmené dans un endroit dont elle ne connaissait rien. A vrai dire, Neville s'en fichait un peu, tant qu'il avait un toit pour faire ce qu'il avait à faire. Il n'avait pas l'intention de rester plus longtemps que prévu. Neville n'écoutait la jeune femme que d'une oreille mais elle lui rappela quelque chose à laquelle il avait également pensé. On n'arriva jamais à rien seul. En était-elle certaine ? On pouvait très bien arriver à faire les choses seul, tout dépendait seulement de la tâche à accomplir. " Nulle cause n'est perdue tant qu'il y a encore un pauvre fou pour se battre. " Et c'était là ce qu'il pensait réellement. Il était persuadé qu'il arriverait à trouver des gens pour le suivre, des gens qui en auraient marre de se voir priver de liberté, d'être un esclave ou pire, un pion. Neville n'avait pas l'intention d'abandonner ses idées.
La jeune femme lui proposa ensuite, indirectement, de l'aide s'il en avait besoin. Enfin c'était comme cela qu'il le percevait. " Non je pense que ça ira très bien. Merci encore. " Il s'était un peu radouci. Oui, tout à l'heure, il s'était un peu emporté. Parfois, le ton qu'empruntait les gens pouvait porter à confusion et Neville était du genre susceptible en ce moment, il prenait très mal les commentaires des autres ou leurs petites critiques. Parfois ça allait mieux, parfois c'était pire.
Alors qu'il inspectait encore un peu les lieux, une espèce de fantôme surgit du sol et traversa de part et d'autre la jeune femme avant de déballer une phrase qui avait l'air préparée de toute pièce. Comme s'il était las de voir des gens passer ici. " Vous allez commencer par vous calmer. Je passerai la nuit ici, cracmol. " Pourquoi cracmol ? Car un fantôme ne pouvait pas descendre d'un moldu. Et puis, c'était le premier mot qui lui était venu. Certes un peu déplacé et grossier. Et Neville n'était pas de ce genre. Mais il était à cran. Vraiment à cran.

La réponse que Neville fit au fantôme déconcerta Charlotte, qui le regarda avec des yeux ronds, avant de voir l'esprit foncer jusque sur le jeune homme en hurlant : "Cracmol ? Tu oses m'insulter de la sorte ?" La voix du mort claquait dans l'air, s'imposait dans toute la pièce, si bien que la sorcière était sure que tout le village l'entendrait. S'il continuait ainsi, les gens viendraient probablement tourner autour de la maison, risquant ainsi de découvrir que quelqu'un y avait trouvé refuge, et qu'il s'agissait d'un fugitif britannique. Peut-être aussi qu'on ferait le lien entre elle et lui, puis entre elle et son mari, peut-être que ce fichu fantôme allait les mettre tous en danger, elle et sa famille. Peut-être qu'ils devraient fuir - sûrement que Adam voudrait se battre et qu'elle le perdrait. Des scénarios noirs surgirent dans son esprit, si bien qu'elle se tourna vers Neville pour lui lancer : "Je ne suis pas sure que passer la nuit ici soit une idée brillante." Nul doute que cet esprit l'empêcherait de fermer l'œil de la nuit - il y avait mieux comme endroit pour se reposer. Prise par la panique, elle se retrouva à ajouter : "Je peux t'héberger... Pour deux ou trois jours, le temps que tu puisses t'organiser." Ah oui, et en quoi accueillir un fugitif chez elle allait protéger sa famille ? Il était trop tard de toute façon pour ravaler ses paroles, aussi sourit-elle en lâchant : "Mon canapé sera bien plus confortable, et tu as l'air d'avoir besoin d'un repas chaud." Derrière elle, l'esprit continuait de hurler comme un dératé, rendant la conversation difficilement audible, on aurait presque dit un système d'alarme moldu, songea Charlotte.

Visiblement, l'esprit était devenu furieux. Neville avait touché la corde sensible. Toutefois, il le laissa hurler sans s'en préoccuper, finalement. Il était suffisamment fatigué pour avoir encore à se chamailler avec un esprit dérangé dans son sommeil. Les fantômes de Poudlard étaient bien plus sympathiques, même si Peeves lui avait souvent tapé sur la citrouille durant sa scolarité.
Charlotte proposa ensuite à Neville de l'héberger pour la nuit. Voire quelques jours. C'est clair que l'endroit serait sans nul doute beaucoup plus accueillant que les lieux où ils se trouvaient. Neville pourtant hésita. Qui lui disait que ce n'était pas un piège ? Et il aimait son indépendance désormais. Mais la jeune avait raison, son canapé serait certainement plus confortable que les planches en bois et le maigre matelas qu'il avait trouvé. Et même si le temps était au beau fixe, les courants d'air la nuit allaient lui donner des crampes ... Et bon, même avec un bon coup de baguette, les douleurs restaient encore un peu et il n'avait vraiment pas besoin de cela. " Et bien écoutez c'est d'accord. Je vous suis. Encore merci. " Le garçon ne savait pas quoi rajouter d'autre. Il afficha un sourire en guise de remerciement. Neville était parfois un peu niais, mais n'importe qui dans sa situation n'aurait su comment réagir exactement. Alors bon, il avait une excuse. Et puis, avec tout ce qu'il se passait en ce moment, tout le monde était devenu plus suspicieux et plus bizarre qu'à l'ordinaire. Là aussi, c'était à prendre en compte.
Le garçon attrapa son sac alors que l'esprit les suivait en hurlant. Soudain, le garçon en eut marre et lui jeta alors un sort de bloque langue. Au moins, le fantôme ne pouvait que se taire. Des petits gémissements coléreux sortaient de la bouche de l'esprit et Neville lui adressa un petit sourire, avant de prendre son sac et de sortir de la petite maisonnette.