Je regardai la marque des Ténèbres sur mon avant-bras. L'encre semblait devenir de moins en moins opaque. Je la détaillai du regard, absorbé à sa contemplation. J'avais appris que Charlie était un né moldu et qu'il battait régulièrement Annie. Cela ne m'étonnait même pas. J'abaissai ma manche discrètement. Le Lord se faisait faible. J'avais vingt cinq ans. Le Lord se faisait faible... Mais ce n'était pas pour autant que j'allais me désister. Il était toujours là, quelque part, reprenant des forces, attendant le moment propice pour revenir, plus fort, plus puissant que jamais. Je le savais. Et quand il reviendrait, il nous donnerait l'ordre de tous les tuer. Ce que nous ferions. Et je tuerai moi même ce bâtard.

Un sourire malsain glissa sur mes lèvres, se muant rapidement en une expression neutre. Je ne savais même pas comment ce vieux fou de Dumbledore avait pu m'offrir ce poste de bibliothécaire sans se rendre compte que son pupille était un de ses ennemis. Un vieux fou, oui, c'était le mot. J'étais un parasite qui grandissait en modelant des idées dans la tête de ses élèves, et il ne le voyait même pas.

Dès que je fus nommé bibliothécaire en chef, à mes 31 ans, les élèves féminines semblaient passer plus de temps à la bibliothèque, alors que la chaleur écrasante rendait le lac le lieu le plus attractif de Poudlard. Assises autour d'une table, gloussant discrètement, tentant de ne pas briser le silence des lieux, elles me dévisageaient avec le rose aux joues. Petites idiotes. Je fermai le livre que je tentais de lire, agacé par leurs chuchotements. « Mesdemoiselles, pourriez-vous parler moins fort ? » demandai-je, arrivé à leur table. Elles semblaient toutes pendues à mes mots. Toutes sauf une. Que je n'avais pas remarqué jusqu'alors. Des grands yeux clairs, l'air vif, des jambes à se damner... Elle me dévisageait et je faisais de même. Elle avait quelque chose de mutin dans le regard. C'en était déconcertant. Elle esquissa un sourire. Les autres filles chuchotèrent un oui trouble. A vrai dire je m'en fichais un peu, de leur réponse. Tout ce qui m'importait, c'était de savoir le nom de cette élève. Je pouvais pressentir ce qui allait arriver... Lorsqu'elles quittèrent la bibliothèque, une ou deux heures plus tard, je ne pus m'empêcher de la retenir. Juste elle et moi. Un regard à son blason m'indiqua qu'elle faisait partie de mon ancienne maison. Gryffondor. Peut-être était-ce une née moldue? Non, elle ne ressemblait en rien à ces bâtards ambulants. « Excuse moi de te déranger, mais pourrais-tu dire à tes amies d'éviter de prendre la bibliothèque pour un salon de thé ? » Elle arqua un sourcil. « Moui. » Elle avait l'air de s'en ficher royalement. Elle tourna les talons, fit quelques pas, avant de revenir en arrière. « Monsieur Cosway, c'est ça ? » Je ne la corrigeais pas, bien qu'elle avait écorché mon nom. « J'ai quelques lacunes en métamorphose. Est-ce que vous pourriez m'indiquer quelques livres qui pourraient m'aider ? » Je lui décochai un regard probablement douteux, avant de lui faire signe de me suivre.

Son visage n'était qu'à quelques centimètres du mien. L'idiote. Arya - c'était son nom - était une idiote. Me faire tourner en bourrique de la sorte, pendant deux longues années... Elle s'amusait à tenter de me séduire. Je le savais. Elle prenait son temps, m'effleurant le bras lorsque nous discutions de magie, soupirant d'une manière qui me rendait fou. Elle multipliait les allusions. Sa voix, Merlin, sa voix... Arya se mordit la lèvre, doucement, fixant les miennes. Je craquai. Nous étions seuls dans la bibliothèque, entre deux rayons peu fréquentés. Je posai ma bouche sur la sienne, me laissant submerger par l'animal que j'étais. Nos mains se cherchaient, nos corps se collaient, ondulant, frissonnant, désirant la chaleur de l'autre. Elle avait un goût sucré. Je la soulevai, ses jambes entourant ma taille. Elle passa une main dans mes cheveux, les agrippant légèrement. Oh putain. Au bout d'un long moment, elle se détacha de moi, malicieuse. « C'était très.. » Elle passa la langue sur ses lèvres. « Intéressant. » Haletant, je défis ma cravate pour me rafraîchir. « Tu n'attendais que ça, hein ? » chuchotai-je, avec un sourire en coin. « Oh. Je ne pensais pas que vous vous en rendiez compte.. » La façon dont elle appuyait sur le vous me rendait fou. Elle m'embrassa à nouveau, plus doucement, avant de plisser sa jupe et de tourner les talons. Elle laissa derrière elle une odeur de bois de santal. Et ce fut la dernière fois que je la vis à Poudlard. Elle était en septième année. Un mois plus tard, elle quittait l'école, ne me laissant plus que le souvenir d'une élève que j'avais désiré.